Inflation, PIB, réévaluation du dinar et agriculture : Les annonces du président Tebboune sous la loupe des experts

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Inflation, augmentation des salaires, réévaluation du dinar et agriculture : les économistes Nabil Djemaâ et Brahim Guendouzi reviennent sur les mesures annoncées récemment par le président Tebboune pour faire de l’Algérie un pays émergent. Ils offrent une perspective éclairante sur les implications des projets futurs du chef de l’Etat.

Les annonces du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, lors de sa dernière entrevue avec la presse nationale, continuent de susciter le débat une semaine après. Les mesures prévues pour contrer l’inflation galopante, ainsi que l’engagement à augmenter graduellement les salaires d’ici 2026/2027, attirent l’intérêt des experts. L’attention est également portée sur ses déclarations concernant la réévaluation de la valeur du dinar, ainsi que la stimulation de la croissance économique grâce au renforcement prévu du secteur agricole, ou encore l’intensification des investissements avec près de 6000 projets déjà enregistrés auprès de l’Agence algérienne de promotion de l’investissement (AAPI). C’est dans ce contexte que les deux économistes se sont prononcés sur ces mesures annoncées, mettant en évidence le potentiel existant, mais également les défis à relever pour tenir ces engagements.

Les voyants sont au vert

Intervenant sur les ondes de la radio nationale jeudi, les deux économistes se sont exprimés sur la faisabilité des annonces du président Tebboune, à la lumière de l’état actuel de l’économie nationale. A cet égard, M. Djemaâ a souligné que «tous les indicateurs macroéconomiques étaient au vert». Selon lui, cette évaluation trouve confirmation dans les rapports émanant de toutes les institutions financières internationales, ce qui pourrait inciter les investisseurs étrangers à s’engager davantage dans le pays.

Toujours concernant la fiabilité des statistiques nationales disponibles, le calcul des indicateurs globaux de l’économie nationale, comme les comptes nationaux et la comptabilité nationale, se fait selon la méthodologie du système comptable des Nations unies de 2008, explique M. Guendouzi, soulignant que les éventuels problèmes qui peuvent être rencontrés dans ce domaine sont généralement imputables à la collecte des données sur le terrain, plutôt qu’aux techniques de calcul elles-mêmes. Concernant l’inflation et la balance des paiements, il explique que les données fournies sont fiables, tout en mettant en avant le fait que le solde courant est positif pour la troisième année consécutive, générant des réserves de change équivalentes à 80 milliards de dollars.

 Un PIB à 400 milliards de dollars

En ce qui concerne les déclarations du président de la République annonçant un doublement du Produit intérieur brut (PIB) du pays à 400 milliards de dollars d’ici 2026, au lieu des 230 milliards actuels, M. Djemaâ a insisté sur la nécessité de renforcer la production nationale par le biais de la libération de l’investissement. Soulignant que la moitié des 6000 projets d’investissement ont été lancés, notamment dans les secteurs de l’agriculture, de l’industriel, dans le secteur pharmaceutique et commercial, l’expert a mis en lumière l’importance de maîtriser les quatre phases de l’investissement (lancement, maturité, croissance, déclin) grâce à une bonne gouvernance. Il a également plaidé en faveur d’une simplification et d’une facilitation d’accès au financement. «Si le financement des investissements est entravé, l’objectif des 400 milliards de dollars de PIB ne sera pas atteint», a-t-il expliqué, affirmant que les projets stratégiques, notamment dans le domaine agricole, étaient susceptibles de générer des recettes par le biais des exportations. «C’est pourquoi l’Etat a décidé de les financer à hauteur de 90%», a-t-il lancé.

De son côté, M. Guendouzi a souligné l’importance de l’acte d’investir pour un pays qui aspire à l’émergence, en mettant l’accent sur la nécessité de résoudre les problèmes de gouvernance et de gestion en urgence, tout en maintenant l’inflation à un taux ne dépassant pas 4,2%. A cela s’ajoute un élément fondamental dans le fonctionnement de l’économie nationale, à savoir la stabilisation des marchés internationaux du pétrole. Et de poursuivre en mettant l’accent sur l’importance de mener à bien les investissements structurels entrepris par l’Etat dans les secteurs minier, des énergies renouvelables, hydraulique et autres, en prenant en considération l’impact du marché du travail et les forces actives sur les domaines d’activité.

 Atténuation de l’inflation

Concernant l’épineuse question de l’atténuation de l’inflation, les deux experts ont passé en revue les déclarations du chef de l’Etat prévoyant une diminution de l’inflation de 8 à 4%. Pour commencer, l’expert Brahim Guendouzi a identifié les principales causes de l’inflation en Algérie, qui, selon lui, est principalement causée par l’importation, la faiblesse de la production et les problèmes de distribution. Pour inverser cette tendance, il recommande une gestion proactive des liquidités, conjuguée à une amélioration de la production et une flexibilité du taux de change.

Dans le même ordre d’idées, Nabil Djemaâ a noté que le manque de contrôle de la masse monétaire au cours de la dernière décennie a exacerbé l’inflation, en particulier après la dévaluation du dinar. Il a insisté sur la nécessité de recourir aux outils de contrôle monétaire et la régulation des importations, avec pour objectif de les ramener à 400 millions de dollars par an.

 Réévaluation du dinar

Pour ce qui est de la réévaluation de la monnaie nationale, M. Djemaâ a estimé que cette mesure sera bénéfique pour le pays, dans la mesure où elle permettra d’avoir un dinar fort et une économie à la mesure de la force de sa monnaie. Une économie qui, selon lui, sera «tournée vers l’exportation, avec des produits qualitatifs et concurrentiels».

M.M.