Constats de la cour des comptes sur les impayés bancaires : Rompre le cycle des créances douteuses

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Constats de la cour des comptes sur les impayés bancaires : Rompre le cycle des créances douteuses

PAR R. AKLI

Les banques publiques qui assurent l’essentiel du financement de l’économie nationale font
souvent face à l’accumulation de créances impayées qui altèrent la qualité de leurs portefeuilles et les empêchent d’améliorer leur mode de gouvernance et leur rentabilité.

Une faiblesse structurelle à laquelle l’Etat actionnaire des six principales banques de la place tente désormais d’apporter des réponses concrètes, en misant à la fois sur l’accélération de la mise en œuvre du processus de digitalisation bancaire et en préparant l’ouverture du capital social de deux banques à la participation privée. Le crédit populaire d’Algérie (CPA) et la banque de développement local (BDL), en l’occurrence.

Objet d’un audit rigoureux de la cour des comptes, cette dernière, à l’instar sans doute des autres banques étatiques, affiche toutefois un passif incommodant de créances non performantes, c’est-à-dire de crédits déjà accordés et dont les remboursements sont soit non performants, soit définitivement compromis. « Du point de vue prudentiel, la banque de développement local (BDL) a enregistré à fin décembre 2021, un volume de créances non performantes d’un montant de 364,29 milliards de dinars, représentant 33,5% de l’encours total brut des crédits à la clientèle », fait ressortir ainsi le rapport annuel de la cour des comptes pour l’exercice 2023. Cette catégorie de créances, note l’instance en charge du contrôle a posteriori de la gestion de l’argent public, « est composée pour deux tiers d’impayés », la banque, précise-t-elle, n’ayant recouvré « qu’une infime partie de ces impayés, d’où l’incidence négative sur sa situation financière et ses résultats d’exploitation ».

La cour indique notamment que les encours de crédit accordés aux dispositifs d’emplois
aidés et aux entreprises privés affichent des taux élevés d’impayés, respectivement de 70,88% et 18,87% des encours correspondants à fin 2021. De façon plus générale et en vertu des règles prudentielles, souligne-t-elle, « les créances compromises du secteur privé, dont le recouvrement est considéré comme compromis et qui constituent des contentieux complexes préjudiciables à la banque, représentent un peu plus de 30% de l’ensemble des engagements sur ce secteur » durant la période considérée.

Tout en mettant ainsi en lumière le poids des impayés bancaires, issus surtout de la gestion de l’activité crédit dans le secteur bancaire étatique durant la décennie précédente, la cour des comptes recommande notamment de « développer davantage le métier de recouvrement des créances », à travers des mesures portant surtout sur « le renforcement de l’organisation et des procédures internes en matière de gestion et de suivi des créances « l’accélération de l’automatisation des tâches et des pratiques de recouvrement des créances ».

Des axes de réformes pour le moins essentiel pour améliorer la gouvernance bancaire et qui commencent déjà à connaître un début de mise en pratique, les banques publiques entreprenant de plus en plus l’assainissement de leurs portefeuilles depuis l’année dernière.

De fait, selon les données récentes de la banque d’Algérie (BA), le rythme de croissance des mauvaises créances détenues par les banques, « continue, pour la troisième année consécutive, son ralentissement », ce qui dénote d’une réelle amélioration de leurs indicateurs de rentabilité et de solvabilité. Le rythme de croissance des créances bancaires non performantes, souligne en ce cens la BA dans son dernier rapport annuel, n’a crû que de 4,7% en 2022 contre 7,9% en 2021 et 16,4% en 2020.

Une évolution notable pour rompre à terme avec le cycle d’accumulation des créances douteuses et permettre in fine l’instauration d’une gouvernance bancaire moins sujette aux interférences politico-bureaucratiques.

R. A