Gaz : un plan pour passer à 200 milliards m³/an

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PAR NABIL M.

L’Algérie accélère le tempo énergétique pour assurer une transition sécurisée et progressive tout en maximisant ses ressources gazières.

Depuis Ravenne, en Italie, où s’est ouverte la Conférence méditerranéenne de l’Energie OMC Med Energy 2025, le ministre d’Etat, ministre de l’Energie, des Mines et des Energies renouvelables, Mohamed Arkab, a annoncé «un plan d’investissement majeur pour porter la production nationale de gaz naturel à plus de 200 milliards de m3 par an». Une décision stratégique qui vise à renforcer la place de l’Algérie sur l’échiquier énergétique mondial, tout en consolidant ses engagements en matière de transition énergétique.

Accompagné des PDG de Sonatrach et Sonelgaz, respectivement MM. Rachid Hachichi et Mourad Adjal, et de l’ambassadeur d’Algérie en Italie, M. Arkab a profité de ce forum de haut niveau pour présenter les grandes lignes de la stratégie énergétique du pays, avec un objectif affiché d’accroître la production, sécuriser l’approvisionnement et réduire l’empreinte carbone.

 

Cap sur 200 milliards de m³ de gaz

Cette ambition repose sur un programme d’investissements soutenus, articulé notamment autour de l’appel d’offres international «Algeria Bid Round 2024», lancé par l’Agence nationale de valorisation des ressources en hydrocarbures (Alnaft). Il concerne six sites prometteurs, notamment d’Oued Mya, Berkine, Illizi, Ahnet, Reggane et Gourara, riches en ressources conventionnelles et non conventionnelles. A terme, ces projets pourraient injecter 20 milliards de m³ supplémentaires chaque année, en exploitant un potentiel estimé à 400 milliards de m³. Cet appel est le premier d’une série qui suivra durant les cinq prochaines années.

Pour attirer les capitaux et les technologies, l’Algérie a aussi misé sur une nouvelle loi sur les hydrocarbures, plus souple, plus incitative, qui propose trois options de partenariat dans l’amont gazier. Il s’agit du partage de production, participation ou prise de risque. Cette flexibilité ouvre la voie à des négociations directes entre Sonatrach et des opérateurs étrangers pour le développement de projets structurants.

Le gouvernement entend ainsi répondre à une demande mondiale en forte croissance, tout en consolidant sa position de fournisseur fiable, notamment à destination de l’Europe. Une part importante de la future production «sera destinée à l’exportation afin de maintenir la position stratégique de l’Algérie sur le marché mondial de l’énergie», a affirmé le ministre d’Etat, lors de son intervention au forum d’Italie.

Au-delà des chiffres, le ministre a insisté sur la vision à long terme portée par l’Algérie. En réponse aux questions des participants, M. Arkab a affirmé que «l’Algérie ne considère pas le gaz naturel uniquement comme une ressource économique, mais comme un levier clé de la transition énergétique», soulignant la complémentarité entre le gaz et les énergies renouvelables pour garantir la sécurité et la résilience du système énergétique méditerranéen.

La diversification énergétique s’accélère

Dans son allocution, M. Arkab a également tenu à assurer que l’Algérie ne mise pas tout sur le gaz, réaffirmant l’objectif d’intégrer 30% d’énergies renouvelables dans le mix national d’ici 2035, avec un programme de 15 000 MW de solaire photovoltaïque, dont
3200 MW déjà lancés en 2024.

Le pays accélère également sur l’hydrogène vert, à travers le projet SoutH2 Corridor, destiné à alimenter l’Europe via l’Italie et l’Allemagne. Autre initiative d’envergure : le projet Medlink, qui prévoit l’installation d’un câble électrique sous-marin à haute tension entre l’Algérie et l’Italie, soumis à la Commission européenne comme projet d’intérêt commun.

S’ajoutent à cela les interconnexions électriques en cours avec plusieurs pays africains, en l’occurrence la Libye, l’Egypte, la Mauritanie et le Sahel, renforçant ainsi le rôle de l’Algérie comme hub énergétique régional entre l’Afrique et l’Europe.

Par ailleurs, et lors de la session plénière sur les scénarios énergétiques, le ministre de l’Energie a défendu une approche fondée sur la sécurité à long terme, la valorisation des ressources et la préparation de l’après-pétrole. Il a mis l’accent sur la recherche, la technologie, la digitalisation et l’intelligence artificielle comme leviers d’efficacité et de durabilité.

Enfin, il a exprimé le soutien de l’Algérie au Plan Mattei porté par l’Italie, appelant à bâtir un système énergétique méditerranéen juste, inclusif et résilient, où l’humain, le climat et le développement seraient les priorités.

Avec ce tournant stratégique, l’Algérie entend jouer un rôle central dans l’avenir énergétique régional et mondial, en alliant réalisme économique et transition responsable.