Exclusif -Capitaine Chakib Ziani-Cherif, co-fondateur de Fly Westaf : «Nous préparons un champion africain dans le low cost» 

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Chakib ziani cherif confondateur de Fly Wesaf

Si le lancement des activités de la compagnie algérienne privée Fly Westaf connaît un retard, c’est que, entre autres, le Covid-19 est passé par là et que de nouvelles dispositions européennes ont été imposées à l’aviation en raison du changement climatique, sans compter les quelques détails techniques à régler avant le «décollage» de la compagnie.

Le capitaine Chakib Ziani Chérif, son fondateur, qui pilote le projet, répond, dans cet entretien, à toutes les questions qu’a suscitées Fly Westaf depuis l’annonce de sa création à Alger en janvier dernier. Aussi rassure-t-il quant à la santé financière de la compagnie. Selon lui, pour «la mise au point d’un champion africain» du low cost, Fly Westaf est dans les temps. Entretien.

Quelles sont les raisons du report du lancement des activités de Fly Westaf ?

Un lancement de compagnie aérienne est un processus complexe et fastidieux de manière générale. Le report de démarrage est commun et non exceptionnel dans le secteur de l’aviation. Malheureusement en Algérie, nous ne sommes pas habitués au lancement de compagnies aériennes. Pour donner un exemple récent, Canada Jetlines a été certifié par Transport Canada durant le 2e trimestre 2022 alors que sa création date de 2013. Cela ne veut pas dire que nous mettrons 9 ans pour le démarrage mais cela est un exemple des multiples reports de cette compagnie low cost. Nous créons une compagnie aérienne non pour 5 ans mais pour plusieurs décennies. Fly Westaf sera un champion low cost algérien et pour cela, la vision, la préparation, les choix ainsi que le risque doivent être traités avec une extrême vigilance et le sens du détail est le plus important.

Vous en êtes où plus concrètement ?

Nous sommes actuellement dans le détail du détail. Nous terminons encore d’autres analyses avec Boeing concernant la motorisation de nos avions. Il faut savoir que tous les Boeing 737 ne sont pas motorisés de la même façon et les experts du secteur connaissent cela.

C’est pour cette raison que la dernière séance de travail avec Boeing à Alger était exclusivement  autour du choix moteur / aéroport algérien desservi dans le sud. L’aviation commerciale est un secteur très réglementé alors nous ne pouvons passer outre certaines étapes.

Nous avons besoin de terminer et de valider notre collaboration avec Air Algérie Technique avec qui nous avons eu des rendez-vous au sujet de la maintenance de nos avions afin de faire le tour sur notre programme de maintenance et d’exploitation chez Fly Westaf.

Je tiens aussi à remercier Air Algérie Techniques pour son soutien. Nous avons un très bon contact avec l’aviation civile algérienne qui a fait un travail remarquable depuis notre premier rendez-vous et je ne doute pas que dès le dépôt de la documentation de la compagnie Fly Westaf et des aspects techniques livrés, cette dernière fera tout son possible pour traiter notre certification dans les meilleurs délais.

Qu’est-ce qui explique l’intérêt porté par des partenaires et des particuliers à votre compagnie ?

Je remercie toutes les personnes qui nous contactent actuellement, futurs clients, partenaires, prestataires, tours opérateurs et compagnies aériennes qui nous sollicitent dès à présent même avant de commencer, chacun à son niveau pour une collaboration avec Fly Westaf.

Nous sommes fiers d’avoir eu des propositions dès maintenant pour du Codeshare (partage de code) avec certaines compagnies aériennes Majors. Bien sûr, je tiens à remercier également les Algériens de l’intérieur et de la diaspora, des soutiens et des mails massifs que l’on reçoit quotidiennement pour leur demander de la patience, nous serons présent au RDV le plus tôt possible.

Est-il vrai que la compagnie fait face à des problèmes financiers ?

