Par R. Akli
Au-delà du besoin immédiat d’améliorer les conditions de déplacement à l’étranger pour les citoyens algériens, la décision entérinée en décembre dernier de relever significativement le montant de l’allocation touristique tend à servir également de déclic, voire de point de départ, pour l’organisation à terme d’un marché officiel des devises à travers l’amélioration de l’accès au change pour les particuliers. Combinée à l’ouverture en cours des premiers bureaux de change par la Banque d’Algérie et à la revalorisation graduelle de la valeur du dinar, l’augmentation du droit de change au titre des voyages à l’étranger ouvre en effet la voie à la mise en place d’un réseau sécurisé et organisé d’accès à certains besoins en devises jusqu’ici essentiellement satisfaits par le seul biais du marché parallèle. Si elle ne peut effectivement tenir lieu de panacée pour éliminer complètement ce dernier, cette nouvelle démarche, qui s’appuie sur des mesures économiques et financières ciblées et réalistes, devrait permettre d’induire à terme une meilleure canalisation d’une certaine demande de devises vers les circuits officiels, tout en réduisant l’impact très négatif de la prolifération du change informel sur l’économie du pays et sur son image à l’intérieur comme à l’extérieur. D’à peine 100 euros depuis son institution en vertu d’une instruction de la Banque centrale datant de près de 28 ans, l’allocation touristique passe ainsi d’un coup à 750 euros par voyageur algérien majeur et à 300 euros par mineur, suite aux directives du président de la République. Un montant plus que septuplé, ce qui ne manquera sans doute pas d’induire un certain reflux de demandes de devises vers le marché officiel, d’autant plus que celui informel devient de plus en plus imprévisible et affiche des cours pour le moins prohibitifs depuis quelques semaines. Bien qu’il ne soit accessible qu’une seule fois par an, le droit de change autorisé pour les nationaux résidents au titre des dépenses liées à leurs voyages touristiques ou professionnels à l’étranger ne constitue pas moins une manne en devises relativement importante dont le négoce profitait jusqu’ici essentiellement aux tenants du marché noir. Avec un différentiel de plus 100 euros entre les taux de change officiel et informel actuellement en vigueur et la plus-value importante qu’offre ainsi le montant de 750 euros d’allocation touristique, les voyageurs algériens arbitreront à n’en pas douter en faveur des nouveaux bureaux de change pour financer une bonne partie des frais en devises liés à leurs déplacements à l’étranger. Des bureaux de change qui commencent pour la première fois à voir le jour en Algérie, les tout premiers ayant été officiellement installés récemment par la Banque centrale au niveau de l’aéroport et de la gare maritime d’Alger pour pratiquer dans un premier temps les opérations de change liées à l’allocation touristique. Un point de départ pour susciter surtout l’ouverture d’autres bureaux de change par des intermédiaires privés, les opérations de change liées aux dépenses des particuliers pour leurs voyages, soins et études à l’étranger pouvant constituer un filon non négligeable pour rentabiliser cette nouvelle activité et y attirer ainsi de nouveaux opérateurs. Dès lors, le déploiement progressif d’un vaste réseau national de points de change officiel devra permettre l’émergence d’un marché des devises plus accessible au large public, à l’instar de ceux qui existent dans des pays voisins ou autres et qui permettent, faut-il le dire, de réduire effectivement la part de l’informel. Un objectif d’autant plus réaliste qu’en parallèle à l’installation de ces bureaux de change et à l’amélioration de l’accès au change au titre de l’allocation voyage, les pouvoirs publics entreprennent également de soutenir la valeur du dinar après plus d’une décennie de chute libre, l’enjeu en ce domaine étant de réduire le gap entre les parités officielle et informelle de la monnaie nationale. Un enjeu qui passe surtout par l’amélioration des performances de l’économie nationale et la diversification des sources de revenus du pays en devises fortes.