PAR NABIL M.
Dans le cadre de sa nouvelle stratégie portuaire à l’horizon 2035, l’Algérie s’engage résolument dans la modernisation et l’extension de ses infrastructures portuaires, avec pour ambition de devenir un hub logistique régional et intermodal.
Cette vision ambitieuse est portée par le groupe Serport, dont le PDG, M. Abdelkrim Ghezal, a détaillé les contours lors de son passage hier sur les ondes de la Radio nationale. « Nous avons mis en place une nouvelle stratégie de développement et de gestion portuaire à l’horizon 2035 pour construire de nouvelles infrastructures à l’extérieur des tissus urbains », a-t-il déclaré.
Selon lui, l’Algérie entend rompre avec les limites structurelles de ses ports actuels, souvent confrontés à des problèmes de tirants d’eau insuffisants, de linéaires de quais sous-dimensionnés et de connexions ferroviaires et routières limitées. « Toutes les problématiques que connaissent les ports algériens sont liés à leur optimisation structurelle », a-t-il expliqué, soulignant que, pour y remédier, le pays mise sur la construction de nouveaux ports « hyperconnectés, décarbonés et intelligents », intégrant les dernières technologies de numérisation.
Cette transformation s’inscrit, selon lui, dans une logique de compétitivité régionale. « Nous nous projetons dans la modernité pour faire de l’Algérie un hub logistique, régional et intermodal, car la concurrence dans ce domaine est féroce », a-t-il souligné.
Le nouveau port centre sera installé à Boumerdès
Détaillant la nouvelle stratégie portuaire, le PDG du groupe Serport a révélé le grand projet à l’étude pour la construction d’un nouveau port central, pour désengorger les ports existants et renforcer la desserte du centre du pays. « Pour le nouveau port centre, nous avons prévu son installation entre Cherchell et Boumerdès, mais je pense que l’option de la wilaya de Boumerdès l’emporte, avec une probabilité de sa construction dans la région de Dellys ou Cap Djinet », a-t-il révélé.
Dans ce même sillage, le premier responsable de Serport a expliqué que la stratégie 2035 repose sur trois grands corridors logistiques, détaillant deux d’entre eux, à savoir le corridor central, qui est en lien avec la route transsaharienne et le réseau ferroviaire centre. « Ce corridor en lien avec la route transsaharienne, reliera Alger à Tamanrasset et ouvrira l’accès à cinq pays africains jusqu’à Lagos, en plus de se connecter au corridor ferroviaire qui va d’Alger à Tamanrasset », a-t-il expliqué, soulignant que « l’Algérie a l’atout de disposer d’infrastructures de base des plus modernes en Afrique ».
Le même responsable a également parlé du corridor Est qui sera centré sur le port de Djen Djen, voué à devenir un hub méditerranéen de premier plan après l’achèvement des travaux de son extension. « Ce port, situé à proximité des grandes routes maritimes reliant l’Asie à l’Europe et aux États-Unis via le canal de Suez, verra sa capacité doubler avec sa nouvelle extension d’une capacité de 2 millions d’EVP (équivalents 20 pieds) et 10 millions de tonnes de marchandises, avec un tirant d’eau de 20 mètres », a précisé M. Ghezal.
Vers des ports « Green and Smart »
Outre l’enjeu majeur de cette stratégie, le même responsable a mis en avant la transition énergétique, indiquant que l’Algérie veut rattraper son retard, et reste consciente des enjeux environnementaux. Il a révélé à ce sujet que « le groupe Serport travaille en partenariat avec Naftal et Sonatrach pour intégrer des solutions énergétiques propres ». « Nous collaborons avec l’Organisation maritime internationale pour développer des ports « Green and Smart », a-t-il ajouté.
Selon lui, l’Algérie, premier producteur africain de GNL, ambitionne de devenir un leader dans l’approvisionnement en carburants propres pour les navires. « Les ports doivent s’aligner sur les normes internationales en matière d’énergie verte, solaire et autres sources renouvelables », a-t-il insisté.
Par ailleurs, M. Ghezal a affirmé que l’un des objectifs clés de cette stratégie est de résorber les délais d’attente des navires, souvent pénalisés par des infrastructures inadaptées. « Actuellement, nous visons à réduire le nombre de navires en attente à moins de six par port », a-t-il indiqué, soulignant que seuls les ports d’Annaba, Djen Djen, Oran et Skikda disposent aujourd’hui de quais à fort tirant d’eau, nécessaires pour les navires de dernière génération.
Il a aussi expliqué que les performances de manutention sont également en hausse, avec le port de Béjaïa, géré par un opérateur singapourien, qui atteint désormais 20 conteneurs à l’heure, contre 10 dans les autres ports. Celui d’Oran, équipé de nouveaux portiques dès juillet 2024, devrait atteindre 30 conteneurs à l’heure. « Avec les nouveaux terminaux de Djen Djen et Oran, nous rivaliserons avec les meilleurs ports de la région », a-t-il affirmé.