Discours anti-Algérie : De Villepin recadre Retailleau et l’extrême droite française

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Former French Prime Minister Dominique de Villepin arrives at Saint Sulpice church in Paris, Monday, Sept. 30, 2019. Past and current heads of states are gathering in Paris to pay tribute to former French president Jacques Chirac. A private family church service for Chirac, who died last week at the age of 86, is taking place Monday. (AP Photo/Michel Euler)/MEU10/19273765564781//1909302321

Par Zine Haddadi

 

En France, l’obsession d’une partie de la droite présente au sein du gouvernement Barnier et de l’extrême droite pour l’Algérie répond à des calculs politiciens et des desseins idéologiques, selon Dominique de Villepin, ancien Premier ministre.
Le constat fait par le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, lors de sa dernière rencontre avec la presse nationale, est partagé par un poids lourd de la classe politique française de droite, à savoir Dominique de Villepin.
Dominique de Villepin a sèchement recadré le ministre de l’Intérieur français Bruno Retailleau suite à ses sorties hostiles à l’Algérie depuis sa nomination et par la même occasion, l’extrême droite qui a trouvé en lui un porte-voix au sein du gouvernement Barnier.
Invité de la matinale de France Info, hier, l’ancien Premier ministre sous Chirac a dit regretter qu’il y ait en France ce qu’il a qualifié de «tentation» de faire de «l’Algérie le bouc émissaire d’un certain nombre de nos problèmes», notamment «en matière d’immigration».
«La tentation aujourd’hui, ici en France, c’est de faire de l’Algérie le bouc émissaire d’un certain nombre de problèmes. Et c’est particulièrement vrai en matière d’immigration. L’Algérie n’a pas à porter cela et nous avons à trouver avec les Algériens des réponses et des solutions», affirme Dominique de Villepin.
Sur les accords migratoires de 1968, Dominique de Villepin a questionné les motifs de leur remise en cause par les personnalités hostiles à l’Algérie. «Vouloir brandir aujourd’hui le symbole de l’accord de 1968, dont nous savons tous qu’il est une des conséquences des accords d’Evian, c’est vouloir ouvrir une guerre avec l’Algérie ? Une guerre des mémoires ? Tout cela est absurde, il y a d’autres chemins», a-t-il déclaré.
Il semble clair pour Dominique de Villepin que l’insistance de l’extrême droite et d’une partie de la droite représentée par Bruno Retailleau, le nouveau ministre de l’Intérieur, sur les accords de 1968 sert juste à alimenter la controverse avec l’Algérie dans un but idéologique.
C’est d’ailleurs ce qu’avait fait remarquer le président Tebboune lorsqu’il a parlé de «coquille vide» en évoquant la polémique sur les accords de 1968. Le chef de l’Etat est allé plus loin en qualifiant ce dossier d’étendard derrière lequel se cache l’armée des extrémistes.
Avec sa position singulière sur les accords de 1968, Dominique de Villepin démontre qu’en s’éloignant des passions idéologiques et des calculs politiciens, qui dictent les positions d’une partie de la classe politique française, il est possible de tout discuter avec l’Algérie.
Pour y arriver, il prône un dialogue dans le respect. «Aujourd’hui, nous ne réglerons la question de l’immigration des Algériens détenus en centres de rétention administrative et que nous voulons renvoyer chez eux qu’en accord avec l’Algérie», a-t-il expliqué.

 

De Villepin montre la voie à suivre
Néanmoins, l’ancien diplomate dresse quelques préalables à respecter dans la démarche de règlement de la question migratoire avec l’Algérie.
«Cela implique le dialogue, cela implique le respect et cela implique la capacité d’assumer cette Histoire qui est partagée et qui est si importante des deux côtés de la Méditerranée», a-t-il suggéré.
Ainsi, la France est appelée à faire des pas en avant, notamment sur son passé colonial en Algérie et ne pas céder à la tentation idéologique, selon Dominique de Villepin qui, visiblement, est sur la même longueur d’onde avec le président Tebboune à ce sujet.
Dominique de Villepin a constaté que les relations avec l’Algérie qu’il considère comme «grand pays ami frère», se dégradent «jour après jour». L’ancien Premier ministre français est également revenu sur l’alignement français sur la thèse du plan d’autonomie marocain concernant le Sahara occidental. Sur ce sujet, qui cristallise les tensions entre Paris et Alger cet été, de Villepin s’est montré critique envers la position de son pays.
«Nous aurions dû faire tout cela dans le cadre des Nations unies et en liaison avec l’Algérie», estime l’ancien Premier ministre.
Lucide, en bon diplomate connu pour des positions nobles et modérées, Dominique de Villepin représente la voix de la sagesse qui doit inspirer ceux qui gouvernent en France, si toutefois ils tiennent à des relations apaisées avec l’Algérie.