Par Djilali B.
Fin de mission pour la société privée de sécurité russe Wagner. L’information a été confirmée, hier, au Mali où la société russe de sécurité opère, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, notamment dans les agglomérations du nord, et la sécurisation des endroits sensibles de la capitale Bamako. Le départ de la SMP Wagner n’affectera en rien la présence du contingent russe en Afrique ; c’est désormais Africa Corps, affilié au ministère russe de la Défense, qui combattra sur place, est-il indiqué, hier, dans un message sur Telegram, annonçant le retrait de Wagner après avoir accompli sa mission avec succès. Sa mission accomplie a été de ramener tous les centres régionaux du Mali sous le contrôle de la junte militaire au pouvoir dans le pays, en chassant les forces islamistes et en tuant leurs commandants, a-t-on souligné. La junte militaire en poste à Bamako avait fait appel à Wagner pour combler le vide sécuritaire laissé par le retrait exigé des forces françaises et le renvoi de la Minusma, la force internationale de stabilisation, pour lutter contre le terrorisme et sécuriser, aujourd’hui, jusqu’aux infrastructures stratégiques et sensibles du pays et la capitale, notamment après l’attaque de l’aéroport de Bamako en septembre 2024.
Le groupe Wagner s’est illustré par ailleurs par ses méthodes brutales qui n’épargnent même pas les civils comme l’ont relevé des observateurs et des ONG, notamment lors de la prise de Kidal, principale ville du nord du Mali où les mercenaires du groupe avaient hissé le drapeau russe ou, plus grave encore, lors de la bataille de Tinzaouatène. Après sa déroute, le groupe s’est vengé dans une expédition punitive avec une rare violence contre la population de cette ville limitrophe de la frontière algérienne. Des méthodes, dénoncées, et qui ont soulevé une vague d’indignation à travers le monde.
Depuis, les éléments de Wagner se sont faits plus discrets même s’ils sont restés la force de frappe des forces armées maliennes, FAMa. C’est en effet grâce à Wagner que l’armée malienne contrôle la majorité des pôles urbains régionaux et réduit les attaques terroristes.
Il y a lieu par ailleurs de préciser que le départ de Wagner ne signe pas la fin de la présence militaire russe dans le Sahel. Il est remplacé par Africa Corps, qui est son frère jumeau mais doté d’un autre statut, créé en 2023 après sa mutinerie, lors de sa tentative de marche sur Moscou, en juin 2023. Le patron de Wagner, Evguéni Prigojine, proche du président Poutine, et dont les éléments avaient fortement soutenu l’armée russe sur le front ukrainien, avait accepté de se retirer et de s’installer en Biélorussie, est décédé en août 2023 dans un accident d’hélicoptère. Quelques mois après, soit le 20 novembre 2023, est annoncée la création d’une nouvelle société de sécurité dont les effectifs sont composés à 70-80% des éléments de Wagner. Wagner a changé de dénomination, en Africa Corps, de statut et a été rattaché directement au ministère russe de la Défense. Le nom d’Africa Corps découle, sans doute, du fait que le groupe opère principalement sur le continent africain, dans les pays où est présente la Russie, à l’instar de la Libye, aux côtés du maréchal Haftar, dans les pays du Sahel, Mali, Burkina Faso et Niger mais aussi, en Centre Afrique. Un continent où la Russie a remplacé la France sur les plans militaire et économique.
Africa Corps poursuivra ses missions sécuritaires dont la lutte contre les groupes extrémistes et pour la sécurisation des endroits sensibles et des personnalités. C’est le cas au Mali et au Burkina Faso où les présidents de la transition ont vu leur sécurité renforcée en raison des tentatives de putsch. Le président Traoré a fait l’objet d’au moins quatre tentatives de coup d’Etat que sa garde rapprochée a déjoué avec l’appui des éléments aguerris d’Africa Corps. Plus d’une centaine d’assaillants ont été neutralisés.
La nouvelle société russe de sécurité pourrait servir dans la protection des sites et des investissements économiques russes dans ces pays. Notamment les mines et les gisements d’hydrocarbures. Le groupe vient appuyer les forces armées locales et les services de sécurité des pays concernés alors que le volet strictement militaire est pris en charge par l’armée russe qui assure déjà la formation des soldats des armées locales, les formations adaptées au matériel militaire russe, l’expertise.
Pour ainsi dire, avec Africa Corps, la Russie redéfinit les missions de sa société de sécurité pour faire oublier Wagner de triste mémoire.
