De Mitterrand à Sanchez : Tebboune évoque des «gestes inamicaux» envers l’Algérie

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Tebboune répond aux questions du Figaro

Par Amar R.

Le président Tebboune a indiqué que l’Algérie est en train de reconquérir son espace diplomatique naturel, précisant que tous les pays qui traitent avec l’Algérie reconnaissent en elle une source de stabilité et qu’elle est un pays exportateur de stabilité.

Lors d’un entretien avec des journalistes algériens diffusé vendredi soir, le président Tebboune a soutenu en effet que l’Algérie est dans une dynamique de reconquête de son espace naturel, après avoir dépassé «le pire des accidents de parcours qu’on ait eu» durant la décennie noire.

«Une forte diplomatie dépend d’une économie forte, d’une stabilité sécuritaire et une opinion favorable», a-t-il souligné.

Les acquis de la diplomatie algérienne

En rappelant que «tous les pays qui traitent avec l’Algérie reconnaissent en elle une source de stabilité et qu’elle est un pays exportateur de stabilité», le président Tebboune a cité, entre autres acquis diplomatiques de l’Algérie, le sommet arabe tenu en novembre 2022 à Alger.

«Le sommet arabe était le seul qui a pris la dimension particulière, alors que tous les précédents sont passés inaperçus», a-t-il affirmé, poursuivant que tout évènement organisé par l’Algérie revêt une valeur spéciale aussi bien au plan africain qu’européen ou méditerranéen, grâce à «l’histoire de l’Algérie, digne de respect».

Et ce, avant de déplorer le «faux pas» de la décennie noire, mais en soulignant qu’«il n’est plus facile de déstabiliser actuellement l’Algérie».

 L’Algérie n’oublie pas ses amis

En abordant la visite en Algérie de la Première ministre d’Italie, Mme Meloni, le chef de l’Etat a d’abord rappelé que «les relations algéro-italiennes remontent au tout début de notre indépendance, et se renforcent de plus en plus sur les plans de la confiance ou de l’économie», en précisant que les deux pays sont liés par des traités de bon voisinage et de partenariat stratégique.

Le président de la République a souligné que «l’Italie est le seul pays qui a soutenu l’Algérie pendant sa décennie noire», en rappelant qu’à cette époque «tous les pays ont versé leur colère sur l’Algérie, y compris les pays frères – il y avait des terroristes de 15 nationalités – qui voulaient faire disparaître cette Algérie envers laquelle il y avait un complexe au vu de son histoire et de sa lutte, à l’exception de l’Italie».

«Aussi, nous avons été victimes d’un embargo aérien de la part de l’Europe sur instigation du président Mitterrand, et il n’y avait que les avions italiens qui atterrissaient chez nous, en dépit des pressions exercées sur ce pays», dit-il.

Et «lorsque le FMI nous étouffait avec ses conditionnalités, l’Italie nous a accordé une ligne de crédit de 13 milliards de dollars», dira en outre Abdelmadjid Tebboune.

«L’Algérie n’est pas revancharde, mais elle n’oublie jamais ses amis», a-t-il déclaré, avant de poursuivre : «Ces bonnes relations ne sont pas pour plaire à d’autres pays européens qui continuent de croire naïvement que l’Algérie est une chasse gardée. Mais l’Algérie est libre de ses relations internationales et économiques».

 Espagne, «pas de nouveau dans les relations»

Avec l’Espagne, «il n’y a pas de nouveau dans les relations», a révélé le président de la République, qui a déploré qu’elles se soient détériorées entre les deux pays, en raison du fait que l’Espagne a fait «un faux pas» en s’alignant sur les positions du royaume du Maroc dans le conflit du Sahara occidental.

Cependant, le président Tebboune a réitéré que «nos relations avec le peuple espagnol sont restées excellentes jusqu’à ce jour» et «notre respect est total envers le roi (Felipe VI)», et avec d’autres acteurs du pays.

«Le peuple espagnol n’est pas à blâmer», a-t-il déclaré.

Le traité de coopération et de bon voisinage avec l’Espagne «n’est pas annulé, mais est gelé», a-t-il déclaré, en imputant cette mesure à «un acte inamical» de la part du gouvernement Sanchez.

Ukraine, «l’Algérie, un pays «neutre»

S’agissant d’une éventuelle mission de bons offices dans la guerre en Ukraine, durant sa visite en Russie, prévue au mois de mai, le président Tebboune s’est contenté de dire que «la diplomatie algérienne est souterraine, et nous ne parlons des choses que si elles deviennent visibles», ajoutant qu’«une décision a été prise avec le MAE de rouvrir cette semaine notre ambassade à Kiev (Ukraine) qui avait été fermée pour des raisons sécuritaires».

«Nous avons des relations normales avec l’Ukraine, alors que celles avec la Russie sont connues de tout le monde», a-t-il enchaîné.

Etats-Unis, «ils savent que l’Algérie est un pays influent»

Concernant les relations algéro-américaines, le président de la République a affirmé que les Etats-Unis qui sont «une grande puissance» savent que l’Algérie est un «pays influent» en Afrique, dans le monde arabe et en Méditerranée.

«Que les Etats-Unis sachent que nous sommes un pays ami, qui est politiquement et idéologiquement non aligné», a poursuivi le président de la République, rappelant que les Etats-Unis avaient soutenu l’Algérie et son peuple après l’indépendance.

«Le sous-développement est notre seul ennemi», a martelé M. Tebboune.

«L’Europe doit savoir aussi, malgré la fausse propagande, que toutes les démocraties européennes sont nées en Algérie, qu’il s’agisse de la révolution portugaise, grecque ou espagnole. Donc, notre pays a une influence au niveau de la Méditerranée», a-t-il insisté.

 Sahel, justesse de l’approche algérienne

Evoquant les aides algériennes destinées aux pays africains, le président a souligné :

«Nous nous sommes engagés devant nos frères au Mali à financer certains projets économiques, notamment dans le nord du pays, à l’instar de Kidal et Gao, pour les aider à construire des structures éducatives et sanitaires, des projets d’alimentation des foyers en eau potable et autres.»

A propos de la crise libyenne aussi, le président Tebboune a affirmé que toutes les «anciennes méthodes testées avaient prouvé leur échec» et attesté de la justesse de l’approche algérienne en matière de règlement de la crise dans ce pays voisin. Une approche basée sur une solution décidée par les Libyens eux-mêmes, à travers l’organisation d’élections et le choix de leurs représentants.

S’agissant de la question du Sahara occidental, le président Tebboune a rappelé que le président sahraoui Brahim Ghali figurait parmi les personnalités ayant pris part aux pourparlers avec la partie marocaine, lesquels étaient sur le point d’aboutir au règlement de cette question durant le règne du roi Hassan II, mais les choses se sont compliquées par la suite.

A.R.