Par Djilali B.
Plus qu’un projet économique commun, le gazoduc transsaharien, qui doit relier Lagos à Alger en passant par le Niger, est aussi un signe de l’engagement politique des trois pays voisins pour instaurer une zone de paix et d’entente dans leur ciel, d’être un exemple pour les autres régions du continent.
Cette option s’est confirmée hier à Alger à l’occasion de la rencontre tripartite, Algérie, Nigeria et Niger, avec la réaffirmation du rôle de l’Algérie dans le règlement des conflits, litiges et différends entre les pays du continent. En effet, la rencontre économique a pris une connotation politique inattendue, révélée par le ministre nigérien du Pétrole, M. Sahabi Oumarou, qui a salué l’Algérie pour avoir réussi à réunir à la même table des pays aux relations tendues entre eux et surtout de les faire converger concernant ce projet d’intérêt commun.
Sahabi Oumara a, à ce propos, remercié, dans son allocution, l’Algérie pour son engagement et pour avoir réussi à «nous réunir, le Niger, l’Algérie et le Nigeria, autour d’une table», a-t-il indiqué en précisant que «cela montre que malgré nos divergences plus ou moins substantielles, nous sommes frères, nous avons un sort commun, un avenir commun et un intérêt commun», a-t-il souligné. C’est partant du constat que ces pays sont liés par la frontière, le destin, l’avenir et les intérêts qu’ils doivent se résigner à développer des relations pragmatiques et adopter des positions fraternelles.
Ainsi, le ministre nigérien chargé du Pétrole a donné une dimension politique à cette rencontre au caractère foncièrement économique. En effet, il a démontré que les impératifs économiques peuvent être des facteurs d’apaisement. Dans le cas présent, le gazoduc transsaharien, par sa dimension stratégique, ses intérêts socioéconomiques pour les trois partenaires, a relégué au second plan le différend entre le Niger et le Nigeria, qui remonte au 26 juillet qui a débarqué le président Mohammed Bazoum et contre lequel la Cédéao dont est membre le Nigeria avait pris des mesures coercitives, des sanctions économiques et une menace d’intervention militaire pour rétablir le président déchu dans ses fonctions. Deux principes fondamentaux ont guidé la position de l’Algérie dans ce dossier : le rejet des coups de force pour changer les régimes, le rejet de l’intervention étrangère dans les affaires internes des Etats. Autrement dit, la position de l’Algérie n’est favorable à aucune de ces actions, plaidant, devant le fait accompli du coup d’Etat et de l’intransigeance des putschistes pour une période de transition modérée pour un retour à l’ordre constitutionnel. La situation a évolué en prenant un tournant radical entre Niamey et la Cédéao lorsque le Niger a rejoint le Mali et le Burkina Faso qui avaient décidé de quitter l’organisation économique ouest-africaine. Il a subsisté alors ce «relent» de rancune entre Niamey et Abuja malgré le retrait, acté, du Niger de la Cédéao. Les deux pays voisins sont toutefois vite rattrapés par la géographie, la frontière commune longue de 1700 km et les intérêts socioéconomiques.
Le Directeur général de la société pétrolière du Niger Sonidep, M. Ali Sebou, a trouvé la formule dans une déclaration hier, en affirmant, à ce propos : «Nous avons 1700 km (frontière), naturellement, nous sommes condamnés à nous accepter».
La rencontre, au-delà de sa dimension technique et ses enjeux économiques majeurs, a été un moment de communion entre les pays voisins, en désaccord, dans le temple du CIC.
Et pour confirmer l’engagement politique pour la réalisation du projet, les délégations ont été reçues hier par le président de la République au palais d’El Mouradia, où un compte rendu détaillé de la rencontre lui a été fait, jusqu’à la signature du document confirmant l’engagement des trois partenaires pour la réalisation du projet.