Le ministre espagnol des affaires étrangères lundi à Alger. Algérie-Espagne : Madrid veut ouvrir une nouvelle page

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PAR AMAR R.

Le ministre espagnol des affaires étrangères, José Manuel Albares, a annoncé qu’il effectuera lundi une visite à Alger. Le gouvernement Sanchez veut clairement tourner la page des différends nés de son revirement sur la question sahraouie et qu’il s’emploie depuis quelques mois à corriger.

Cette visite du chef de la diplomatie ibérique devrait marquer la fin de la crise diplomatique, qui a coûté cher à l’Espagne sans lui rapporter grand-chose en contrepartie. Elle vient aussi couronner une série de « petits pas » pour le dégel des relations bilatérales, suite à l’évolution du discours du premier ministre espagnol sur le Sahara occidental, comme l’a affirmé Ahmed Attaf, lors d’un entretien accordé à la chaîne qatarie Al Jazeera, en décembre 2023, affirmant que le discours de Pedro Sanchez à l’assemblée générale des nations unies a ouvert la voie à une réévaluation des relations entre les deux pays.

C’est dans ce sillage que survient la nomination par Alger d’un nouvel ambassadeur à Madrid, mi-décembre, en la personne du diplomate Abdelfattah Daghmoum, en remplacement de Aïssa Moussi qui avait été rappelé par Alger 19 mois auparavant pour consultations, suite au changement de position de Sanchez sur le Sahara occidental, qui avait été aussi à l’origine de la suspension du traité d’amitié et de bon voisinage entre les deux pays.

Dégel

Une dynamique de dégel des relations algéro-espagnoles sur le plan économique a été amorcée en outre pour lever l’arrêt des opérations d’importations qui a entraîné une baisse de plus de 2,3 milliards de dollars du volume des ventes des entreprises espagnoles en Algérie en seulement un an et demi. Les exportations espagnoles de certains produits à base de volaille et de viande rouge ont ainsi repris, à la mi-janvier, après que l’association algérienne des banques et institutions financières a autorisé les procédures de réimportation de poulet d’Espagne, qui représentait 60% de ce que le pays consommait avant cette crise. Selon la circulaire du 14 janvier, l’importation « d’intrants avicoles, en l’occurrence de poussins reproducteurs, de poussins pondeurs ainsi que d’œufs à couver, en provenance du royaume d’Espagne » est autorisée.

Les liaisons aériennes ont également été rétablies, qui consistent actuellement en 25 vols hebdomadaires entre plusieurs villes espagnoles et algériennes. Selon les Espagnols, Albares rencontrera Attaf en tête à tête avant d’être reçu en audience par Abdelmadjid Tebboune ; les discussions porteront sur la relance du traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération suspendu par l’Algérie le 8 juin 2022. Les situations dans la région sahélo-saharienne et dans la bande de Ghaza seront également abordées lors de cet entretien.

Des analystes expliquent le dégel des relations algéro-espagnoles en partie par la position du président socialiste défendant publiquement les civils palestiniens lors de l’agression qu’ils subissent de la part de l’occupation israélienne. Une position qui a tout pour plaire à l’Algérie qui est un fervent défenseur de la cause palestinienne et est une partie active dans le procès intenté par des centaines d’avocats internationaux auprès de la cour pénale internationale pour enquêter sur Israël pour les crimes de guerre présumés à Ghaza. En janvier, l’Algérie a aussi présenté au conseil de sécurité des nations unies une proposition visant la mise en œuvre de la décision de la cour internationale de justice qui ordonne à l’occupation sioniste de prendre des mesures conservatoires visant à empêcher le génocide des Palestiniens dans la l’enclave palestinienne.

L’ombre du Sahara occidental planera aussi sur la rencontre du chef de la diplomatie espagnole avec les hautes autorités algériennes lors de sa visite à Alger, dont le dossier sera certainement à l’ordre du jour des discussions, dans le sens d’un réajustement de la position de l’Espagne à l’égard du conflit au Sahara occidental. Et ce, après la stratégie « soft » employée par l’Algérie pour faire revenir Sanchez sur son alignement sur les thèses du makhzen qui est attribuable au chantage des migrants et à l’espionnage par le logiciel Pegasus.

A. R.