PAR R. AKLI
Fortement dominé par de grandes institutions bancaires à capitaux étatiques et formé surtout de banques universelles exerçant tous types d’opérations de dépôts et de crédits classiques, le paysage bancaire national est désormais appelé à se diversifier et à se moderniser en élargissant sa composante à de nouveaux intervenants et établissements spécialisés. Des banques d’affaires et d’investissement, des banques en ligne et surtout de nouveaux établissements bancaires et financiers à capitaux privés nationaux devraient ainsi émerger à l’avenir pour promouvoir l’inclusion financière et garantir l’aboutissement de la réforme bancaire à laquelle les pouvoirs publics entendent donner corps dès cette
année. Dans le sillage de l’avènement, en juin dernier, de la nouvelle loi monétaire et bancaire, venue mettre à jour la fameuse Loi monnaie et crédit (LMC) de 1990, un nouveau règlement de la Banque d’Algérie vient ainsi d’être promulgué pour préciser les modalités et conditions de création et d’agrément de banques et d’établissements financiers.
Les conditions d’autorisation
Le nouveau texte, publié tout récemment au Journal officiel, introduit notamment les conditions d’autorisation de constitution de banques d’affaires et de banques digitales avec des exigences de niveaux de capital social minimal à détenir de 20 milliards de DA pour les premières et 10 milliards de DA pour les secondes. Pour les banques universelles et les établissements financiers, les niveaux de capital social minimal exigés restent inchangés par rapport à celui fixé à travers l’ancien règlement de 2018, soit respectivement 20 milliards de DA et 6,5 milliards de DA.
Ouverte aux personnes physiques et morales, la création de banques, d’établissements financiers, de succursales de banque et d’établissements financiers étrangers est soumise du reste à des exigences très strictes de conformité aux règles financières et bancaires, mais aussi de savoir-faire, de professionnalisme et d’honorabilité des actionnaires. Cependant, au-delà de la définition de ce nouveau cadre réglementaire, le nouveau texte de la Banque d’Algérie se veut surtout, de l’avis de certains acteurs de la place bancaire locale, comme un signal pour ouvrir la voie à la création de nouvelles banques et surtout à une plus forte implication des capitaux privés nationaux au développement de l’intermédiation bancaire. Un besoin que n’avait d’ailleurs pas manqué de mettre en évidence le chef de l’Etat lui-même et qui avait appelé à maintes reprises à l’ouverture de banques privées à capitaux nationaux. « L’économie nationale doit également s’appuyer sur le secteur privé, en s’autofinançant sans compter toujours sur les banques publiques », qui
continuent à assurer le financement de ce secteur « à hauteur de 85% », avait-il ainsi plaidé lors d’une rencontre avec les opérateurs économiques en novembre dernier. Selon le Président, les financements publics devraient ainsi venir en appoint aux fonds privés et la mise en place de banques privées nationales permettrait également de dépasser définitivement les contraintes de pénalisation d’actes de gestion liées à l’allocation de ressources publiques.
Des exigences pour garantir la solvabilité
Bien que rien ne l’interdit, la création de banques à capitaux privés nationaux continue à faire défaut depuis les scandales bancaires historiques d’El Khalifa Bank, BCIA, CA Bank, Union Bank et autres qui ont marqué le début années 2000. Pour l’économiste et ex-vice-gouverneur de la Banque d’Algérie, Djamel Benbelkacem, l’absence de banques à capitaux
privés nationaux est due cependant à « l’absence de prétendants pour investir sur le marché bancaire national en raison, vraisemblablement, des exigences réglementaires très élevées en ce domaine, notamment celles liées à la nature et au savoir-faire de l’actionnariat, ainsi qu’au niveau de capital minimum requis pour l’installation de banques et d’établissements financiers ». Des exigences qui sont toutefois « très justifiées pour garantir la solvabilité du système bancaire national et le préserver contre d’éventuelles crises, car les risques de faillites bancaires peuvent entraîner des conséquences très graves pour les déposants, les entreprises et l’ensemble de l’économie », précise en définitive notre interlocuteur.
R. A.