Par Djilali B.
La région du Sahel est devenue la destination des groupes terroristes globalement défaits dans la région du Moyen-Orient. L’instabilité politique, la précarité, le manque de formation et de moyens des forces de sécurité et la porosité des frontières ont été parmi les facteurs qui ont déterminé le choix du terrorisme international des pays de la région comme point de chute. Le terrain était déjà préparé par les versions locales du terrorisme avec des groupes comme Ansar Eddine au Mali, ou Boko Haram au Nigeria. Avec des allégeances aux groupes d’envergure internationale comme Al Qaîda, ou le plus récent Etat islamique (Daech), ces groupuscules prendront une autre dimension et feront peser une menace de déstabilisation de tous les pays de la région.
Le constat a été fait par le groupe de réflexion australien, l’Institute for Economics and Peace qui a conclu dans son dernier rapport (activité 2024) que le Sahel reste l’épicentre du terrorisme pour la deuxième année consécutive, avec plus de la moitié des décès dans le monde en 2024, est-il indiqué dans le dernier Indice mondial du terrorisme. Cette appréciation s’appuie sur les macabres statistiques des victimes du terrorisme, selon les pays. Il ressort ainsi que sur les 7555 victimes du terrorisme dans le monde en 2024, 3885 ont été enregistrées au Sahel, soit 51% d’après l’Indice mondial du terrorisme élaboré par le groupe de réflexion.
L’indice, qui concerne un panel de 163 pays, repose sur des facteurs comme le nombre d’attaques, de morts, de blessés et d’otages. Selon cette étude de l’IEP, parmi les dix pays les plus impactés par le terrorisme en 2024, cinq se trouvent dans la région du Sahel.
Le Burkina Faso, pays le plus impacté
En tête, le Burkina Faso, le Mali et le Niger sont parmi les plus touchés par ce phénomène violent de manière constante depuis 2017, selon l’Indice. «Cela souligne un déplacement géographique de l’épicentre du terrorisme loin du Moyen-Orient vers le Sahel ces deux dernières années», a relevé le rapport. «Le Burkina Faso reste le pays le plus touché pour la deuxième année consécutive avec 1532 morts en 2024, contre 1935 en 2023. Le Mali est passé de la troisième à la quatrième position avec 604 morts en 2024. Il est suivi du Niger qui a enregistré la plus forte hausse de décès au niveau mondial», a indiqué le document. En cause, selon la même source, deux groupes terroristes responsables de la majorité des attaques : le Groupe de soutien à l’islam (JNIM) et l’Etat islamique au Sahel (EIS). Malgré leurs divergences, notamment dans leurs objectifs, les deux groupes, affiliés à deux cartels, Al Qaîda et Daech, opposés, ils semblent cohabiter dans cette immensité désertique, et rarement des affrontements entre eux ont été signalés.
Par ailleurs, le rapport fait référence à l’ONG Acled (Armed Conflict Location and Event Data), qui s’est spécialisée dans le recensement des victimes des conflits dans le monde, qui a établi des bilans plus lourds dans les pays du Sahel expliquant les raisons par les bouleversements politiques provoqués par les putschs et les choix stratégiques des nouveaux maîtres de Bamako, Niamey et Ouagadougou, qui ont rompu leur coopération avec l’ancienne puissance coloniale, et l’Occident de manière générale, pour s’allier à la Russie et la Chine et le divorce avec la Cedeao. Des changements, selon l’étude de l’Acled, qui ont ouvert la voie à l’extension des activités terroristes davantage vers tout le territoire de l’Afrique de l’Ouest.
«En 2024, les pays du centre du Sahel, à savoir le Burkina Faso, le Mali et le Niger, ont continué de subir des niveaux élevés de violence», selon la même source. Ces pays sont confrontés aux attentats terroristes qui ne cessent de s’étendre grâce aux activités du GSIM et de l’Etat islamique dans le Grand Sahara (EIGS). En 2024, les attaques du GSIM et de l’EIGS ont été plus intenses et plus meurtrières en ciblant des éléments des services de sécurité et des civils ainsi que des institutions ou infrastructures publiques, comme à Bamako au Mali ou Niamey au Niger.
L’approche du groupe de réflexion semble avoir peu fait cas des politiques et stratégies sécuritaires adoptées par les pays cités, l’intensification de la traque des groupes terroristes par les armées de ces pays, mais aussi la politique de la main tendue aux terroristes issus de ces pays pour abandonner les activités criminelles contre leur réinsertion sociale, entre autres, pour se repentir. I ll y a sans doute aussi l’évolution des sociétés et leur prise de conscience des dangers de l’extrémisme violent, surtout le terrorisme transnational.