Avec le logiciel Pegasus, le Maroc et ses services de sécurité sont coupables de s’être adonnés à des activités illégales d’espionnage à des fins politiques contre l’Italie, la France et l’Espagne, ciblant de nombreux dirigeants européens, dont Emmanuel Macron, président français, Romano Prodi, ancien premier ministre italien et ancien membre de la commission européenne, et Pedro Sanchez, premier ministre espagnol.
C’est ce que confirme un rapport de la commission d’enquête diligentée par l’Union européenne pour mettre la lumière sur l’affaire Pegasus, selon les déclarations de son rapporteur, la libérale néerlandaise Sophie in ‘t Veld.
Dans la première ébauche de son rapport, qui doit faire encore l’objet d’amendements avant d’être soumis au vote en plénière, la commission d’enquête a non seulement confirmé les soupçons qui pèsent sur le Maroc dans cette affaire d’espionnage contre les gouvernements espagnol et français, mais aussi révélé le nom de l’ancien premier ministre italien Romano Prodi en tant que potentielle victime en raison de ses éventuels contacts avec des personnalités de haut niveau du Sahara occidental ou d’Algérie, a rapporté hier la presse espagnole.
«Les révélations de juillet 2021 sur le projet Pegasus ont montré un grand nombre de cibles en Espagne. Cependant, ils semblent avoir été ciblés par différents acteurs et pour différentes raisons. L’opinion générale est que les autorités marocaines ont attaqué le premier ministre Pedro Sánchez, la ministre de la Défense Margarita Robles et le ministre de l’Intérieur Fernando Grande Marlaska, à l’instar du cas du président français et des ministres du gouvernement», indique le texte du rapporteur.
Dans ce sillage, le rapport note qu' »en juin 2022, le Maroc a engagé une action en justice contre un journaliste espagnol pour avoir rendu compte de l’utilisation de Pegasus par le gouvernement marocain et les services de renseignement contre lui », faisant référence au journaliste d’El Confidencial, Ignacio Cembrero.
Hormis le cas du gouvernement français, la rapporteur révèle que le cas italien serait limité à l’ancien premier ministre et ancien membre de la commission européenne Romano Prodi qui, selon le rapport, « a été espionné avec Pegasus par les services secrets marocains ». Selon In ‘t Veld, Prodi serait « une cible intéressante » pour le Maroc au vu de son rôle d’ancien envoyé spécial de l’ONU pour le Sahel en raison de ses « éventuels contacts avec des personnalités de haut niveau du Sahara occidental ou d’Algérie ».
Le gouvernement espagnol rattrapé par l’affaire du mouvement catalan
La commission d’enquête du Parlement européen sur Pegasus pointe en outre le gouvernement espagnol dans l’espionnage du mouvement indépendantiste catalan, connu sous le nom de «CatalanGate».
« Il est généralement admis que la surveillance des cibles catalanes a été effectuée par les autorités espagnoles, principalement en relation avec le référendum d’indépendance du gouvernement espagnol du 1er octobre 2017 en Catalogne et les événements ultérieurs. C’était probablement le premier client de l’UE du groupe NSO», indique le texte de l’eurodéputée néerlandaise.
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«Une analyse détaillée des attaques montre un schéma clair. La plupart des attaques du « CatalanGate » coïncident et sont liées à des moments d’importance politique, tels que des procès contre des Catalans séparatistes, des réunions publiques et la communication avec les séparatistes catalans vivant hors d’Espagne. Une telle surveillance comprend, par exemple, des communications de l’avocat-client d’un séparatiste emprisonné à la veille de son procès, des contacts entre partenaires ou des communications concernant la prise de sièges au Parlement européen», explique l’eurodéputée Sophie in ‘t Veld.
Par Djamel Belbey