Par M. Mansour
L’Algérie avance avec détermination pour s’imposer comme un important exportateur d’électricité, s’appuyant sur un excédent structurel massif et un réseau en pleine modernisation. Cette ambition prolonge logiquement son rôle de pilier énergétique de l’Europe, autrefois incarné par le gaz, aujourd’hui porté par une offre électrique fiable et constante, tournée vers le Nord. La récente panne géante qui a plongé la péninsule Ibérique dans le noir agit comme un révélateur brutal : la sécurité énergétique européenne ne peut plus ignorer la carte algérienne. Ce blackout pourrait bien précipiter les projets déjà à l’étude – notamment les interconnexions électriques avec l’Espagne et l’Italie – et transformer l’urgence en opportunité.
De l’excédent énergétique à l’exportation
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : les exportations d’électricité et d’équipements ont enregistré une hausse impressionnante de 22% en 2024, franchissant la barre des 268 millions d’euros. Ce bond en avant témoigne de l’efficacité des stratégies mises en place pour répondre à une demande croissante. En parallèle, la production domestique a atteint un niveau record, avec 25 gigawatts générés, dont 10 gigawatts d’excédent, disponibles presque toute l’année.
Forte de cet excédent, l’Algérie commence à s’ouvrir à de nouveaux marchés. L’exportation d’électricité vers la Tunisie, déjà bien ancrée, n’est plus qu’une étape. La Libye et d’autres pays voisins commencent à s’inscrire sur cette nouvelle carte énergétique, tandis qu’au-delà de la Méditerranée, les regards se tournent vers l’Europe.
L’Europe, un nouveau terrain de jeu
L’Algérie n’a pas tardé à voir plus loin. L’Italie, notamment, apparaît comme une cible stratégique dans cette quête d’expansion. Le projet d’interconnexion avec l’Italie, dont les travaux avancent à grands pas, marque une nouvelle étape dans l’ambition de relier les réseaux électriques algériens à ceux de l’Union européenne. Ce câble sous-marin ne représente pas seulement une avancée technologique, mais aussi un pas décisif vers l’intégration de l’Algérie dans le tissu énergétique européen.
En effet, si l’Algérie a longtemps été perçue comme un fournisseur de gaz, elle entend désormais diversifier ses offres. L’électricité, produite en grande partie à partir de sources renouvelables, s’impose comme une alternative attrayante pour l’Europe, d’autant plus que les enjeux climatiques et la décarbonation deviennent des priorités. Une électricité algérienne, à plus de 90% sans émissions de CO₂, offre une réponse aux préoccupations environnementales du Vieux Continent.
Le blackout : un point de bascule ?
Le blackout géant qui a frappé la péninsule Ibérique avant-hier pourrait bien être l’élément déclencheur qui précipitera la mise en œuvre des projets d’interconnexion. Celui-ci a mis en lumière la vulnérabilité des réseaux électriques européens et a souligné la nécessité de renforcer les liens énergétiques avec des partenaires fiables, comme l’Algérie. Ce déraillement temporaire du système a agi comme un révélateur brutal, qui ne manquera pas d’inciter les décideurs européens à revoir leurs priorités et à accélérer les projets d’interconnexion, dont ceux avec l’Algérie.
Une vision verte
Mais l’ambition de l’Algérie ne se limite pas à l’exportation d’électricité. Le pays nourrit une vision à long terme, tournée vers les énergies renouvelables. D’ici 2035, l’Algérie entend produire 15 gigawatts d’énergie solaire et 5 gigawatts d’éolien, consolidant ainsi sa place de leader potentiel dans la transition énergétique méditerranéenne. En parallèle, un projet ambitieux d’exportation d’hydrogène vert, en collaboration avec des acteurs européens, est en bonne voie, avec des mémorandums d’entente déjà prévus avec des entreprises allemandes, italiennes et autrichiennes.
Notre pays s’envisage ainsi non seulement comme un fournisseur d’électricité, mais comme un acteur dans le secteur de l’énergie verte, capable de diversifier ses exportations et d’offrir des solutions adaptées à la demande européenne en pleine évolution. L’Algérie se présente en « batterie de l’Europe », une expression qui résume bien son potentiel dans ce secteur en pleine expansion.