Le terme n’est pas le mieux adapté. Comme je vous l’ai dit, nous préparons un champion africain dans le low cost  et pour cela les ingénieries financière et technique doivent fonctionner ensemble. Le choix de nos investisseurs est important car ils doivent partager avec nous la même vision.

Je ne vous cache pas que nous avons refusé des investisseurs pour le manque de vision et pour une rentabilité à court terme. Nous avons un break even, c’est-à-dire un seuil de rentabilité à 32 mois avec juste 55% de load facteur (taux de remplissage) sur nos avions. Cela démontre notre prudence. Concernant la partie financière notre EBIT est à 8 et notre NPV COST OF CAPITAL à 6%.

Est-il vrai qu’elle n’a pas trouvé de partenaires en Algérie comme le soutien le député Yagoubi ?

La question n’est pas là. Mais surtout dans le partage de la même vision avec nos futurs investisseurs algériens ou étrangers. Il ne faut pas croire que le marché algérien est simple, contrairement à ce que l’on dit. Nous sommes dans un changement d’attitude des consommateurs.

Nous nous trouvons juste en post Covid avec une inflation importante et des crises internationales qui nous impactent indirectement. Les aéroports européens sont de plus en plus difficiles et en pleine mutation due à la politique de lutte contre le changement climatique. Beaucoup de compagnies aériennes souffrent encore et continueront à souffrir jusqu’au 2e trimestre 2023.

Cela met Fly Westaf dans une position confortable pour notre démarrage qui ne doit pas se faire dans le creux de la vague mais dans la relance après 4 ans de dépression. Nous assumons complètement ce retard par notre attitude opportuniste dans le marché. Les marges sont donc de plus en plus minces dû au coût opérationnel, alors ce n’est pas aussi simple. Chez Fly Westaf, nous devons garantir à nos investisseurs un balisage à court, moyen et long termes. Chez Fly Westaf nous ne pouvons nous permettre d’être en dehors de notre projection financière.

Qu’en est-il de l’acquisition des appareils? Et pourquoi l’option pour des appareils de Boeing ?

Je profite de l’occasion pour remercier Andrew Mudachi de chez Boeing qui nous suit depuis le début. Boeing croit dur comme fer à Fly Westaf pour soutenir le démarrage du marché émergent dans le segment du bas coût de l’Algérie, que cela soit sur le vol régulier entre l’Algérie et le sud de l’Europe ou à notre expertise depuis 2016 sur le marché ouest-africain qui sera pour Fly Westaf et l’Algérie un énorme levier de croissance pour nous et de retombées financières (les taxes) pour le gouvernement algérien.

Notre équipe Fly Westaf à parmi elle des experts du trafic aérien ouest-africain comme M. Amadou Ouorou, ancien haut cadre de Air Afrique et consultant qui veille à capter ce potentiel et le faire transiter par l’Algérie. Il a à son actif plusieurs démarrages de compagnies aériennes. Identifier le marché ne suffit pas. Il faut répondre techniquement et cela vient naturellement par le choix du constructeur et bien sûr concernant le choix Fly Westaf, il a été validé depuis quelques mois en optant pour Boeing et son appareil mythique le Boeing 737 MAX.

L’appareil de Boeing est-il le plus adapté au créneau low cost ?

Le business modèle low cost passe par ce que l’on appelle le fleet dévelopment (développement de flotte) et d’un commun un avec Boeing (le bureau opérationnel), nous avons décidé que les 2 premiers avions seront le 737 NG avec 189 places. Les MAX seront intégrés juste après afin de laisser Air Algérie Technique qui sera notre MRO de faire la mise à jour du niveau sur le suivi de la dernière génération des Boeing 737 et profiter de leur savoir-faire sur la maintenance des 737 NG qu’ils maitrisent parfaitement. Le team management est presque au complet avec une équipe dotée d’une expérience internationale et est notre premier actif : la RH. Nous recevons en moyenne plus de 150 mails de demandes d’emploi et nous remercions tous ces candidats de leur intérêt qu’ils portent à Fly Westaf mais néanmoins les postes ne sont pas encore ouverts.

Dj. B.