Par Brahim Aziez
L’Algérie semble redevenir une destination privilégiée de l’industrie du poids lourd. Avec la SNVI qui «renaît de ses cendres», la SAPPL-MB qui produit les camions Mercedes-Benz à Rouiba, le groupe Volvo Trucks qui aspire à faire redémarrer son usine Renault Trucks Algérie à Meftah, le chinois JAC qui ne désespère pas de recevoir le quitus des autorités pour commencer la production de camions (petit et moyen tonnages) à Aïn Témouchent, au même titre qu’Iveco à Bouira (Oued El-Berdi) et Reghaïa, il y a ces déclarations d’intention de constructeurs asiatiques qui veulent implanter des usines en Algérie. Le coréen Daewoo Trucks et les chinois Sino Trucks, Shakman et Faw pour ne citer que ceux-là. Ce dernier (Faw) a annoncé dernièrement son intention d’implanter une usine de camions en Algérie. Trucks Faw Algérie, partenaire local du constructeur chinois, a publié un communiqué dans lequel il est annoncé l’ambition de réaliser «le plus grand projet pour l’industrie des camions, poids lourds, moyens et petit tonnage». Ce partenariat algéro-chinois entre le groupe chinois et son représentant officiel en Algérie entend implanter son projet dans la zone de Benhar à Aïn Ouessara (wilaya de Djelfa), et promet de contribuer à la création de nouveaux emplois et d’une dynamique économique nationale.
Daewoo Truck, qui est revenu sur le marché algérien en mars dernier, après que sont partenaire local, Peng Pu Algérie, ait décroché son agrément pour l’importation en fin d’année dernière, entend réactiver son unité d’assemblage à Chlef, et la faire évoluer pour se mettre en conformité avec les nouvelles règles qui régissent l’activité de fabrication automobile. Lors de la cérémonie de lancement de la marque, événement qui a été marqué par la présence du CEO de Daewoo Truck, Kim Bang Bang Shim, et des responsables de la marque dans la région MEA (Moyen-Orient et Afrique), le premier responsable de Peng Pu Algeria a réaffirmé l’ambition de l’entreprise qu’il dirige de relancer la production locale qui a été entamée en 2016 pour être interrompue en 2019.
Le groupe Sinotruck, qui a lancé sa gamme Howo en avril dernier, après que son partenaire algérien Soframimex a décroché son agrément en 2023, ne compte pas se limiter aux importations et la distribution de camions dans le pays. Selon le PDG du groupe chinois Sinotruk, Li Wei, qui était à Alger lors de la cérémonie de lancement, un projet d’usine à Biskra était en maturation avec pour perspective d’exporter jusqu’à 10.000 camions vers les pays voisins à terme. Les ambitions sont similaires chez le groupe Benhamadi qui relancera la distribution de Shakman en Algérie dans les prochains jours.
Une industrie du poids lourd entamée en 1958
L’histoire de l’Algérie avec l’industrie du camion remonte à 1958, année qui a vu l’inauguration de l’usine Berliet à Rouiba. Après sa nationalisation en 1967, Sonacome a repris les installations de la société africaine des automobiles Berliet (SAAB), avant que la SNVI (société nationale de véhicules industriels) ne prenne le relais pour fabriquer des camions et des bus, pour être mise sous la tutelle du ministère de la défense en 2021. Entre-temps, Sonacome, puis SNVI, ont réussi à faire connaître les camions produits en Algérie à travers l’Afrique, mais aussi à l’international après que le M210 a remporté le rallye Paris-Alger-Dakar en 1980.
Le marché des poids lourds a toujours été florissant, au point où SNVI n’a jamais pu répondre à la demande locale où les délais d’attente dépassaient souvent 12 mois. Du coup, de nombreux opérateurs avaient investi le marché de la distribution (importation) dès la fin des années 90. On pouvait compter les marques européennes Renault Trucks, Volvo, MAN, Scania, Iveco, Hino, Nissan diesel, Daewoo Trucks, Hyundai Trucks, Isuzu, Shakman…
Le marché algérien absorbait plus de 5000 camions poids lourds (+16 t) de type européen, et presque autant d’asiatiques, et plus de 20.000 unités de petit et moyen tonnages (1,5 à 6 t).
Il est clair que la demande reste très élevée du fait de l’interruption des importations et de la production locale qui étaient en vigueur jusqu’en 2019, mais si tous ces projets venaient à voir le jour, l’offre dépassera largement la demande du marché. Et c’est la perspective de l’exportation qui doit animer les ambitions des uns et des autres, en ce sens que l’Algérie, qui se trouve dans une position géostratégique de premier choix, bénéficie d’importants projets d’ouverture vers le continent africain à travers la transsaharienne, la Zlecaf…
Aussi, les regards restent braqués sur le ministère de l’industrie et de la production pharmaceutique qui aura à délivrer les agréments pour les différents prétendants, sachant qu’il ne pourrait pas y avoir des dizaines d’unités de production, des choix doivent être faits.
B.A.