Sahara occidental : Albares-Sanchez, double langage

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Le gouvernement espagnol adopte sinon un langage «double» du moins contradictoire au sujet du dossier du Sahara occidental. À 48 heures d’intervalle du soutien à une «solution politique» conforme à la charte et aux résolutions des Nations unies, telle que défendue devant la 77e AG de l’ONU par le chef de l’exécutif espagnol Pedro Sanchez, la position est passée à celle de soutien au plan d’autonomie du Makhzen, rejeté par les Sahraouis, comme l’a soutenu son chef de la diplomatie, José Manuel Albares.

Sanchez élude le plan d’autonomie

Jeudi, lors d’un discours devant la 77e session de l’AG des Nations unies, le premier ministre Sanchez a déclaré que «l’Espagne soutient une solution politique, mutuellement acceptable, dans le cadre de la charte et des résolutions des Nations unies». Il souligne aussi son soutien au travail du médiateur de l’ONU, Staffan de Mistura. Cette déclaration qui n’a pas fait allusion au plan d’autonomie a été interprétée, tant en Espagne qu’en Algérie et au Sahara occidental, comme un changement de position, ou tout au moins un début de changement par rapport à son revirement diplomatique exprimé dans la déclaration du 7 avril lors de sa visite à Rabat. Son propos tenu lors d’une interview qui a précédé sa déclaration devant l’AG de l’ONU, où il a affirmé son soutien au «droit des peuples à décider librement de ce qu’ils veulent pour leur avenir», avait même renforcé cette conviction que l’Espagne avait changé de position par rapport au conflit du Sahara occidental. Même s’il ne l’a pas réitéré lors de son discours devant la 77e session de l’AG des Nations unies.

Albares rassure le Makhzen

Or 48 heures après, Jose Manuel Albares, son ministre des AE, a fait une sortie médiatique et assuré dans une interview à «La Razon» que «le pacte avec Rabat est en vigueur et est en train de se réaliser». Ce dernier vient réitérer l’attachement de l’Espagne au contenu de la lettre envoyée par Sanchez le 14 mars au roi du Maroc dans laquelle il annonce son soutien à la thèse marocaine au Sahara occidental. Albares affirmera même que le pacte de Rabat est une «feuille de route qui va totalement être déroulée». Mais on peut se demander comment l’Espagne compte aller jusqu’au bout de cette «feuille de route» alors que son Premier ministre ne prend même pas la peine de l’évoquer devant les Nations unies.

Il est clair qu’à travers cet entretien d’Albares accordé à un journal de la droite, le gouvernement socialiste de Sanchez n’avait qu’un seul objectif : rassurer Rabat.

La contradiction est flagrante entre les deux thèses, celle défendue par Sanchez qui s’inscrit dans la droite ligne des résolutions de l’ONU et de l’UE, et celle prônée par Albares qui, le moins qu’on puisse dire, contrevient à la légalité internationale.

Même l’interviewer de «la Razon» relève la contradiction et pose la question à ce sujet. Mais Albares tente de se justifier en soulignant que l’objectif principal du gouvernement de Madrid est de «préserver l’amitié entre l’Espagne et le Maroc» et que la position de l’Espagne à l’égard du Sahara occidental est «très claire», c’est-à-dire de rechercher «une solution politique mutuellement acceptable dans le cadre des Nations unies».

Il est clair aussi qu’en plus de rassurer le Maroc sur ses intentions de maintenir le pacte avec le Makhzen, ce qu’il a fait expliquer par Albares, le gouvernement espagnol voulait aussi en éludant la question de l’autonomie devant l’ONU abaisser la tension en adoptant un langage conciliant avec l’Algérie, un pays stratégique et principal fournisseur de gaz naturel au plus fort de la crise énergétique de l’Espagne. Mais tout compte fait, le gouvernement Sanchez n’en est pas à une contradiction près.

A. R.