Bouira : Le grave dérapage de l’imam Ammar

0
48

/Grande tension samedi soir à Bouira, plus précisément dans la commune de M’Chedallah lorsqu’un concert en plein air a été soudainement interrompu par un imam en furie.

Il est presque minuit, la populaire chanteuse kabyle Taous Arhab est en train d’enflammer les foules. Au lendemain de son passage à Béjaïa où son concert a connu un franc succès, l’artiste fait escale à Bouira où elle est attendue pour un gala organisé par la direction de culture de la wilaya en partenariat avec une association locale et cela au niveau de la Place des martyrs, lieu habituel des rassemblements et festivités organisés dans la commune. Prévu à 22h, le concert débutera une demi-heure plus tard après la fin de la prière des tarawih. Le public est au rendez-vous, petits et grands, femmes et hommes, la place publique est prise d’assaut par les citoyens.  Cependant, l’imam de la mosquée El Hidaya qui se trouve juste en face de la place abritant l’évènement ne voit pas les choses du même œil. Considérant la tenue de ce gala comme une atteinte à la sacralité du lieu de culte, il commence à diffuser du coran à partir de la mosquée dans une tentative de «raisonner» les citoyens. Les organisateurs, croyant que l’Imam avait oublié le micro ouvert ont tenté d’aller le lui dire, mais les portes de la mosquée étaient fermées à double tour. En même temps, l’imam, fou de rage perd le contrôle, saisit le micro de la mosquée et commence à proférer des insultes à l’égard des gens présents sur place les traitant entre autres de mécréants, racaille et autres insanités. La situation aurait bien pu déraper, même plus, tourner au drame, sans l’intervention de certains sages, mais pas que, puisque les jeunes présents sur place ont fait preuve de beaucoup de sang-froid et d’intelligence en évitant d’aller se faire justice eux même. Au final, le pire a été évité de justesse. Sans voix, l’artiste et son orchestre étaient contraints de mettre un terme à leur prestation.

Un gala autorisé par les autorités locales

Suite à ce dérapage, la wilaya de Bouira et l’Assemblée populaire de wilaya n’ont pas tardé à réagir en rendant public un communiqué conjoint hier après-midi dans lequel elles qualifient ce qui s’est passé d’«incident verbal isolé» en indiquant que les mesures nécessaires dans des situations similaires ont été prises. «Suite à l’incident verbal isolé qui s’est produit avant-hier dans la commune de M’Chedallah à cause de la tenue d’un concert sur la place publique de la commune et qui a connu un dérapage verbal ayant heurté la sensibilité des gens, nous portons à la connaissance des citoyens que les autorités locales et sécuritaires ainsi que quelques élus et membres de la société civile travaillent pour éviter une interprétation hors contexte de la situation, et cela, après avoir enregistré de telles tentatives sur les réseaux sociaux. Tous ces efforts ont permis de contenir la situation en plus des mesures administratives engagées dans pareille situation», rapporte le communiqué des autorités locales. De son côté, le président d’APC de M’Chedallah, Mohamed Allouche, dans une déclaration à un quotidien arabophone a affirmé que les organisateurs de l’évènement ont bel et bien eu l’autorisation des autorités locales pour exploiter l’espace public qui « abrite l’ensemble des activités artistiques, manifestations culturelles et meetings politiques, sans aucun problème», a-t-il fait savoir. De son côté, l’imam a déclaré avoir agi sous l’effet de la colère en regrettant ses propos envers la population mais s’est toutefois refusé de présenter des excuses en public avant de se rétracter plus tard.  

Devant les enquêteurs, l’Imam a dit souffrir de troubles psychologiques

Cette affaire a enflammé les réseaux sociaux.On ne parlait que de ça pendant toute la journée d’hier jusqu’à ce que le prédécesseur de cet Imam ne publie un long message sur sa page Facebook dans lequel il a condamné les propos de son confrère et défendu les habitants de M’Chedallahqu’il a qualifiés de «civilisés», «gentils», et de «bons musulmans».Entre temps, M’Chedallah était en ébullition. Les habitants se sont déplacés au siège de la commune et de la daïra pour exiger le départ de «l’imam Ammar». «Comment voulez-vous qu’on accepte de prier derrière lui après tout ce qu’il a dit ? Comment voulez-vous qu’on écoute et qu’on respecte un imam qui nourrit la fitna ?» dira un citoyen au micro d’une chaine de télé privée. Pour ne pas laisser les choses s’envenimer, quelques sages et vieux du village se sont réunis avec le directeur des affaires religieuse de la wilaya de Bouira. Ce dernier a convoqué l’imam Ammar et lui a demandé de faire des excuses publiques ce qu’il fit. En milieu de journée, l’imam avait été entendu par la police. Interrogé sur les raisons qui l’ont incité à agir de la sorte, le protagoniste a évoqué des troubles psychologiques. «Je ne savais plus ce que je faisais, je souffre de troubles psychologiques, j’étais en état de démence. Je m’excuse…», révèle le chef de la daïra, qui, à son tour, a regretté puis condamné vigoureusement l’attitude de l’Imam. Les habitants de M’Chedallah eux, exigent l’ouverture une enquête pour essayer de comprendre les motivations de cet imam, qui, selon eux, a agi de manière délibérée et dans un but bien précis.

W. S.