Pourquoi il faut lire Baya d’Alice Kaplan ?

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Alice Kaplan était en tournée en Algérie pour présenter son ouvrage “Baya ou le grand vernissage” édité chez Barzakh. Le livre nous emporte aux prémices de la carrière de cette icone, l’exposition qui l’a dévoilée au monde à la galerie Maeght, à Paris, en novembre 1947 alors qu’elle n’avait que 16 ans.

Avant de parler de l’artiste, il faut saluer le travail de l’auteure.  Comment à partir d’un événement culturel, somme toute sans grande importance, l’auteure arrive à nous plonger le plus profondément possible dans cet événement, en l’occurrence le voyage de la jeune Baya à Paris.

L’environnement familial et social est décrit dans le moindre détail ainsi que la société française. Tous les préjugés qui ont cours en ce temps-là sont détricotés un par un sans indulgence. S’agissant d’une indigène au génie artistique naissant et bientôt éclatant, les préjugés coloniaux vont bon train. Et l’art n’échappe pas aux préjugés. Bien plus, il peut être l’occasion de les justifier. Alice Kaplan maîtrise son sujet ainsi que l’art d’écrire. Ses analyses n’en sont que plus pertinentes.

Baya, une adolescente à peine âgée de 16 ans et travaillant dans une ferme se retrouve à Paris en compagnie d’Henri Matisse, Georges Braque, André Breton, Albert Camus… Cette histoire tout le monde la connait. Mais Alice Kaplan va restituer l’environnement de cet évènement. Elle nous relate comment Baya a vécu cet épisode de sa vie avec aisance et dignité.

À travers le livre, on découvre le travail de recherche et d’investigation de l’auteure. Elle a rencontré ses petits-enfants, sa belle-fille et même les personnes avec qui travaillait Baya à la ferme florale d’Henri Farges à Fort-de-l’Eau.

Alice Kaplan dit avoir consulté beaucoup d’archives notamment la presse française de cette époque qui n’était pas exploitée. Baya a été lynché dans cette presse coloniale. Comment une indigène pouvait être une artiste peintre? Pourtant Baya, malgré son jeune âge, avait un sens inné des proportions et autres qualités qui faisait d’elle une artiste complète.

Marguerite Caminat, la femme qui a accueilli Baya lors de son voyage a remis à Alice Kaplan des archives non exploitées, ce qui a permis à l’auteure d’apporter des éléments nouveaux.

Alice Kaplan réussit à nous transmettre tout ce qui fait du voyage de Baya un moment important dans l’histoire de l’art algérien. Ce voyage est l’occasion d’une description phénoménologique de l’Algérie colonie française et de la France coloniale.