PAR BRAHIM AZIEZ
Suite aux instructions données par le président de la République lors du dernier conseil des ministres, les actions pour se préparer aux feux de forêt se multiplient.
Le ministre de l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’Aménagement du territoire qui
coprésidait hier la cérémonie d’installation de la commission nationale de protection des
forêts (CNPF) 2023, en compagnie du ministre de l’Agriculture et du Développement rural, a annoncé une série de mesures proactives et préventives pour faire face aux feux de forêt
selon des « normes internationales bien définies ».
Brahim Merad fera savoir que dès janvier dernier, « les walis ont été appelés à se mobiliser et à préparer en avance la campagne nationale de prévention et de lutte contre les feux de
forêt à travers l’élaboration, l’approbation et l’activation du plan de wilaya de prévention et
de lutte contre les incendies de forêt, outre la création de retenues d’eau à exploiter dans
l’extinction des feux, la mise en place de comités locaux chargés de la prévention et de la
lutte contre les feux de forêt et l’organisation de campagnes de sensibilisation précoces ».
Le ministre de l’Intérieur reviendra sur l’installation de cette commission qui « est
intervenue plus tôt cette année pour assurer une meilleure préparation de la prévention et
de la lutte contre les incendies cet été ».
Il annoncera ainsi le lancement « des travaux de réalisation de pistes d’atterrissage au
niveau de 10 wilayas, et dont les taux d’avancement oscillent entre 10% et 60% et devront
être réceptionnées début juin prochain ».
Merad évoquera « la réquisition de tous les moyens matériels et humains disponibles, y
compris les moyens aériens à travers l’élaboration de plans de coordination entre les unités réparties à travers les wilayas limitrophes ».
«Affrètement de 6 bombardiers d’eau»
Selon lui, les pouvoirs publics « ont engagé les procédures pour l’affrètement de 6 bombardiers d’eau, dotés d’un staff technique de navigation ».
Sur l’opération d’acquisition des bombardiers d’eau, le ministre de l’Intérieur a rappelé
que « le ministère de la Défense nationale a entamé l’acquisition de 4 avions de fabrication
russe de type Beriev à 12.000 l, dont la réception est prévue au cours de cette année ».
Le ministre a également fait état d’une initiative de la délégation nationale aux risques
majeurs qui a lancé le développement de drones, fabriqués localement, annonçant dans
le même sillage le « recrutement de saisonniers pour renforcer la vigilance et la première
intervention, en coordination avec les services des forêts », en sus de « l’exécution d’exercices de simulation d’incendies sur le terrain, en vue de s’enquérir de leur opérationnalité et de leur efficacité à faire face aux incendies ».
Merad a par ailleurs indiqué que « plusieurs sentiers et tranchées pare-feu forestiers ont
été réalisés dans plusieurs wilayas pour faciliter les opérations d’intervention ».
«Les drones, un moyen supplémentaire pour les zones montagneuses»
L’apport de moyens technologiques, à l’image des drones, pour la prévention, la surveillance et la lutte contre les feux de forêt reste indéniable aux yeux des responsables
des forêts, et l’instruction du président de la République de se doter de ces outils qui seront
fabriqués localement est plus qu’opportune.
C’est du moins ce que pense l’inspecteur général à la direction générale des forêts,
Abdelghani Boumessaoud, qui intervenait hier sur les ondes de la Chaîne 3. Il dira :
« L’acquisition de drones viendra compléter la surveillance des massifs forestiers, en ce sens
que les postes de vigie actuels ne suffisent pas à couvrir l’ensemble des zones forestières.
Celles-ci sont estimées à 4,1 millions d’hectares, dont 80% se situent en zones montagneuses ou accidentées, toujours difficiles d’accès. »
Les drones seront, à son avis, « un outil supplémentaire qui permettra de donner
l’alerte à temps, et verra les dispositifs mis en place intervenir le plus rapidement ».
Boumessaoud qui était hier l’invité de la rédaction avouera l’impossibilité de couvrir l’ensemble du territoire national, soulignant qu' »il ne sert à rien de déployer des moyens si on n’a pas retenu les leçons des expériences précédentes ».
