Il interpelle son gouvernement sur la gestion du dossier algérien : La mise en garde du patronat français

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Zine Haddadi

 

Pendant que les membres du gouvernement Bayrou exhibent leurs muscles dans un rapport de force permanent avec l’Algérie dans lequel ils courtisent l’extrême droite, des voix s’élèvent en France pour mettre en garde contre l’impact de l’escalade de tensions sur les échanges économiques entre les deux pays.

Si pour le moment, le volet commercial a été épargné, des hommes d’affaires français expriment leur crainte de voir la crise s’étendre au plan économique si elle venait à persister. L’Algérie est un marché qui attire les convoitises des plus grandes puissances de ce monde. La France n’a pas de garantie, surtout si ses politiques s’amusent à faire de l’Algérie le bouc émissaire de tous ses maux.

Alors que les politiques français y compris au gouvernement Bayrou mènent les relations algéro-françaises chaque jour un peu plus vers la rupture, ils ne semblent pas se soucier de l’impact qu’elle pourrait avoir sur les échanges économiques.

L’Espagne a commencé à reprendre ses parts de marché après avoir résolu sa brouille diplomatique avec l’Algérie. L’Italie a renforcé considérablement sa présence sur le marché algérien. La Chine, la Turquie, le Qatar font de même. Pendant ce temps, les officiels français martèlent à qui veut les entendre que l’Algérie veut nuire à la France.

 

Michel Bisac tire la sonnette d’alarme

Le président de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) France-Algérie, Michel Bisac, a mis en garde contre les conséquences sur les échanges commerciaux entre les deux pays.

Tout en rappelant que jusqu’à présent aucune mesure n’a été prise côté algérien, Michel Bisac prévient, dans un entretien accordé au journal «La Dépêche», que cette escalade «permanente» va à terme forcément poser de gros problèmes.

«Nos politiques imaginent aujourd’hui qu’on pourrait facilement se passer de l’Algérie. Mais je pense sincèrement que c’est une erreur. Le problème actuel n’est pas aussi simple», a-t-il averti. Si dans les médias français et même chez certains politiques français on veut faire croire qu’il y a une haine algérienne envers la France, ce n’est pas le cas au quotidien, affirme Michel Bisac. «En Algérie, je tiens à le dire, dans la vie du quotidien, on ne ressent aucune agressivité à l’égard des Français», a-t-il témoigné. Le président de la Chambre de commerce et d’industrie Algérie – France est revenu avec des chiffres sur les pertes que pourrait essuyer l’économie française en perdant un marché comme l’Algérie. «L’Algérie se fournit beaucoup en France : près de 4,8 milliards d’euros d’importations en 2024, en hausse de 6,6% par rapport à 2023. Si on venait à perdre ce marché, combien de temps va-t-il nous falloir pour retrouver des clients qui soient capables de compenser ? C’est une vraie question», s’est-il interrogé. Ce n’est pas Retailleau, Darmanin ou encore Bayrou qui pourraient répondre à une telle question, car tous semblent préoccupés par la présidentielle de 2027 plus que par autre chose. Michel Bisac a rappelé que 600 entreprises françaises ont des liens économiques forts avec l’Algérie dont pas moins de 400 ont une présence effective sur le sol algérien. Les patrons de ces entreprises expriment régulièrement leurs inquiétudes. «Si par exemple, vous avez une commande à l’export de 200 000 – 300 000 euros qui est bloquée en douane, il y a un impact immédiat pour ces entreprises. De nombreux patrons m’ont déjà fait part de leur inquiétude», a-t-il indiqué.

 

600 entreprises françaises opèrent en Algérie

Le directeur de la revue audiovisuelle Xerfi, Philippe Gattet, décrit des échanges commerciaux «sous tensions». Pour ce dernier, l’Algérie demeure un «poids lourd des échanges franco-africains» avec 16,6% des exportations françaises vers l’Afrique en 2024.

Bien que cela ne représente que 0,8% du commerce extérieur total français, l’Algérie est une source de dépendance énergétique non négligeable, selon Philippe Gattet.  En 2023, la France importait pour 4,28 milliards de mètres cubes de Gaz naturel liquéfié (GNL) algérien, soit 14% de ses importations totales. En 2024, ce chiffre a grimpé à 18%, a-t-il rappelé.

Les opérateurs français ont en tête le scénario espagnol. Entre 2022 et 2024, les échanges commerciaux entre l’Algérie et l’Espagne avaient connu une chute monumentale après une brouille diplomatique entre les deux pays.

Les centaines d’opérateurs économiques français présents en Algérie attendent avec impatience une éclaircie dans les relations entre Paris et Alger qui pourrait les rassurer sur l’avenir de leurs affaires dans notre pays.

Visiblement, les Retailleau, Darmanin et les autres tournés vers 2027 ne semblent pas conscients des enjeux pour ces entreprises.