Par M. Mansour
Le lancement officiel du premier système d’exploitation informatique 100% algérien, basé sur une architecture open source, marque une étape dans la quête de souveraineté numérique et d’innovation technologique. Présenté hier à l’université Docteur Moulay Tahar de Saïda, ce projet, fruit d’une collaboration de plusieurs années entre étudiants et chercheurs algériens, illustre la volonté de réduire la dépendance aux solutions étrangères, tout en favorisant l’émergence d’un écosystème technologique local.
«Une économie de la connaissance, une économie ouverte»
Lors de la cérémonie de présentation, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Kamel Baddari, a mis en avant l’importance de cette réalisation, fruit de plusieurs années d’efforts collaboratifs réunissant étudiants et chercheurs de divers établissements à travers le pays. Ce système d’exploitation, fondé sur une distribution Linux et conçu pour répondre spécifiquement aux besoins algériens, incarne une volonté claire de bâtir une «économie de la connaissance, une économie ouverte», comme l’a souligné M. Baddari dans son discours. En tant que plateforme technologique locale, il promet de «stimuler la création de nombreuses start-up dans le domaine des logiciels, renforçant ainsi la dynamique entrepreneuriale nationale», a-t-il ajouté.
Cette prouesse réalisée par des compétences algériennes repose sur plusieurs avantages. Grâce à son architecture Linux, il offre une sécurité renforcée, une adaptabilité aux besoins spécifiques et une simplicité d’utilisation qui pourrait encourager une adoption à grande échelle. Le ministre ne l’a pas exprimé de manière aussi explicite, mais il l’a suggéré en déclarant que «la création de cette distribution Linux alliant facilité d’utilisation et sécurité contribuera à améliorer la performance des systèmes d’exploitation de nos ordinateurs, en sécurisant notamment nos systèmes d’information».
Les multiples facettes de la souveraineté numérique
De ce fait, l’importance de ce projet s’inscrit dans un contexte global où de nombreux pays, parmi lesquels des super-émergents, ont également pris des mesures pour développer leurs propres systèmes d’exploitation à des fins similaires. La Chine, par exemple, a conçu Kylin OS pour réduire sa dépendance vis-à-vis des technologies américaines et renforcer la sécurité de ses infrastructures stratégiques. En Russie, Astra Linux joue un rôle clé dans la protection des données sensibles, tandis qu’en Inde, BOSS (Bharat Operating System Solutions) permet de promouvoir l’éducation et l’administration numérique dans plusieurs langues locales. Ces exemples démontrent que l’impératif de souveraineté numérique n’est pas seulement une question de technologie, mais aussi un outil pour affirmer une autonomie politique, économique et culturelle face aux puissances technologiques dominantes.
L’innovation, levier essentiel pour la création d’emplois
D’un autre côté, ce projet représente une opportunité d’améliorer l’employabilité des jeunes talents algériens tout en valorisant leurs compétences en entretenant la viabilité de ce système, comme l’a si bien souligné M. Baddari. Cette initiative s’inscrit dans une volonté explicite de transformer le système d’exploitation en un catalyseur pour l’entrepreneuriat. En encourageant la création de start-up spécialisées dans le développement de logiciels, les pouvoirs publics s’efforcent de renforcer un tissu économique dans lequel les jeunes entreprises sont appelées à jouer un rôle de plus en plus déterminant. D’ailleurs, l’université de Saïda, berceau de ce projet, illustre parfaitement cette démarche fondée sur la mise en avant de l’innovation, portée par le dynamisme des nouvelles générations, dans le cadre de la nouvelle stratégie de l’Université algérienne, qui œuvre de plus en plus à former de futurs entrepreneurs.
Cependant, le défi reste immense. Afin que ce système d’exploitation atteigne tout son potentiel, il sera nécessaire de surmonter plusieurs obstacles, notamment en matière d’adoption par les utilisateurs de mise à jour continue des fonctionnalités et de formation des professionnels. Ces défis rappellent les expériences d’autres nations, comme la Corée du Sud avec TMAX OS ou Cuba avec Nova, qui ont montré que la réussite de tels projets repose autant sur la qualité technique que sur l’accompagnement des utilisateurs et le soutien institutionnel.