Gara Djebilet, le wali de Béchar accuse : «Nous recevons des coups de partout pour que ce projet ne voit jamais la lumière»

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Valorisation de la mine de fer de Gara Djebilet : Préparation du terrain à l'industrie de transformation

PAR R. AKLI

Longtemps considéré comme difficile, voire presque impossible à mettre en valeur, en raison notamment de la nature géologique du terrain où il est situé, le mégaprojet minier de Gara Djebilet dans la wilaya de Tindouf est finalement bel et bien entré en exploitation au mois d’août 2022, avec une première opération d’extraction d’une première quantité de
minerai de fer de 1000 t, annoncée officiellement par l’Entreprise nationale de fer et
de l’acier (Feraal) à laquelle échoit la gestion directe de ce projet.

Hautement stratégique et structurant, non seulement pour le secteur de l’énergie et
des mines, mais aussi et surtout pour le développement de l’économie nationale dans son
ensemble, ce mégaprojet minier ferait, de par sa dimension économique et géopolitique, l’objet de fortes pressions et de réelles velléités de blocage, selon les révélations, pour le
moins surprenantes, dont a fait état hier le wali de Béchar, Saïd Ben Kamou.

«Des preuves formelles»

« Depuis que nous avons lancé la mise en exploitation de la mine de Gara Djebilet, nous
n’avons cessé de recevoir des coups de partout pour que ce projet ne voie jamais la lumière », a-t-il ainsi déclaré, en affirmant avoir « des preuves formelles » sur l’existence de « parties et de plans » visant « à saper toute la politique et les grands projets qui peuvent hisser le pays au rang des pays développés ».

A la fois virulent, très formel et comme excédé, le wali de Béchar ne souffle pourtant nulle indication quant à l’origine de ces pressions et tentatives de blocage dont fait l’objet selon lui cet important projet, censé faire de l’Algérie un leader incontesté de l’industrie sidérurgique et métallurgique en Afrique et même au-delà.

Dès lors, en attendant d’éventuelles précisions officielles du wali ou des instances
en charge du secteur des mines, les premiers soupçons se tournent directement vers le voisin marocain, qui serait ainsi tenté de saborder le projet de Gara Djebilet sur lequel il prétend avoir certains droits en vertu d’une vieille convention signée en mai 1973 et prévoyant la mise en valeur en commun de ce précieux gisement de minerai de
fer, localisé non loin des frontières entre les deux pays.

Pourtant, le gisement minier de fer de Gara Djebilet est bel et bien situé sur le territoire algérien et ladite convention précise explicitement qu’il est « la propriété de l’Algérie » et relève officiellement « de sa pleine et entière souveraineté ».

Aussi, en dépit des tensions géopolitiques récurrentes et connues entre l’Algérie et le
Maroc, certains observateurs expliquent que les blocages dont pourrait faire l’objet le projet de Gara Djebilet ne viendrait pas de possibles prétentions du royaume voisin sur ce gisement de fer « en or », mais plutôt d’autres origines, internes ou externes, au
vu des enjeux colossaux qu’il suscite en termes d’accès aux matières premières dans la
région et de recettes en devises qui peuvent en être tirées.

Gara Djebilet, faut-il en effet rappeler, est considéré comme l’une des plus grandes mines de fer dans le monde, avec des réserves estimées à plus de 3 milliards de
tonnes, dont 1,7 milliard de tonnes exploitables.

Outre la Chine, déjà partie prenante à ce mégaprojet, de nombreux pays et groupes étrangers sont actuellement en négociation avec Feraal pour y établir des partenariats et joint-ventures en vue de l’exploitation ou de l’exportation de minerai de fer à
partir de Gara Djebilet.

Pour sa première phase d’exploitation, soit de 2022 à 2025, ce gisement,
faut-il le préciser, offre une capacité de production allant de 2 à 3 millions de tonnes de minerai de fer. Un niveau de production déjà conséquent pour une phase de démarrage et qui devra atteindre entre 40 à 50 millions de tonnes par an dès 2026.

C’est dire tout l’enjeu que revêt ce mégaprojet minier, notamment pour le développement de plusieurs filières industrielles, d’où sans doute les convoitises et les velléités de blocages qu’il peut susciter.

R. A.