Face aux défis croissants du stress hydrique, l’Algérie a su mettre en place une stratégie d’approvisionnement en eau potable aussi rigoureuse que visionnaire.
PAR NABIL M.
Les derniers chiffres présentés par l’Algérienne des Eaux (ADE) témoignent d’une réussite incontestable, consolidée par des investissements massifs dans les infrastructures et une volonté politique affirmée de garantir la sécurité hydrique du pays.
Lors d’un point de presse tenu hier au Cercle national de l’Armée (CNA), en présence du ministre de l’Hydraulique M. Taha Derbal et celui des Finances, M. Abdelkrim Bouzred, l’ADE a exposé son bilan annuel pour 2024, dévoilant la production et la distribution de plus de 2,13 milliards de m³ d’eau potable, soit une moyenne journalière de 5,85 millions de m³. Cette performance a été rendue possible grâce à un réseau imposant comprenant 108 stations de traitement, 2 077 stations de pompage et 8 620 réservoirs.
La répartition des sources d’approvisionnement illustre une diversification stratégique : 52 % proviennent des eaux souterraines, 33 % des eaux de surface et 15 % du dessalement de l’eau de mer. Une preuve que l’Algérie mise sur toutes les ressources disponibles pour sécuriser son approvisionnement.
La qualité de l’eau distribuée reste une priorité absolue pour l’ADE qui a réalisé 300 millions de tests de chlore, 311 000 analyses bactériologiques et 340 000 analyses physico-chimiques en 2024, assurant ainsi une eau saine et préservant la population de toute maladie hydrique depuis 2009.
Modernisation des réseaux et lutte contre les pertes
L’amélioration du service public passe aussi par la réhabilitation des infrastructures vieillissantes. En 2024, l’ADE a lancé des projets de rénovation dans 12 villes, portant sur 592 km de canalisations, 52 574 branchements individuels, 10 réservoirs, 10 forages et 6 stations de pompage. Ces travaux ont permis de récupérer 38 600 m³ par jour, améliorant l’accès à l’eau pour plus de 520 000 personnes.
Parallèlement, l’entreprise a intensifié sa lutte contre les fuites et les branchements illégaux, avec 284 000 réparations effectuées lors de 23 campagnes de terrain. Ces efforts ont contribué à une hausse du taux de recouvrement des créances, qui s’élève désormais à 37,73 milliards de DA, en progression de 2,3 milliards de DA par rapport à 2023.
Réalisation de grands projets structurants
Consciente des enjeux climatiques, l’Algérie a fait du dessalement de l’eau de mer un pilier central de sa politique hydrique. Cinq grandes usines, d’une capacité de 300.000 m³/jour chacune, ont déjà été mises en service à El Tarf, Boumerdès, Tipaza, Oran et Béjaïa, pour un investissement total de 2,4 milliards de dollars.
Une deuxième phase, prévue dès 2026, verra la construction de six nouvelles usines à Skikda, Jijel, Tizi Ouzou, Chlef, Mostaganem et Tlemcen. À terme, ces infrastructures porteront la capacité nationale de dessalement à 3,7 millions de m³/jour, couvrant 42 % de la demande en eau potable. D’ici quelques années, cette part devrait même dépasser 60 %, consolidant la place de l’Algérie comme leader africain et 2ᵉ du Monde arabe dans ce domaine.
Au-delà du dessalement, l’État a engagé des projets d’envergure pour optimiser la gestion des ressources existantes. L’interconnexion des barrages et les grands transferts hydrauliques (notamment Sud-Sud et Sud-Nord) permettent d’alimenter les régions les moins dotées en eau.
Parmi les réalisations marquantes figure le mégaprojet de transfert des eaux souterraines de Guetrani (Béchar), achevé récemment, qui fournit 80 000 m³/jour aux populations locales, la réalisation de 1 200 puits supplémentaires et la réhabilitation de 11 stations de filtration. Aussi, l’extension des réseaux d’assainissement sur 1 103 km, ainsi que l’aménagement de 6 nouveaux barrages d’une capacité totale de 642 millions de m³.
Grâce à ces efforts, le taux de raccordement aux réseaux d’eau potable atteint désormais 98 % à l’échelle nationale, un chiffre qui place l’Algérie parmi les pays les plus avancés en la matière.
Ainsi, l’Algérie a su transformer la contrainte hydrique en une opportunité de développement, à travers les investissements colossaux engagés qui garantissent aujourd’hui la sécurité hydrique pour les générations futures. Avec des performances en hausse, des infrastructures modernisées et une stratégie claire, l’Algérie confirme sa place de pionnière en matière de gestion de l’eau, tout en se préparant aux défis climatiques à venir.