Zine Haddadi
Le gouvernement prévoit des mesures restrictives à la revente des véhicules d’occasion de moins de trois ans dans la loi de finances 2025. Dans le projet de loi de finances, consulté par «l’Algérie Aujourd’hui», il est stipulé qu’il interdit de revendre les véhicules d’occasion importés pour une durée de trois ans.
«Ces véhicules sont incessibles pour une durée de trois (3) ans à compter de la date de leur acquisition», indique l’article 110 du projet de loi de finances 2025.
Dans l’exposé des motifs, le gouvernement explique qu’il veut instaurer une interdiction de cession, pour une durée de trois (3) ans, à compter de la date de leur acquisition, des véhicules de tourisme usagers et utilitaires, électriques et ceux à moteur à piston, à allumage par compression (essence) ou hybrides (essence et électrique), de moins de trois (3) ans importés par les particuliers résidant en Algérie.
On a justifié l’instauration de cette interdiction de cession par la lutte «contre les pratiques spéculatives de certains revendeurs et particuliers, qui ont altéré l’objectif recherché à travers les avantages fiscaux et douaniers accordés en la matière».
Or, le projet de loi de finances 2025 qui instaure une interdiction sur la cession des véhicules d’occasion pour une durée de trois ans ne mentionne pas la limitation d’acquisition pour les acheteurs, comme cela est mentionné auparavant.
En effet, la loi de finances 2020 qui a permis l’importation des véhicules d’occasion, l’article 110, modifié dans le projet de loi de finances 2025, mentionnait bien que les particuliers résidents pouvaient importer «une (1) fois tous les trois (3) ans, sur leurs devises propres, par débit d’un compte devises, ouvert en Algérie».
En outre, aucune référence n’est faite au décret exécutif 23-74 fixant les conditions et les modalités de dédouanement et du contrôle de conformité des véhicules de tourisme et utilitaires d’occasion acquis par les particuliers résidents.
Ledit décret indique dans son article 3 que «le particulier résident est autorisé à acquérir auprès des personnes physiques ou morales un véhicule d’occasion pour sa mise en circulation en Algérie, une seule fois tous les trois (3) ans, à compter de la date de la déclaration de sa mise à la consommation».
Ainsi, la limitation d’acquisition de véhicule par personne n’est pas mentionnée dans le projet de loi de finances 2025.
Quel impact sur le marché ?
Si le gouvernement veut lutter contre les pratiques de spéculation en interdisant la cession des véhicules de moins de trois ans importés, rien n’empêche a priori les importateurs particuliers d’en acquérir plusieurs en sachant que même la limitation du nombre d’achat appliquée sur les véhicules neufs a été contournée par des transactions notariales et n’a pas vraiment empêché la spéculation.
Dans le décret exécutif n° 22-383 du 2022 fixant les conditions et les modalités d’exercice de l’activité de concessionnaire de véhicules neufs, les concessionnaires s’engagent à «à ne vendre qu’un seul véhicule de tourisme par personne physique pour une période de cinq (5) années, sauf en cas de réforme dûment justifiée».
Malgré cela, les revendeurs ont trouvé le moyen d’acheter plusieurs véhicules sous des prête-noms et de les remettre sur le marché à des prix dépassant ceux du concessionnaire parfois d’un million de dinars, et ce, encouragés par les délais de livraison peu respectés par les concessionnaires.
Le gouvernement est appelé à apporter des éclaircissements sur sa nouvelle mesure de restriction sur la cession des véhicules d’occasion pour une durée de trois ans et d’en étudier l’impact réel sur le marché.
Si un particulier peut importer pour un nombre illimité des véhicules d’occasion, ce n’est pas l’interdiction de cession qui pourrait l’empêcher de les revendre ne serait-ce qu’en opérant par les mêmes subterfuges utilisés pour contourner la limitation d’achat des véhicules neufs.
C’est également le cas pour les licences de moudjahidine qui sont louées au prix fort pour permettre l’importation de véhicules de l’étranger.
Le gouvernement pourrait bien utiliser le levier du fichier national des opérations d’importation et d’acquisition des véhicules d’occasion, effectuées par les particuliers résidents dont la gestion est confiée à l’administration douanière selon l’article 11 décret exécutif 23-74 fixant les conditions et les modalités de dédouanement et du contrôle de conformité des véhicules de tourisme et utilitaires d’occasion acquis par les particuliers résidents.
L’interdiction de cession des véhicules d’occasion, bien qu’elle puisse sembler nécessaire au vu de la proportion du fléau de la spéculation et son impact sur les prix du marché automobile en Algérie, devrait être accompagnée par d’autres mesures pour qu’elle puisse remplir son rôle de manière efficace.