La présidence turque semblait opter pour une désescalade hier dans la crise ayant abouti à la menace d’expulsion de dix diplomates occidentaux qui s’étaient mobilisés en faveur du philanthrope Osman Kavala, emprisonné depuis quatre ans sans jugement. Dans un message sur Twitter, la plupart des ambassades concernées ont affirmé agir en « conformité avec la Convention de Vienne et son article 41 » qui encadre les relations diplomatiques et interdit toute ingérence dans les affaires intérieures du pays hôte. Une déclaration « accueillie positivement » par le président turc Recep Tayyip Erdogan, selon l’agence de presse officielle Anadolu citant « des sources à la présidence », tandis que le gouvernement se réunissait. Ce premier signe de détente a aussitôt provoqué une remontée de la livre turque qui avait ouvert la journée par une nouvelle chute. Les dix ambassadeurs – Etats-Unis, Canada, France, Finlande, Danemark, Allemagne, Pays-Bas, Nouvelle-Zélande, Norvège et Suède – avaient été accusés d' »indécence » par le chef de l’Etat pour avoir appelé dans un communiqué commun le 18 octobre à un « règlement juste et rapide de l’affaire » Osman Kavala, privé de liberté depuis octobre 2017. M. Erdogan avait annoncé samedi avoir ordonné l’expulsion « au plus vite » des dix diplomates, sans cependant que cette annonce soit suivie d’une notification officielle aux Etats concernés. Une telle mesure risquait d’entrer directement en collision avec deux rendez-vous internationaux pour M. Erdogan en fin de semaine : le sommet samedi à Rome du G20, le groupe des pays les plus industrialisés, puis la conférence sur le climat de l’ONU qui s’ouvre dimanche en Écosse. « Le moment choisi est épouvantable s’il veut réparer ses relations avec ses alliés européens et américains », disait à l’AFP Timur Kuran, un professeur d’économie et de sciences politiques à l’université de Duke (Etats-Unis).
Diversion
« Tout indique que son entourage, à commencer par son ministre des Affaires étrangères, a tenté de l’en dissuader », affirmait-il aussi. La Turquie est notamment en froid avec Washington sur les contrats d’avions de chasse F-35 – payés et non livrés – et une commande de pièces pour les F-16. Ainsi que sur l’achat d’un système de défense russe S-400 malgré son appartenance à l’Otan. Or M. Erdogan espère rencontrer le président américain Joe Biden à Rome en marge du G20. Pour les observateurs, il s’agissait surtout de « faire diversion », la Turquie étant en proie à une crise économique, avec un taux officiel d’inflation frôlant les 20% et une monnaie en chute libre d’environ 25% depuis le début de l’année.
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Le Mali expulse le représentant de la Cédéao
Le Mali a déclaré « persona non grata » le représentant spécial de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) Hamidou Boly, « au vu de ses agissements incompatibles avec son statut », a annoncé hier le ministère malien des Affaires étrangères. Le diplomate, de nationalité burkinabè, « a 72 heures pour quitter le territoire national », explique le ministère dans un communiqué, ajoutant que la décision lui a été notifiée dans la matinée. Le texte ne détaille pas les faits précis reprochés à M. Boly, en poste à Bamako depuis juillet 2019. Cette décision d’expulsion intervient « après plusieurs mises en garde adressées à l’intéressé à travers sa hiérarchie », indique simplement le ministère qui « réitère la disponibilité du gouvernement (malien) à maintenir le dialogue avec la Cédéao et à œuvrer ensemble pour la réussite de la transition ». L’annonce du gouvernement malien a lieu dans un contexte diplomatique délicat. Le président ghanéen Nana Akufo-Addo, président en exercice de la conférence des chefs d’Etat de la Cédéao, en visite le 17 octobre au Mali, a délivré un « message ferme » sur la tenue d’élections en février, avait dit à l’AFP un membre de sa délégation.