«Connaître les raisons du déclenchement des feux»
« Comment exploiter ces moyens, où les mettre et comment les déclencher ? Telles sont
les questions auxquelles il importe de répondre pour être efficace », affirmera-t-il.
Mieux encore, Boumessaoud ajoutera qu’il ne sert à rien de multiplier les moyens de lutte
contre les feux de forêt si on n’en connaît pas les raisons. Et de rappeler que de nombreux
incendies de forêt sont d’origine humaine, que ce soit par rapport aux activités agricoles, pastorales ou d’actes volontaires qui sont prémédités et classés comme des actions criminelles.
Il reviendra sur les actes involontaires, citant en exemple les éleveurs qui brûlent les
parcours pour faire régénérer les pâturages, ou encore les agriculteurs qui allument des
feux pour assainir les sols et enlever les mauvaises herbes. « Des campagnes seront lancées
avec les moissons-battages qui sont à risque pour les départs de feu », annoncera-t-il.
L’utilité des bombardiers de taille moyenne
Revenant sur les moyens de lutte contre les feux de forêt, les responsables de la DGF
citeront le bombardier à eau BE 200 de 12.000 l, acquis récemment par l’Algérie, en rappelant le plus apporté l’an dernier par un avion similaire affrété par l’Algérie, auxquels s’ajoutent les hélicoptères de l’armée et de la protection civile.
Mais l’instruction récente du président de la République pour l’acquisition de 6 autres
bombardiers d’eau de moyenne taille sera d’un apport considérable aux yeux du conservateur général au département de la prévention et de la lutte contre les feux au niveau de la DGF, du fait du nombre de rotations que pourront faire ces avions qui peuvent transporter jusqu’à 6000 l d’eau.
Rachid Benadallah qui intervenait, de son côté, sur la Chaîne 1, soulignera que ces derniers, qui sont plus légers, sont aussi plus pratiques pour atteindre les zones montagneuses difficiles d’accès.
Il rappellera par ailleurs les moyens actuellement disponibles et qui consistent en 387 postes de surveillance, 544 brigades mobiles de première intervention, 42 camions ravitailleurs, 3523 points d’eau opérationnels, 748 chantiers qui travaillent à l’intérieur des forêts avec un effectif de 8224 ouvriers qui peuvent être mobilisés en cas de besoin.
En plus de cela, il y a 48 colonnes mobiles d’appui aux brigades de première intervention. Mais Boumessaoud, qui insistera sur l’apport des six avions pour lesquels un appel d’offres sera lancé, soulignera que ces derniers serviront à « limiter les dégâts, et non pas pour répondre aux déclenchements des feux de forêt ».
De moyens humains et matériels qui restent insuffisants, aux dires des deux responsables de la DGF qui estiment que l’implication d’autres départements a toujours été bénéfique.
«Les feux de forêt ne sont pas l’affaire de la DGF et la protection civile»
Outre les bilans qui sont dressés et les programmes élaborés avant chaque saison estivale, Boumessaoud évoquera les opérations préparatoires qui sont prises en charge par l’administration des forêts, comme l’entretien des tranchées et des points d’eau qui doivent
être remplis. Il citera « 13 opérations déjà lancées pour se préparer aux feux de forêt, en plus d’un programme complémentaire, que ce soit pour les tranchées pare-feu ou l’ouverture de pistes ».
Mais il signalera que des actions similaires sont entreprises au niveau des communes, des daïras et des wilayas. Sur la lutte contre les feux de forêt, il indiquera toutefois que celle-ci n’est pas l’affaire de la direction générale des forêts et la protection civile.
A ce sujet, le conservateur général au département de la prévention et de la lutte contre les feux au niveau de la DGF a rappelé que les représentants de 13 départements ministériels font partie de la commission nationale de lutte contre les feux de forêt, citant l’exemple des transports pour la sécurité du rail, ou encore de l’énergie pour protéger les réseaux de transport de l’électricité.
B. A.