PAR BRAHIM AZIEZ
Dans son discours à la nation, prononcé lundi devant les membres des deux chambres du parlement, le président de la République a révélé que du fait de « l’opacité, les détournements et la gabegie qui régnaient jusqu’en 2019 », le banques avaient été pratiquement mises à sac avec « 5000 milliards de dinars qui ont été octroyés en crédits bancaires, dont seulement 10% ont été remboursés ». Un chiffre énorme, surtout lorsqu’on sait qu’en 2019 cela représentait près de 40 milliards de dollars. Et si 10% seulement ont été remboursés, cela signifie que l’équivalent de plus de 35 milliards de dollars reste à recouvrer. Abdelmadjid Tebboune poursuivra en affirmant que « le reste a été transféré à l’étranger pour servir à l’achat d’hôtels et de biens luxueux ». Surfacturation, mais aussi fausses facturations. Et à ce propos, le chef de l’Etat donnera quelques exemples d’importations de biens ou de matières premières, et qui se sont révélées des importations de sable, de pierres ou carrément d’ordures ménagères…
400 millions de dollars entre 2020 et 2023
Lors d’une de ses rencontres avec les médias nationaux, il a évoqué la période allant entre 2009 et 2019 où le phénomène de surfacturation avait atteint 30% de l’ensemble des transactions commerciales liées à l’importation, citant un rapport de la banque européenne de développement consacré à l’Algérie. Ce trafic qui a particulièrement prospéré entre 2007 et 2019 (et auquel se sont livrés entreprises et importateurs, locaux et étrangers) a permis le transfert illicite et le blanchiment de centaines de milliards de dinars. Un phénomène qui s’est poursuivi au-delà de cette période, tant les « mauvaises habitudes ont la peau dure », puisque l’on apprendra du premier magistrat du pays que « la surfacturation a représenté un montant évalué à 400 millions de dollars entre 2020 et 2023 », estimant cette baisse de sensible en comparaison avec les années précédentes.
Mais pour lui, ce recul du phénomène de la surfacturation, ces dernières années, est dû à l’efficacité des mécanismes de contrôle du commerce extérieur qui, auparavant, étaient absents, en plus de l’abrogation des lois ouvrant des brèches permettant des dépassements en matière d’importation.
Des mécanismes mis en place pour faire face aux surfacturations
En début d’année, le président de la République avait évoqué « la réduction de la facture des importations d’un montant allant de 36 à 38 milliards de dollars », après que « cette facture se soit élevée, dans le passé, à 63 milliards de dollars par an en raison de la surfacturation ». Une facture « salée » réalisée, des années durant, au détriment de l’économie nationale et de l’industrie locale.
D’ailleurs, le président de la République soulignera que « nous avons réussi à réduire les importations sans priver le citoyen des besoins élémentaires ». Mieux encore, Abdelmadjid Tebboune ajoutait : « Nous avons découvert qu’il y avait aussi 26 000 sociétés fictives qui transféraient de l’argent à l’étranger sous le couvert de l’importation, qui n’était en réalité qu’un moyen pour voler l’argent public. » En évoquant les réserves de change, Tebboune dira : « Lorsque le pétrole coûtait 140$, 80 allaient à l’étranger, 60 seulement restent ici. »
Récupération de l’argent détourné
La récupération des fonds détournés reste l’une des priorités du président de la République. L’opération a commencé, selon lui, dans le pays, où « l’équivalent de 30 milliards de dollars en biens fonciers et unités industrielles ont été récupérés depuis le début de l’opération de la lutte contre la corruption », avait affirmé le chef de l’Etat, qui ajoutera que « pour les fonds se trouvant à l’étranger, nous sommes toujours en contact avec les pays concernés en vue de leur recouvrement.
La plupart de ces pays sont prêts à coopérer avec nous », faisait-il savoir. L’opération risque d’être longue et laborieuse, mais les autorités algériennes semblent déterminées à user de tous les droits internationaux pour récupérer les fonds transférés à l’étranger par les oligarques qui croupissent actuellement dans les prisons algériennes.
B. A.