Algérie-Slovénie : pour un partenariat «sans limite»

0
182

Par M. Mansour

L’Algérie et la Slovénie s’entendent bien, voire très bien, mais cette entente reste pour l’instant déconnectée de résultats concrets. La visite d’État du président Tebboune dans ce pays ne vise donc pas à entretenir cette cordialité, mais à la traduire en actes. Accueilli hier par la présidente Nataša Pirc Musar, il a posé les premiers jalons d’un partenariat plus ambitieux, porté par une entente politique rare entre deux pays que la géographie éloigne, mais que les positions de principe et les ambitions partagées se rapprochent.
C’est devant la presse, dans le cadre d’une conférence conjointe, que les deux chefs d’État ont dressé un premier bilan de cette visite. D’emblée, la présidente slovène a tenu à souligner le caractère singulier de cette rencontre, en saluant « la présence du président Tebboune, accompagné d’une importante délégation », qu’elle a interprétée comme un « reflet de la solidité des relations entre l’Algérie et la Slovénie ».

Convergence politique et ambitions partagées
Un an après l’ouverture réciproque d’ambassades, Alger et Ljubljana entendent structurer leur coopération. Des accords et mémorandums d’entente ont été signés dans divers domaines. En toile de fond, un constat partagé par les deux chefs d’État : l’excellence politique des relations bilatérales contraste avec la faiblesse des échanges économiques.
La présidente slovène l’a reconnu sans détour. Selon elle, « les échanges commerciaux entre les deux pays demeurent largement en deçà des potentialités », estimant que leur volume « ne dépasse pas les 100 millions d’euros », ce qui fait de l’Algérie le troisième partenaire africain de la Slovénie. C’est pourquoi les deux parties ont convenu d’« accélérer la coopération dans les domaines de la police, de l’immigration, de l’intelligence artificielle, des énergies renouvelables et de l’agriculture ».
Prenant la parole à son tour, le président Tebboune a abondé dans le même sens, affirmant que « la convergence des positions entre nos deux pays est totale », ajoutant que cela couvre « l’immigration illégale, le spatial, la question des ressources hydriques, l’agriculture et l’intelligence artificielle ». Sur le plan économique, le chef de l’État a fait le constat d’un « taux des échanges très faible », avant de s’engager à ce que les deux pays « œuvrent à l’avenir à le relever dans tous les domaines ».

L’Algérie, un partenaire crédible
Cette volonté s’est traduite par la signature d’un contrat entre Sonatrach et la société slovène Geoplin pour la fourniture de gaz naturel sur deux ans. Un contrat salué par la partie slovène, qui a rappelé que près de 50 % de sa consommation actuelle en gaz provient d’Algérie. Un élément que le président Tebboune a utilisé pour souligner « la fiabilité énergétique de l’Algérie », affirmant que le pays est « prêt à répondre à tous les besoins exprimés par la Slovénie », et rappelant que l’Algérie « ne revient jamais sur ses engagements, quelles que soient les circonstances ».
Mais la coopération ne se limite pas aux hydrocarbures. Dans le domaine hydrique, le chef de l’État a indiqué que deux opérations ont été lancées dans les domaines de l’épuration et du recyclage des eaux usées pour des usages industriels et agricoles, tout en laissant entendre qu’une coopération avec la Slovénie reste possible. À cela s’ajoute le programme national de dessalement de l’eau de mer, que le président a qualifié de « solution désormais généralisée dans les zones à forte densité démographique ».
Dans le domaine de l’intelligence artificielle, le président a fait valoir que l’Algérie était « le premier pays africain à avoir ouvert une école supérieure dédiée à cette discipline ». Il s’est dit optimiste quant à la conclusion d’un « jumelage entre l’Algérie et la Slovénie » dans ce secteur d’avenir.

Vision partagée sur les questions internationales
Sur le plan diplomatique, les deux chefs d’État ont affiché une proximité remarquable. La présidente slovène a plaidé pour « des solutions pacifiques aux conflits au Moyen-Orient et en Afrique », tout en réaffirmant son soutien à « l’intégrité territoriale de l’Ukraine ». Elle a également évoqué la question du Sahara occidental, indiquant que la Slovénie était favorable à « une solution acceptable par les deux parties, dans le cadre des Nations unies, sur la base d’un compromis et du droit à l’autodétermination ».
Des positions que le président Tebboune a saluées, les qualifiant de « courageuses et marquées par la probité ». Il a particulièrement remercié la Slovénie pour sa reconnaissance de l’État palestinien, qu’il a qualifiée d’ « acte fort de la part du premier État européen à le faire ». L’Algérie, a-t-il rappelé, reste « un pays pacifique, préoccupé par la stabilité dans la Méditerranée et dans le monde », une constance diplomatique qui, selon lui, rapproche les deux nations.

Forum économique
Au-delà des déclarations, cette visite a donné lieu à un renforcement du cadre institutionnel. Ont été signés : un mémorandum entre les ministères des Affaires étrangères pour la mise en place d’un mécanisme de concertation politique ; un accord entre les ministères de l’Intérieur sur la coopération policière ; une déclaration d’intention dans le transport maritime ; un mémorandum sur l’utilisation pacifique de l’espace ; ainsi que des ententes entre les chambres de commerce et les agences d’investissement des deux pays.
Enfin, lors du Forum économique algéro-slovène qu’il a coprésidé avec la présidente Musar, le président Tebboune a appelé à un partenariat « sans limites », insistant sur la nécessité de traduire l’excellence politique en actions économiques concrètes. Il a mis en avant les atouts de l’Algérie : une jeunesse ambitieuse, « 15 grandes écoles spécialisées dans des disciplines scientifiques de pointe », et surtout, « une économie sans dette extérieure, gage de souveraineté et de liberté de décision ».
À travers cette visite, Alger et Ljubljana ont acté le passage d’une relation cordiale à une coopération stratégique. Le défi, désormais, est d’inscrire cette dynamique dans la durée, en alignant les intentions politiques sur des projets concrets. L’axe Alger-Ljubljana est lancé : il reste à le faire vivre.