Par Zine Haddadi
Visiblement, les déclarations du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, sur l’extrême droite dans son interview au journal «l’Opinion» ont touché leur cible.
A voir les réactions de personnalités politiques et de chroniqueurs appartenant à ce courant, le président Tebboune a bien visé le mal qui ronge les relations entre l’Algérie et la France dont le président français Emmanuel Macron est appelé à s’affranchir.
Dans son interview, le président Tebboune avait nommément cité des personnalités politiques de droite et d’extrême droite comme Eric Ciotti et Jordan Bardella, reprenant leurs déclarations très virulentes à l’égard de l’Algérie tenues récemment.
Ces derniers n’ont pas manqué de réagir. Le «jeune» Bardella, pour reprendre les mots d’Abdelmadjid Tebboune, a ressassé, sur le plateau de la chaîne de Vincent Bolloré, CNews, les thèses traditionnelles du Front National devenu Rassemblement National sur l’Algérie.
Bien que faisant partie de la nouvelle génération, Jordan Bardella a visiblement bien été formé dans le mouvement des Le Pen à cultiver une nostalgie de l’Algérie française. «Nous avons donné à l’Algérie son indépendance. Il faut maintenant que le régime algérien nous donne la nôtre», a-t-il lâché.
Bardella, un pur produit du centre de formation des Le Pen
Le leader du RN a versé dans un révisionnisme de l’histoire perpétuant le discours paternaliste d’une bonne partie de la droite et de l’extrême droite française qui n’a visiblement toujours pas digéré que l’Algérie ait pris son indépendance au prix fort de millions de martyrs.
Ce dernier a regretté que l’actuel ministre de la Justice, Gérald Darmanin, est allé saluer le monument aux martyrs à Alger quand il était ministre de l’Intérieur usant d’une terminologie d’un autre temps pour qualifier les valeureux combattants du Front de Libération Nationale.
«Lorsque Monsieur Darmanin, ministre de l’Intérieur à l’époque, va fleurir la tombe du FLN et de gens qui ont organisé des attentats terroristes contre les intérêts français, contre des ressortissants français, contre des policiers français… je ne vois pas comment est-ce que l’Algérie peut nous respecter», a-t-il déclaré.
Ne perdant pas de vue les échéances électorales à venir en France, Bardella se croyant dans un meeting a promis une politique de zéro visa avec l’Algérie.
«Si nous sommes à la tête de l’Etat, il n’y aura plus aucun visa pour l’Algérie si elle refuse de récupérer ses ressortissants. Nous supprimerons également le ‘‘visa pour soins’’ qui permet aux ressortissants algériens d’être soignés en France aux frais du contribuable !», promet Bardella reprenant indirectement la fable sur la dette algérienne dans les hôpitaux français pourtant démentie par le ministre de la Santé du gouvernement Bayrou cette semaine.
L’autre homme politique cité par le président Tebboune, Eric Ciotti, a réagi, pour sa part, sur le réseau social X, préférant instrumentaliser le cas de Boualem Sansal. C’est fou ce que la haine contre l’Algérie a pu faire évoluer les mentalités à droite et à l’extrême droite de la scène politique française. Ces deux courants habituellement hostiles à la naturalisation des étrangers se découvrent soudainement une sympathie pour un étranger devenu français il y a tout juste quelques mois juste parce que ce dernier s’est ouvertement attaqué à l’Algérie.
Tebboune avait raison sur les médias de Bolloré
Sur le plateau de CNews, la chaîne d’information en continu de Vincent Bolloré, les chroniqueurs, majoritairement de droite et d’extrême droite, ont tout naturellement craché leur venin contre l’Algérie depuis la parution de l’interview accordée par le président Tebboune au journal «l’Opinion». Charlotte d’Ornellas s’est dite frappée par le fait que «beaucoup de nos autorités ont le même discours que le président Tebboune».
De son côté, l’animateur radio, Philippe David, a déploré que «depuis 63 ans, la France est dans la repentance permanente». Un autre classique de la panoplie de discours servie à qui veut l’entendre par l’extrême droite et la droite française sur l’Algérie.
Sur RMC, la chroniqueuse Barbara Lefebvre y est allée de son commentaire avec un discours assez enflammé sur la relation algéro-française.
«On doit rompre toute relation diplomatique avec l’Algérie. Les visas c’est fini, les dignitaires algériens, terminé. On peut trouver d’autres partenaires que l’Algérie», a-t-elle déclaré. Rien que ça…
C’est ce genre de déclarations hostiles et haineuses contre l’Algérie qui plombent les relations entre Alger et Paris, comme l’a rappelé à juste titre le président Tebboune dans son interview au journal «l’Opinion» en prenant le soin de distinguer les auteurs de ces attaques de la majorité du peuple français.
«Personnellement, je distingue la majorité des Français de la minorité de ses forces rétrogrades et je n’insulterai jamais votre pays», avait tenu à préciser le président de la République.
Préférant ne pas insulter l’avenir, le président Tebboune n’a pas fermé la porte au dialogue avec la France «Encore faut-il que le président français, les intellectuels, les partisans de la relation puissent faire entendre leur voix».
La balle est dans le jardin de l’Elysée, chez le président français qui doit prendre ses distances avec la droite et l’extrême droite nostalgiques d’une France d’un autre temps pas très glorieux.