Pr Djenouhat : «Il y a divergence au sein même du comité de suivi pour la vaccination des enfants»

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/La question de la vaccination des enfants fait débat depuis un moment. Le Professeur Djenouhat, président de la société algérienne d’immunologie, nous apprend qu’elle devrait être tranchée dans les tout prochains jours, mais avoue qu’elle ne fait pas l’unanimité au sein même du comité scientifique chargé du suivi du Covid-19.

Nous assistons depuis quelques jours à une hausse considérable du nombre de contaminations au Covid-19, quel est l’état des lieux ?

Il y a eu beaucoup d’hésitation de la part des experts pour parler d’une quatrième vague de Covid-19, nous avons d‘abord parlé d’une augmentation des cas de contaminations mais maintenant on ne peut plus nier que nous sommes en pleine quatrième vague surtout que les services des hôpitaux commencent à être pleins. Reste à savoir quand est-ce qu’elle va atteindre son pic ? Peut-être dans deux ou trois semaines. Reste aussi à savoir comment va être l’aspect de cette vague. Va-t-elle être aussi meurtrière que la 3e de juillet-août ou bien va-t-elle se limiter à une hausse des cas de contamination.

Sommes-nous prêts à faire face à cette 4e vague et éviter que le scénario de juillet ne se reproduise ?

Certes, nous sommes plus prêts que nous ne l’étions lors de la 3e vague, mais il y a toujours un mais. Il est difficile d’être sûr que tout fonctionne au sein de nos hôpitaux car il y a l’aspect gestion de chaque établissement qui est à prendre en considération. Pour ce qui est de l’hospitalisation, pour le moment, nous allons revenir à l’ancien plan qui consiste à dédier des hôpitaux du Centre-Est et Ouest au Covid et élargir vers d’autres structures, selon le besoin. Je crois que la situation sera gérable si le nombre de contaminations se limite à 500/600 cas par jour mais dans le cas ou l’on franchira la barre des 1000 cas, ça sera compliqué.

L’Algérie affiche un taux de vaccination de 27%, un taux relativement bas, pourquoi les autorités n’instaurent pas des mesures incitatives comme dans les autres pays au monde ?

La réticence des Algériens face aux vaccins est due à deux facteurs principaux. D’abord, il y a le facteur humain, le profil de l’Algérien fait qu’il est influencé par les contenus des réseaux sociaux surtout français et durant cette pandémie, nous avons constaté que sur une dizaine d’informations anti vax mises sur les réseaux sociaux seules les fausses informations sont relayées en force et partagées, ce qui alimente les craintes de l’Algérien face au vaccin anti Covid.  Il y a aussi le facteur du pass sanitaire que l’on n’arrive pas à instaurer du moins dans les espaces fermés à l’instar des écoles car il faut savoir que ce sont les enfants qui ont été à l’origine de cette hausse des contaminations. On peut dire que cette vague est celle de l’école. Je salue d’ailleurs l’initiative du ministre de l’Education nationale qui a su agir au bon moment car les écoles sont devenues de véritables clusters Covid. Il faut que les autorités s’impliquent davantage sur l’élargissement du pass sanitaire, ce n’est que de cette manière que l’on arrivera à rehausser le taux de vaccination.

De nombreux pays à l’image de la France ont opté pour la vaccination des enfants, qu’en est-il de l’Algérie ? La question a-t-elle été abordée par le comité scientifique chargé du suivi du Covid ?

La décision de faire vacciner les enfants ou non sera prise dans quelques jours. Il y a beaucoup de divergences entre les experts du comité scientifique, il y a un clan qui ne voit pas la nécessité de faire vacciner les enfants car ils ne font pas de complications suite à leurs contaminations et un clan, dont je fais partie, qui la soutient, non seulement pour protéger les enfants mais aussi pour freiner la propagation du virus car nous sommes actuellement en pleine deuxième vague du Delta. Il ne faut pas attendre qu’on atteigne les 70% de vaccination espérés pour passer aux enfants.

Dans le cas où la tutelle se prononcera en faveur de la vaccination des enfants, comment envisagez-vous de convaincre les parents ?

Nous n’allons pas les convaincre. Il ne faut pas oublier que l’absence de vaccination chez les enfants sanctionne nos jeunes athlètes auxquels on exige un pass sanitaire pour pouvoir pratiquer leur discipline mais sans que leur vaccination ne soit possible. Il ne faut pas oublier qu’un vaccin a une double vocation, il y a d’abord l’atteinte de l’immunité collective mais il y a aussi l’immunité individuelle et on ne peut priver les gens de cela.

W. S.