PAR BRAHIM AZIEZ
L’Automne était au rendez-vous cette année, surtout qu’au premier jour de la saison, selon la classification de l’automne dans l’hémisphère nord, a vu 44 wilayas au moins recevoir la pluie. Ces pluies ont été les bienvenues, aussi bien chez les agriculteurs et les céréaliers, que pour le commun des Algériens qui a connu, ces dernières années, des épisodes caniculaires ayant frappé le pays, avec des périodes de sécheresse plus ou moins longues. Ces premières pluies qui sont venues « à temps » auront été suivies par d’autres périodes pluvieuses qui auront particulièrement arrosé l’Est et le Centre du pays. Et la crainte qu’un nouvel épisode de stress hydrique frappe l’ouest du pays a commencé à germer dans les esprits. Fort heureusement, ce début d’année 2025 s’annonce plutôt prometteur, à en croire les bulletins météo qui prévoient des pluies sur toutes les régions du pays. C’est dire que le meilleur est à venir. Mais le présent n’est pas aussi sombre que par le passé pour cette région du pays qui a, de nombreuses années durant, subi les affres de la sécheresse. Du moins à la lecture du taux de remplissage des barrages qui donne un aperçu de cet optimisme.
Le taux national de remplissage des barrages reste disparate
Le taux de remplissage des barrages avait atteint, à la mi-janvier 2025, près de 35% au niveau national, « un volume appelé à augmenter considérablement grâce aux dernières précipitations, selon le ministre de l’Hydraulique, Taha Derbal. Un niveau de remplissage qui a légèrement progressé en ce début d’année 2025, comparativement à la même période en 2024 (34,96% contre 34,01%). Et les prévisions annoncent une augmentation supplémentaire de ce taux dans les jours à venir grâce aux précipitations attendues. Mais l’inégalité pluviométrique entre la région Est, plus favorablement arrosée, et les zones de l’Ouest et du Centre, confrontées à des déficits de pluie, est bien évidente. Face à cette situation, des initiatives, tels que le dessalement de l’eau de mer, de l’épuration des eaux usées, les forages et les transferts d’eau ont d’ores et déjà été mises en place pour tenter de rétablir un équilibre nécessaire à la durabilité de ces ressources vitales. En tout cas, le ministre de l’Hydraulique, Taha Derbal, s’est montré optimiste quant à l’évolution prochaine du taux de remplissage des barrages, affirmant que « ce taux pourrait considérablement augmenter dans les jours à venir grâce aux précipitations attendues ». Un optimisme renforcé par l’atteinte récente de la capacité maximale des barrages de Kissir, dans la wilaya de Jijel, et de Mexa, dans la wilaya d’El Tarf, illustrant les impacts positifs des dernières précipitations dans certaines régions du pays. Mais là aussi, les disparités dans le taux de remplissage des barrages entre les différentes régions du pays persistent. Tandis que l’Est bénéficie de conditions pluviométriques favorables, d’autres régions souffrent encore de réserves insuffisantes. Cette dynamique régionale se reflète clairement dans les
chiffres des dernières années. En 2024, l’Ouest avait enregistré une progression de ses réserves, atteignant un taux de remplissage de 43,76%, contre seulement 17,88% l’année précédente. Cette amélioration témoigne d’une intensité des précipitations l’année dernière. A l’inverse, l’Est a vu une légère baisse de son taux, passant de 60,12% en 2023 à 53,45% en 2024, en demeurant la région la plus arrosée. Cependant, les récentes pluies devraient compenser cette baisse. La situation reste particulièrement préoccupante pour le Centre, la région la plus vulnérable, où le taux de remplissage des barrages reste faible et stable à 16,80% en 2024, contre 16,96% en 2023. La Directrice de l’Agence nationale des
barrages et transferts (ANBT) révélait, récemment, que 5 barrages sont actuellement remplis à 100% à l’Est du pays. Toutefois, Mme Nadia Ouchar soulignait que cette situation n’est pas généralisée à l’ensemble du pays. A Chlef, par exemple, la sécheresse se fait cruellement sentir, avec un taux de remplissage des barrages ne dépassant pas 11,17%. En revanche, à l’Ouest, les résultats sont plus favorables, avec un taux de remplissage de 43,74%. Le Centre du pays connaît une stabilité relative, avec un taux de remplissage de 17,06%. La responsable à l’ANBT avait également mis en lumière les conditions climatiques plus favorables au Sud, grâce aux pluies abondantes qui ont marqué l’automne dernier. Un exemple marquant, celui du barrage de Djorf Torba, à Béchar, dont les réserves ont connu une hausse spectaculaire, passant de 11 à 15 millions de m3, puis à 247 millions de m3, faisant que le taux de remplissage de ce barrage atteigne les 88%.
Tlemcen, Sidi Bel Abbès, Aïn Témouchent, Saïda…
La situation est aussi disparate au niveau de l’Ouest du pays. Malgré un taux de remplissage régional relativement appréciable par rapport à 2023, la wilaya de Tlemcen reste particulièrement affectée par la persistance du stress hydrique qui compromet la production céréalière. Une situation que les céréaliculteurs voient comme une contrainte qui risque d’annihiler leurs efforts, surtout pour la zone sud de la wilaya qui est la plus touchée en raison de son climat aride et des gelées. D’autres régions de l’Ouest, comme Sidi Bel Abbès, Aïn Témouchent, Saïda ou encore Mascara subissent, elles aussi, les affres de la sécheresse. Pour Ali Kader, ancien cadre du ministère de l’Agriculture et ex-DSA de Sidi Bel Abbès, changement climatique ne rime pas forcément avec sécheresse en règle générale. « Pour le cas précis de notre pays, déjà connu par son aridité, ce changement provoque non seulement des sécheresses, mais est aussi à l’origine de pluies violentes, espacées et localisées avec souvent des dégâts aux cultures et aux installations », selon lui. Si pour le Sud, la solution est, d’après lui, toute trouvée avec l’utilisation de l’immense nappe albienne, il en est autrement pour les autres régions frappées de plein fouet par le manque de pluie, notamment l’Ouest, la steppe et les Hauts-Plateaux où les précipitations ont drastiquement régressé. Cela dit, pour le Nord et l’Est, les pluies intermittentes et les neiges, quoique loin des volumes habituels, maintiennent un semblant d’agriculture fragile, sans arriver à remplir les barrages.