Par Abdellah B.
«Trop d’impôt tue l’impôt», c’est ce qui se passe actuellement sur le marché énergétique européen avec des impositions fiscales jugées «exorbitantes» par les grands acteurs. Ces derniers se lancent à la recherche de nouveaux horizons où le système fiscal est plus clément ; le marché algérien figure comme une destination attirante et envisageable pour de nombreux acteurs.
Cepsa et Repsol gèlent des investissements en Espagne
En Espagne, de grands groupes comme Cepsa et Repsol annoncent le gel des investissements dans les énergies nouvelles et renouvelables en raison d’un taux d’imposition fiscale jugé «exorbitant», d’après le journal espagnol «El Periodico». Selon ce dernier, le maintien du gouvernement espagnol d’une taxe élevée sur les entreprises énergétiques a mis de grands acteurs dans l’embarras et risque de freiner «un investissement de 16 milliards d’euros que le secteur compte investir dans la décarbonnation jusqu’en 2030, dont 4,5 milliards d’euros pour les deux groupes Cepsa et Repsol», indique le quotidien espagnol.
Selon la même source, les deux grands groupes espagnols envisagent déjà d’investir dans des projets en dehors de l’Espagne dans le domaine de l’hydrogène, notamment en Algérie, au Portugal ou encore en Amérique latine. «Il faudrait donc ralentir les investissements prévus en Espagne et donner la priorité aux projets d’hydrogène vert dans d’autres pays», rapporte «El Periodico», citant les responsables de Cepsa. Dans ce sens, la deuxième compagnie pétrolière espagnole planifie déjà son entrée sur le marché algérien de l’hydrogène. Elle a signé, à la mi octobre, un mémorandum d’entente avec Sonatrach pour la mise en place d’un projet intégré de production d’hydrogène vert exportable sur le marché espagnol.
Pour sa part, Repsol, partenaire de Sonatrach dans l’un des plus grands gisements gaziers du pays, Reggane nord en l’occurrence, a déjà «rejeté» la démarche du gouvernement espagnol visant à la reconduction de la taxe sur les groupes énergétiques. Le groupe a gelé un projet de 1,5 milliard d’euros en Espagne et envisage de mettre en œuvre ses projets en dehors du territoire espagnol dans l’hydrogène vert. Autrement dit, Repsol pourrait suivre la démarche de son compatriote Cepsa en tournant ses regards vers le sud où les conditions d’investissement dans les énergies nouvelles et renouvelables, comme d’ailleurs les énergies fossiles, bénéficient d’un système fiscal «assez souple». Selon le journal espagnol qui a rapporté l’information, le PDG de Repsol, Josu Jon Imaz, avait déjà indiqué que l’entreprise avait «d’autres alternatives où elle pourrait avoir une activité internationale dans ses activités industrielles. Repsol maintient ainsi en suspens des investissements de près de 1500 millions d’euros qui pourraient affecter des projets du portefeuille du groupe en Euskadi, Tarragone (Catalogne) et Carthagène (Murcie)».
Harbour engage un bras de fer en Grande-Bretagne
Par ailleurs, les acteurs énergétiques espagnols ne sont pas les seuls à être confrontés à une telle situation. Au nord de l’Europe, un bras de fer a été également engagé par les producteurs d’hydrocarbures contre les mesures fiscales de la Grande-Bretagne, qui envisagent un retrait massif. C’est le cas de Harbour Energy qui brandit la menace de délocaliser son siège social aux Etats-Unis, tout en continuant à diversifier son portefeuille d’investissements, notamment en Afrique comme signe de protestation contre la hausse de la taxe. Ce dernier a déjà acquis cette année les actifs de WinterShall DEA en Algérie, en Egypte et en Libye et compte élargir sa présence sur le marché énergétique africain dans le cadre d’une coopération avec Sonatrach. Cette démarche s’explique par les énormes opportunités d’investissement conjuguées à une imposition fiscale aussi «souple». L’objectif assigné par le groupe britannique en se rapprochant de Sonatrach est celui de «renforcer la collaboration non seulement sur le marché algérien, mais aussi sur le marché africain qui offre d’importantes opportunités», d’après la patronne de Harbour Energy, Linda Cook.
En fait, l’amélioration de l’attractivité du marché énergétique passe inéluctablement par l’assouplissement du système fiscal, ce que d’ailleurs l’Algérie a bien compris ces dernières années, en travaillant davantage sur ce volet. La réforme de la loi sur les hydrocarbures a joué un rôle crucial dans l’encouragement des grands acteurs énergétiques. Son adoption en 2019 a attiré les regards des grands acteurs du secteur énergétique. ExxonMobil, Chevron et cinq autres groupes vont marquer leur entrée sur le marché algérien d’ici la fin de l’année en cours. TotalEnergies, Eni, Repsol et Cepsa et d’autres groupes envisagent de signer de nouveaux contrats avec Sonatrach, et ce, avant la fin de l’année en cours. Pour ces derniers, l’objectif est de renforcer leur présence sur le marché algérien des hydrocarbures. Les énergies fossiles ne sont pas le seul secteur qui est dans le viseur des investisseurs étrangers, européens en particulier. Les énergies nouvelles et renouvelables, comme l’hydrogène sont également au centre d’intérêt des grands acteurs énergétiques qui ont déjà manifesté leur disponibilité pour des projets de partenariat avec Sonatrach dans ce domaine.