Par Zine Haddadi
En France, où la moindre déclaration ou décision des autorités algériennes est scrutée, les propos tenus par le président de la République Abdelmadjid Tebboune lors de son interview avec la presse nationale ont tout naturellement suscité des réactions tant chez les autorités françaises que dans la presse de l’Hexagone.
Le président Tebboune a déclaré samedi que le président français Emmanuel Macron était son seul interlocuteur côté français.
Des propos perçus comme «un bon signal» par la porte-parole du gouvernement français, Sophie Primas, intervenue dans la presse, hier.
«Nous sommes déterminés à retrouver avec l’Algérie des relations normales», assure la voix officielle du gouvernement Bayrou. Une déclaration qui contraste avec les déclarations hostiles tenues récemment par deux membres du gouvernement, à savoir Bruno Retailleau et Gérald Darmanin.
Sophie Primas ajoute que les déclarations du président Tebboune vont permettre de renouer le contact entre les deux pays.
«J’ai entendu ce matin que le président Tebboune avait fait un petit signe vis-à-vis d’Emmanuel Macron. C’est très bien. Voilà une façon de renouer le dialogue et d’échanger sur les sujets sensibles», a-t-elle déclaré.
Pour sa part, l’ancien ambassadeur de France aux Etats-Unis, Gérard Araud, a qualifié de «sagesse» les propos du président Tebboune qui a affirmé privilégier Macron comme unique interlocuteur dans les discussions entre l’Algérie et la France.
«Voilà de la sagesse. Evitons une escalade qui ne mènerait nulle part et qui ne servirait que les ambitions personnelles d’un ministre», a écrit Gérard Araud sur le réseau social X, ciblant par la même occasion la méthode Retailleau.
Du côté de la presse française, les retours sont plutôt positifs : «Confiance», «optimisme», «apaisement», sont entre autres les éléments de langage utilisés par les différents médias français à l’heure de commenter les propos du président Tebboune sur les relations algéro-françaises.
Message bien compris
«Le Président algérien tente de calmer le jeu», a titré le «Nouvel Observateur». Le journal de gauche «l’Humanité» a mis en avant le ton positif du discours du président Tebboune. «Le président Tebboune joue l’apaisement et appelle à un dialogue», tel a été le titre de l’article de «l’Huma».
CNews, l’une des chaînes de Vincent Bolloré qui a été très hostile envers l’Algérie ces derniers mois, a préféré retenir que «le Président algérien se montre optimiste».
Sur son site, la radio RTL, qui a récemment suspendu le journaliste Jean Michel Aphatie pour sa comparaison des crimes coloniaux commis par la France en Algérie à ceux commis par les nazis contre un village français durant la Deuxième Guerre mondiale, a relevé dans son titre que «Abdelmadjid Tebboune garde confiance en Emmanuel Macron».
Le magazine «Le Point» estime que le président «Abdelmadjid Tebboune joue la carte de l’apaisement», tandis que la chaîne publique TV5 Monde a noté «l’appel à la diplomatie du président Tebboune».
Le message du président Tebboune a visiblement été bien reçu en France. Le règlement d’un contentieux «monté de toutes pièces», pour reprendre les termes choisis par Abdelmadjid Tebboune, devra se régler entre les Présidents des deux pays. «Deux Etats indépendants, une puissance européenne et une puissance africaine, et on a deux Présidents qui travaillent ensemble, tout le reste ne nous concerne pas», avait, d’ailleurs, déclaré le président Tebboune samedi face à la presse algérienne.
La balle est désormais dans le jardin de l’Elysée. Le président Macron, qui a déclaré récemment que les accords de 1968 étaient de son seul ressort, se voit tendre une perche venue d’Alger pour le pousser à se débarrasser des discours de haine, de la logique de bras de fer et de rapport de force dans laquelle le traînent ses ministres de droite en cette deuxième moitié de son dernier mandat à la tête de la France.
Les Retailleau, Darmanin, les yeux rivés vers la présidentielle de 2027 et vers l’électorat de l’extrême droite font de l’Algérie le tremplin parfait pour atteindre leurs objectifs personnels au détriment des relations algéro-françaises.