LMD ou système classique : La communauté universitaire partagée

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LMD ou système classique : La communauté universitaire partagée

Présidant, mardi, un conseil des ministres, le premier de cette rentrée sociale, le président de la République a pris une série de mesures importantes, dont celle d' »élaborer une étude globale et intégrée sur la faisabilité d’un retour flexible au système de licence classique en remplacement du système LMD ». Une éventualité qui, à chaud, a suscité des avis partagés au sein de la communauté universitaire.

PAR S. LESLOUS

Interrogé à ce sujet, Dr Said Chemakh, enseignant et responsable du master d’étude linguistique amazighe à l’université de Tizi Ouzou, a tenu avant tout à souligner qu' »il s’agit pour le moment d’une demande d’étude et non d’une décision tranchée ».

Ce qu’il considère comme positif, dans le sens où ça prendra du temps et ça permettra d’en débattre. Seulement, pour lui, la balance penche déjà du côté d’une réforme du système LMD plutôt que d’un retour au système classique.

Le système LDM présente, dit-il, certes, plusieurs failles mais aussi des avantages non négligeables qui plaident, ajoute-t-il, plutôt pour « une réforme à l’intérieur du système LMD ».

« Le système LMD est, dans son architecture, en harmonie avec les standards internationaux établis lors du processus de Bologne et adopté à la fois par les pays européens et les pays américains, et même par la Russie et la Turquie, ce qui facilite grandement aux étudiants algériens la poursuite d’études plus poussées à l’international », a cité, en guise de premier avantage, M. Chemakh, soulignant qu’un éventuel retour au système classique impliquerait un retour aux équivalences, ce procédé qui n’est pas seulement chronophage mais qui risque de conduire à une espèce d' »isolement » de l’université algérienne en matière de reconnaissance des diplômes.

Mais pour cet universitaire qui a déjà eu à enseigner dans le cadre du système classique puis aujourd’hui dans le cadre du LMD, les avantages sont plusieurs. « La deuxième réforme de 2016 avait déjà apporté certains correctifs, mais la loi de juillet 2023 a permis un bond remarquable, notamment avec l’instauration du système de compensation semestriel qui permet l’admission sous condition », explique-t-il.

Selon d’autres enseignants universitaires, ce système de compensation permet en effet de diminuer les redoublements et les grandes déperditions enregistrées notamment durant la première année des filières scientifiques. « Autrement dit, tous les systèmes présentent des failles.

A mon avis, l’on ferait mieux de garder l’architecture du système LMD, et donc ses avantages, et apporter des réformes à l’intérieur en reprenant par exemple les contenus des modules du système classique et les adapter au système LMD », propose-t-il.

Pour Dr Belkacem Boukhrouf, professeur d’économie à l’université de Tizi Ouzou, le plus important est que « les décisions stratégiques de ce genre doivent surtout obéir à des réflexions transversales et systémiques qui impliquent les acteurs agissant aussi bien au sein de l’université qu’au sein des secteurs auxquels elle est connectée ».

Dr Boukhrouf estime qu' »il s’agit d’une problématique qui engage l’avenir de la nation entière » et qu’il ne faut surtout pas « considérer le seul aspect financier ».Il y a, dit-il, « à penser profondément à la place que tient la recherche et l’enseignement supérieur dans la structure de notre économie et notre modèle social pour pouvoir ensuite envisager sa réforme ». Pour lui, « sans cela, les mêmes procédés ne produiront que l’échec ».

Ourida Naït Athmane, étudiante en master 2 en communication, estime que le système LMD permet, certes, un gain de temps appréciable dans la durée de la formation universitaire, offre un éventail de spécialités très larges, de la souplesse et de la facilité, mais, déplore-t-elle, il n’arme pas suffisamment l’étudiant de sorte à affronter la vie professionnelle.

« Il est vrai que le système LMD permet de gagner du temps sur la durée de la formation et répond dans la forme aux standards internationaux, mais il s’agit là d’un avantage qui profite aux étudiants qui envisagent de poursuivre leurs études à l’étranger. Or l’université algérienne forme logiquement d’abord des étudiants pour le marché du travail algérien », explique Ourida, qui dit préférer « une formation plus longue mais qui offre la qualité qui permet à l’étudiant algérien de se faire une place sur le marché du travail ».

« J’estime que le système LMD n’est pas adapté à la réalité algérienne. A titre d’exemple, l’environnement ne permet pas à tous les étudiants d’effectuer les stages nécessaires dans le cadre de ce système », a-t-elle souligné, considérant que « le système LMD privilégie la quantité au détriment de la qualité des diplômes délivrés ». « Des milliers de diplômés sortent chaque année de l’université, mais combien d’entre eux trouvent un emploi dans leur domaine ? », s’interroget-elle.

S. L.