Mort de l’enseignant Abdelhalim Bouchlaghem suite à des violences morales : Les syndicats s’insurgent et exigent une enquête

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/Le 4 mai dernier, la corporation éducative a été endeuillée par la disparition tragique de l’enseignant Bouchelaghem Abdelhalim exerçant au niveau du CEM Wahiba Kebaili, situé dans la commune d’Alger centre. 

Victime de violences verbales et morales de la part de parents d’élèves, l’enseignant qui a cumulé près de 35 ans de services se trouvait en service de réanimation depuis plus de deux semaines suite à un AVC survenu le jour de l’incident. Respecté de tous et considéré comme un fonctionnaire exemplaire, la mort d’Abdelhalim Bouchelaghem a suscité l’indignation au sein de la corporation qui appelle aujourd’hui à rendre justice pour le défunt.

Une confrontation parents -enseignant qui vire au drame

Nous sommes le 19 avril 2022 lorsque l’enseignant se fait agresser en classe par un de ses élèves souffrant d’autisme et qui suit ses cours en compagnie d’un auxiliaire de vie. L’élève, et selon les témoins, crache sur l’enseignant à de nombreuses reprises, ce dernier tente d’abord de se calmer mais finit par s’emporter mais sans porter de violence à l’égard de l’élève. A la sortie des classes, c’est la maman de l’élève qui interpelle l’enseignant en le couvrant d’insultes. Abdelhalim Bouchelaghem décide de ne pas répondre à la maman et la recale en demandant à parler au père de l’élève. Au lendemain de cette mésaventure, Abdelhalim Bouchelaghem est saisi par les deux parents de l’enfant. Mécontents, ils feront subir à l’enseignant les pires insultes et humiliations en public. Ce dernier ne répond pas et préfère se retirer et quitte l’école avant l’heure. Ce n’est que sur sa route vers chez lui qu’il s’écroule et sombre dans le coma pour décéder 15 jours plus.

Face à ce drame, les syndicats de l’éducation nationale n’ont pas tardé à réagir en réclamant l’ouverture d’une enquête sur les véritables circonstances de la mort de l’enseignant. C’est le cas de l’Union nationale des personnels de l’éducation et de la formation (UNPEF), le Conseil national des personnels du secteur ternaire de l’éducation (Cnapeste) et le Conseil des lycées d’Algérie (CLA), qui ont rendu public, hier, des communiqués dans lesquels ils appellent les autorités à ouvrir une enquête approfondie sur la mort de Bouchlaghem et exigent un texte de loi pénalisant les atteintes aux personnels de l’éducation nationale devenus très fréquentes.

Les syndicats veulent une loi qui protège les enseignants

Pour Messaoud Boudiba, porte-parole du Cnapeste, le cas Abdelhalim Bouchelaghem est «loin d’être un cas isolé» et «reflète toutes les difficultés d’exercer le métier d’enseignant  aujourd’hui avec l’insécurité qui règne sur les établissements scolaires», dit-il.  Cependant, en plus de l’insécurité et la violence dans les écoles, le syndicaliste remet en question l’intégration des enfants souffrants d’autisme dans des classes normales. «Ce n’est pas la première fois qu’un enseignant se fait agresser en classe, cet élève ne devait pas se trouver dans une classe normale même s’il est accompagné d’un auxiliaire de vie, il doit suivre ses études en milieu adéquat», déclare le syndicaliste. Il est à noter que la scolarisation des enfants atteints d’autisme est régulée par la convention relative aux droits des personnes handicapées des Nations unies qui garantit par son article 24 le droit à l’éducation et à l’insertion scolaire des personnes handicapées ainsi que l’article 65 de la Constitution de la République d’Algérie qui garantit le droit à l’éducation et à l’enseignement. Ce droit est consacré par la loi n° 08-04 du 23 janvier 2008 portant loi d’orientation sur l’éducation nationale qui stipule que l’enfant avec autisme peut intégrer une classe ordinaire avec des enfants valides. L’inscription d’un enfant avec autisme dans une classe ordinaire est possible avec un dossier médical présentant l’avis favorable de l’équipe pluridisciplinaire (pédopsychiatre, psychologue, orthophoniste…). Il doit stipuler que l’enfant ne présente pas un handicap mental et possède des capacités cognitives et intellectuelles lui permettant de suivre une scolarité en classe ordinaire avec ou sans auxiliaire de vie scolaire (AVS). A l’instar du personnel de la santé publique qui bénéficient depuis 2020 d’un texte de loi incriminant toute formes d’atteintes à leur égard, les syndicats de l’éducation nationale et face à ce genre d’incidents répétitifs revendiquent à leur tour un texte de loi pour protéger les travailleurs du secteur notamment les enseignants. «Il est plus que temps pour que la tutelle pense à mettre en place un cadre juridique pour protéger les enseignants contre tous les dépassements et notamment les agressions, qu’elles soient d’ordre morale ou physique», explique Messaoud Boudiba. Par ailleurs et en hommage à l’enseignant Abdelhalim Bouchelaghem, les syndicats du secteur ont appelé les travailleurs des établissements scolaires relevant de la commune d’Alger centre à observer une minute de silence aujourd’hui à la mémoire du défunt.

W. S.