Un journal français l’affirmait en 1945 : Jean Michel Aphatie n’a rien inventé

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Zine Haddadi

Si en France la comparaison faite par Jean Michel Aphatie entre les crimes de la France coloniale en Algérie et ceux de l’Allemagne nazie durant la Seconde Guerre a choqué, l’éditorialiste n’est pas le premier à avoir osé un tel rapprochement.

En 1945, le journal «Ohé partisans», fondé par le groupe de FTP [Franc-Tireurs et Partisans] comparaît déjà les massacres en Algérie à ceux d’Oradour-sur-Glane commis par les troupes nazies.

«Multipliez par dix les restrictions que nous connaissons ici, et par vingt la pourriture vichyniste, vous avez la situation en Afrique du Nord», écrivait le journal au mois d’août 1945, soit trois mois après la fin de la Seconde Guerre mondiale quand la douleur des crimes nazis était encore vive et sa plaie récente.

Jean Michel Aphatie n’a donc rien inventé. Les horreurs de la France coloniale étaient bien connues d’une partie de la société française, bien plus qu’elles ne le sont aujourd’hui.

En effet, la société française d’aujourd’hui est choquée par l’idée que la France coloniale ait pu perpétrer des crimes aussi barbares que ceux subis par le peuple français de la part des nazis durant la Deuxième Guerre mondiale.

Le journaliste Jean Michel Aphatie a déclaré sur RTL que le massacre horrible d’Oradour-sur-Glane perpétré par l’armée allemande a été inspiré par les crimes de la France coloniale qui en a commis des centaines de son genre durant sa conquête de l’Algérie.

Une vérité qui fait mal

Des propos qui reposent sur des faits historiques avérés, mais qui ont pourtant suscité une vive polémique au sein de la sphère médiatique française tournée très à droite ces dernières années et qui ne supporte naturellement pas qu’on remette en cause la colonisation française.

La polémique était telle que la radio RTL a dû signifier à Jean Michel Aphatie une demande de mise en retrait temporaire que l’éditorialiste a volontairement accepté tout en refusant de présenter ses excuses estimant qu’il n’a dit que des vérités qui méritaient d’être dites. «Il y a encore beaucoup de choses à dire sur le sujet. Elles seront dites», assure le journaliste.

Les propos de Jean Michel Aphatie ont, d’ailleurs, été appuyés par l’historien Alain Ruscio qui a documenté les crimes coloniaux français en Algérie dans un travail de recherche académique.

Jean Michel Aphatie est sorti de son silence pour réagir à sa mise à l’écart par RTL. Dans une publication sur le réseau social X, le journaliste a déploré la situation de la liberté d’expression en France.

«J’ai été suspendu professionnellement, ce qui ne m’était jamais arrivé. Pendant ce temps, Eric Zemmour a été promu. La liberté d’expression, beaucoup portée en écharpe ces derniers temps, s’apparente aussi à une vaste rigolade», a-t-il regretté.

Jean Michel Aphatie s’en pris ouvertement aux médias du magnat Vincent Bolloré qui ont été les fers de lance de la polémique le concernant.

Edwy Plenel soutient Jean Michel Aphatie

«J’ai été roulé dans le mépris et l’injure par le Bolloréland. Cyril Hanouna m’a insulté. C’est un réflexe. Pascal Praud m’a insulté. C’est corporate. «Le Figaro» «a rejoint le Bolloréland», a écrit Aphatie.

Face à la polémique, l’éditorialiste a également reçu le soutien d’Edwy Plenel, grand journaliste français qui, sur le plateau de TV5 Monde, est allé à sa défense.

«Jean-Michel Aphatie a énoncé des vérités de fait sur les Oradour-sur-Glane commis par la France en Algérie», a déclaré Edwy Plenel.

Pour Edwy Plenel, «le laboratoire des crimes européens a été la colonisation». Le fondateur de Médiapart a cité d’autres cas de la barbarie de la colonisation française, comme les crimes subis par les Kanaks en Nouvelle Calédonie.

Il a appelé à un regard lucide des faits historiques de la France. «Nous sommes dans un moment où il faut être au-dessus de nous-mêmes. Nous avons rendez-vous avec notre humanité», a ajouté Edwy Plenel.

Edwy Plenel ne trouve pas exagérée la comparaison faite par Jean Michel Aphatie entre les crimes coloniaux et ceux des nazis. «Le nazisme est issu du colonialisme. Les principaux acteurs des crimes nazis au sein de la Wehrmacht avaient participé à des crimes coloniaux et dans d’autres colonies allemandes en Afrique. Des crimes de guerre, y compris un crime de génocide», a-t-il rappelé.