Par Latifa Abada
La marche de l’Algérie vers l’indépendance a été intimement documentée par le célèbre photographe Mohamed Kouaci. Grand témoin de son temps, il a capté l’histoire de l’Algérie sous la colonisation et post-indépendance. Une centaine de clichés sont actuellement exposés au palais des Raïs, qui retracent le parcours militant de l’artiste et démontrent la dimension artistique de son œuvre.
Portraits de dirigeants, photographies dans le maquis, entretiens de présidents, célébration du 5 juillet 1962, Mohamed Kouaci était un témoin infatigable de l’histoire de l’Algérie. L’exposition propose aux visiteurs une profusion de photographies et dont les indications permettent de revisiter des événements clés de l’Algérie.
Accrochées à des cimaises, les photographies nous donnent à voir des photos de groupe, notamment les membres du 2e GPRA : Saad Dahleb, Said Mohamdi, Krim Belkacem, Lakhdar Bentobal, Boussouf, M’hamed Yazid et Benyoucef Ben Khadda, président du parti.
Des portraits de dirigeants, saisis dans le vif, témoignent du talent de l’artiste. Centré sur des individualités ou des groupes, les personnes photographiées occupent ainsi quasiment tout l’espace de la photo. Parmi celles-ci, on retrouve des portraits de Ferhat Abbes, Gamel Abd El Nasser, Patrice Lumumba, ou encore Frantz Fanon.
La visite du Che à Alger en 1963, à l’occasion du premier anniversaire de l’indépendance, est largement documentée. On découvre une photographie de lui avec Mohamed Ben Bella et Houari Boumediene lors du match Algérie-Egypte.
Ces archives précieusement conservées par Safia Kouaci, l’épouse du défunt, racontent l’Algérie mais aussi le courage de cet artiste. En parcourant l’exposition, on découvre des photographies de la délégation de l’Union générale des étudiants musulmans algériens à la représentation de l’Algérie au Festival mondial de la jeunesse à Moscou. A cette époque, Mohamed Kouaci était recherché par les services secrets français. Bravant le danger qui planait sur lui, il a quand même accompagné la délégation afin de faire connaître les objectifs de la Révolution algérienne.
Il a immortalisé les camps de réfugiés, les bases de l’Armée de libération nationale et a même assisté aux réunions des dirigeants de la Révolution, et surtout l’indépendance. Un grand portrait d’un père retrouvant son enfant le 5 juillet 1962 démontre l’aptitude du photographe à figurer le réel et à canaliser l’émotion.
Qui était Mohamed Kouaci ?
Un seul portrait de l’artiste est accroché à l’entrée de l’exposition. Un extrait d’un texte de Pierre Cholet décrit de quoi les photographies de Mohamed Kouaci sont-elles le nom. «Avec Mohammed Kouaci, nous feuilletons un album de famille comme ceux que l’on retrouve dans les vieilles maisons…Mais les images sont fraîches, vivantes, c’est une belle tranche d’histoire, notre histoire».
Né à Blida en 1922, Mohamed Kouaci a grandi à Alger, à la basse Casbah, école Bologhine. Dès son plus jeune âge, il est féru de photographie et part à Paris en 1948 afin de se perfectionner. En 1955, il adhère à l’Union générale des étudiants musulmans algériens (UGEMA), puis à la Fédération du FLN en France et devient photographe exclusif de tous les grands dirigeants de la Révolution. Il décédera le 21 août 1996. L’œuvre de Mohamed Kouaci est un témoignage factuel de l’histoire du pays.