La «natte», un artisanat en déclin

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Par Mohamed Medjahdi

Dans cette contrée connue jadis par  « sa mer d’alfa », la natte connue sous le nom d’el Hssira, était une des revenus principaux des femmes. Le produit tissé était vendu aux souks. La natte qui tapissait traditionnellement les sols et les murs a donné naissance à un artisanat varié d’objets tels que sets de table, couffins et tapis.

La région des Ouled N’har a été un des centres les plus réputés dans la fabrication de ce bijou, à savoir «la natte». C’était un véritable hobby des femmes n’hari. Typique du monde rural, l’alfa était communément utilisée pour fabriquer cette merveille.

Et pour cause, les nattes d’alfa avaient acquis autrefois une solide réputation, dans la région de Tlemcen, et tout le pays. La dextérité manuelle de ces femmes était extrêmement féconde et se vérifiait dans les multiples expositions vente dans les marchés hebdomadaires. L’art du tressage produit des merveilles dans les modèles de la natte «el Hssira». Cette activité se trouve actuellement en voie d’extinction, devant le manque de la matière première, les nouvelles technologies, etc.

Un autre objet de grande valeur s’efface de jour en jour. Il s’agit du tapis. Si l’on ne prend pas la situation au sérieux et crée des centres spéciaux afin de faire revivre l’artisanat local de la région, on peut dire adieu à ce legs, même s’il existe encore certaines femmes qui exercent le métier chez elles.

Chez les Ouled N’har, parler de l’artisanat, c’est parler du bon vieux temps, parler des mains magiques, parler de femmes artistes, créatives, innovantes. Devant la misère à l’époque, les femmes étaient contraintes de réaliser les merveilles pour écouler la marchandise aux souks de la région. Le tapis était commercialisé à Tlemcen ville, les hassirates dans les souks…

Les tapis sont confectionnés sur des métiers à tisser, sorte de cadre en bois. Les fils de trame sont disposés verticalement les uns à côté des autres suivant la dimension du tapis voulu. La fabrication se fait de bas en haut, et l’on fait glisser au fur et à mesure la partie réalisée derrière le métier. Les nœuds sont tassés à l’aide d’un peigne spécial puis on coupe les bouts de fils suivant la longueur du velours désirée. Une fois terminée, c’est une merveille qui s’étend au pied. Aujourd’hui  rares sont les femmes qui  confectionnent ce chef-d’œuvre. Une politique rigoureuse s’impose pour relancer et refaire revivre cet artisanat  autrefois fierté de la région et de la tribu.

 

La guerre est passée par là

La région frontale de Tlemcen habitée par la tribu des Ouled N’har, allant d’El Aricha, en passant par Magoura sidi Djilali Bouihi, jusqu’à El Abed, a vécu l’enfer pendant la guerre de libération nationale. Une période dure sous un feu continu. Le bilan humain est dramatique. Des centaines de chouhada. Les bombardements ont provoqué d’importants facteurs qui ont engendré un exode massif.

Cette partie de la frontière, fait partie des frontières algériennes de l’Ouest avec le Maroc qui ont été l’objet de verrouillage par l’armée coloniale qui avait procédé à l’installation de barrages miniers dénommés « ligne Challe » et « ligne Morice ». Les mines antipersonnel utilisées sont les mines à pression antipersonnel indétectables de type APID 51 (mines encrier) et mines antipersonnel métalliques bondissantes de type APMB – 51/55 détectables.

La densité des mines sur la ligne de la frontière Ouest varie de 0,8 à 3,5 mines par mètre linéaire. Les deux lignes de la frontière Ouest (Morice 1958) et (Challe 1959) s’étendent sur une longueur de 700 kms de Marsat Ben M’hidi à Béchar, en passant par les localités d’El-Aricha, Sidi Djillali, Ain Sefra, Djenien, Bourezg, et Beni Ounif.

Barbelée, électrifiée, minée et surveillée en permanence, ce tracé a été le théâtre de nombreuses batailles entre les moudjahidine et les soldats français.

La tribu des Ouled Nh’ar a perdu beaucoup de ses valeureux hommes qui se sont sacrifiés pour que vive l’Algérie.

Pratiquement chaque famille compte au moins un martyr. Parmi ces familles citées à titre d’exemple, les Boukarabila, les Bechlaghem, les Tarchaoui, les Largo, les Dich, etc.

Aujourd’hui ces terres ont été déminées et remise aux autorités locales pour l’implantation de projets agricoles ou l’arboriculture….

Grâce aux hommes courageux, cette ligne qui était faite de façon enchevêtrée, semblable à la toile d’araignée, n’est plus qu’un souvenir abordé le plus souvent par des moudjahidine de la région.