De Villepin : « On ne va pas rejouer une nouvelle guerre d’Algérie »

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De Villepin au sujet de la tension entre l'Algérie et la France

L’ancien Premier ministre français 2005-2007, et fort probablement candidat à la prochaine présidentielle en France, Dominique de Villepin, s’est à nouveau exprimé, ce lundi, sur la crise algéro-française dont il impute l’exacerbation à des velléités de certaines parties en France de « régler des comptes ».

S’exprimant sur franceinfo, l’ancien proche collaborateur de Jacques Chirac a d’emblée battu en brèche l’argument de l’extrême droite et de certains officiels, selon lequel « l’Algérie a humilié la France ».

 « Je suis diplomate de formation, et s’il y a un sentiment dont il faut se  méfier en matière de diplomatie c’est l’humiliation. Rappelez-vous la Dépêche d’Ems, là aussi la France a été humiliée, on était parti en guerre pour cela parce qu’on a jugé qu’on était humilié, et c’était en fait une manipulation. Rappelez-vous encore le coup d’éventail du Dey d’Alger, il y a presque 200 ans, là aussi la guerre a suivi…donc on ne va pas rejouer une nouvelle guerre d’Algérie ! », a t-il déclaré.

Tout en convenant que l’Algérie et la France vivent « la crise la plus grave », de Villepin a appelé surtout à « faire preuve de beaucoup de sang froid ». « Entre nous et l’Algérie, il y a des millions d’algériens de France, de franco-algériens et des millions de français issus du Maghreb qui tous voient avec beaucoup d’inquiétude, ces fluctuations, ces évolutions qui ont affecté hier le Maroc et qui affectent aujourd’hui l’Algérie. Nous avons un devoir vis-à-vis de l’histoire et de nos peuples : c’est celui d’être capable de répondre à ces difficultés », a-t-il plaidé estimant que l’on doit être « capable de trouver la voie ».

« Nous n’avons pas le droit d’entrer dans la logique de la politique du pire »

A l’animatrice qui mettait en avant que la France a tout essayé, de Villepin, en vieux routier de la politique, a affirmé qu’ « il ya un malentendu depuis le départ ». « Il y a un malentendu, depuis le départ, de ministres de l’intérieur qui veulent régler des questions qui ne se règlent que par la diplomatie, à la place du ministre des affaires étrangères et de la diplomatie », a-t-il déploré invitant à méditer le cas de l’Italie qui a, a-t-il expliqué, réglé en grande partie son problème migratoire grâce à l’action diplomatique de Mme Meloni et « jamais dans l’escalade et la surenchère ».

De Villepin qui a déjà largement critiqué la diplomatie française lors de son interview sur Médiapart, a réaffirmé que si en France ça ne marche pas, « c’est qu’on n’a pas forcément utilisé les bons moyens ou pas suffisamment au bon niveau ». « Nous n’avons pas le droit de baisser les bras et nous n’avons pas le droit de rentrer dans la logique de la politique du pire dont nous savons qu’elle sera sans effet et conduira à des surenchères », a-t-il poursuivi.

Un seul chemin…celui de la réconciliation

Interrogé sur l’accord de 1968, De Villepin a souligné que cet accord « a été déjà remis en cause de nombreuses fois », mais s’il y a souhait de le rediscuter encore il faut tout simplement parler avec les algériens. « Est-ce qu’on est obligé d’adopter une position punitive ? » s’est-il interrogé non sans appeler de ses vœux à « sortir de ces logiques ». « J’ai eu à gérer beaucoup de crise durant ma carrière, et je sais que ce n’est pas comme ça que l’on peut aboutir ! », dit-il avant de noter avoir observé qu’ « il y a une tentation de se laisser aller à régler des comptes ».

« Nous ne somme pas, aujourd’hui, compte tenu de la gravité des choses, à devoir nous faire plaisir en réglant des comptes », a-t-il plaidé rappelant que « la France a payé suffisamment à travers l’histoire pour apprendre qu’il n y a qu’un chemin : c’est celui de l’amitié, du respect et de la réconciliation ».

S. LESLOUS

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