Par M. Mansour
La Société nationale des transports ferroviaires (SNTF) s’apprête à déployer un programme d’acquisition inédit, visant à transformer en profondeur le réseau ferroviaire national d’ici 2035. Doté d’une enveloppe de 378 milliards DA, soit près de 3 milliards de dollars, ce projet monumental reflète une ambition nationale forte pour moderniser les infrastructures ferroviaires, intensifier les connexions inter-wilayas, et répondre aux attentes croissantes d’une société en mouvement.
Avec le soutien des pouvoirs publics, qui ont validé un financement par étapes, la SNTF compte sur ce plan pour renforcer la position du rail comme axe central du développement national. Cela devra passer par l’augmentation de la capacité de transport de marchandises, l’optimisation du service aux passagers et l’intégration des mesures de sécurité renforcées. Dans la première phase de ce projet, une somme de 138 milliards DA est allouée pour l’acquisition de 400 nouveaux wagons de transport de voyageurs et de locomotives. Le directeur du contrôle de gestion à la SNTF, Sofiane Aïbeche, explique que cette étape initiale inclut un appel d’offres international pour six (6) autorails et douze (12) locomotives polyvalentes, adaptées tant au transport de passagers qu’à celui des marchandises. «Ces acquisitions vont offrir une flexibilité essentielle pour répondre aux besoins croissants de transport, d’autant plus que la demande en fret ferroviaire a fortement augmenté ces dernières années», explique-t-il dans un entretien accordé à l’APS, soulignant que l’Etat affiche une volonté claire de faire du rail un pilier du développement socio-économique et environnemental de notre pays.
La rocade Nord, un axe majeur du transport ferroviaire
Les investissements publics, massifs et sans précédent, reflètent, d’ailleurs, cet engagement en soutenant des projets d’envergure tels que les lignes minières et la réhabilitation de la rocade Nord, héritée de la période coloniale, qui reliera Annaba à Tlemcen. Une fois achevée, cette rocade modernisée deviendra un axe majeur du transport ferroviaire algérien, connectant les villes côtières à travers une infrastructure à la fois robuste et performante. En définitive, cette approche permet non seulement de répondre à l’évolution des besoins, mais aussi d’accroître la résilience du réseau face à l’augmentation des flux de voyageurs et de marchandises.
C’est d’ailleurs dans cette optique que le Directeur général adjoint de la SNTF, Réda Laïb, avait souligné en octobre dernier qu’après une période de stagnation qui aura duré 10 ans, le volume transporté a bondi de 700 000 tonnes, pour atteindre 5,2 millions de tonnes en 2023. Pour l’année 2024, la SNTF vise les 5,6 jusqu’à 6 millions de tonnes, un objectif qui devrait être facilité par la mise en service des lignes vers les gisements miniers de Gara Djebilet et de Bled El Hadba. A plus long terme, ces nouvelles infrastructures devraient permettre de transporter jusqu’à 100 millions de tonnes d’ici 2040, une capacité qui fait de ces lignes des projets de premier ordre pour l’Algérie. «Ces connexions sont essentielles pour répondre aux besoins économiques et industriels du pays, et notre société se prépare activement à honorer cet engagement», a-t-il affirmé.
Le transport de passagers au cœur des priorités
Au-delà du transport de marchandises, la société place également le développement du transport de passagers au cœur de ses priorités, avec plusieurs lignes stratégiques en construction, à l’instar de celles de Touggourt-Hassi Messaoud et El Bayadh-Mecheria qui desserviront des zones proches du Sahara, contribuant ainsi au désenclavement du Grand Sud. Cette expansion est essentielle non seulement pour renforcer le dynamisme économique de ces régions, mais aussi pour garantir un accès équitable aux infrastructures modernes pour l’ensemble des citoyens.
M. Aïbeche a également annoncé le lancement d’une étude visant la réhabilitation intégrale de huit grandes gares situées à Alger, Sidi Bel Abbès, Souk Ahras, Skikda, Annaba, Chlef et Aïn Témouchent, dans le cadre d’un programme ambitieux de rénovation de 82 gares à travers le pays. Parallèlement, la SNTF a déjà mis en place un service de réservation électronique pour certaines lignes, dont l’axe Alger-Oran, qui sera progressivement étendu afin de faciliter l’organisation des déplacements des passagers. Afin de simplifier l’accès aux services de transport et de réduire les files d’attente, la société prévoit également d’installer des distributeurs automatiques de billets dans ses gares, une initiative en ligne avec la politique nationale de soutien à l’industrie locale.
Un billet unique pour différents moyens de transport
Dans le cadre de la transformation numérique, la SNTF travaille également à la mise en place d’un billet unique, un projet qui permettra aux voyageurs d’utiliser différents moyens de transport public, comme le métro, le tramway et les bus, avec un seul billet. Ce système, actuellement en développement avec l’Autorité organisatrice des transports urbains (AOTU), vise à simplifier les déplacements urbains et à encourager l’utilisation des transports en commun dans la capitale.
Concernant la sécurité à bord des trains, M. Aïbeche a souligné que le renforcement de cet aspect demeure prioritaire pour la SNTF, notamment face aux incidents de vandalisme, aux caillassages, et parfois même aux agressions ciblant le personnel. Selon Réda Laïb, les dégâts matériels sont considérables : parmi les 17 autorails diesel récemment acquis, seuls quatre sont encore en service, les autres ayant été endommagés lors de passages à niveau. Pour remédier à ce phénomène, la SNTF a décidé de mettre en place des caméras de surveillance sur les sections les plus fréquentées, en particulier autour d’Alger. Des installations qui devraient permettre de réduire significativement les actes de malveillance.
Ainsi, grâce à ce projet ambitieux, la SNTF s’engage à transformer le paysage du transport ferroviaire, d’ici la prochaine décennie, tout en consolidant l’économie nationale et en améliorant la mobilité des citoyens.