Évolution de la valeur du dinar : Ce que disent les chiffres de la banque d’Algérie

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PAR R. AKLI

Après un long cycle de dépréciation amorcé dans le sillage du contre-choc pétrolier de la mi-2014, la valeur de la monnaie nationale repart progressivement à la hausse depuis l’année dernière, sous l’effet de l’amélioration des fondamentaux de l’économie nationale, mais également de la volonté des pouvoirs publics de lui redonner du pouvoir d’achat pour contrecarrer les pressions inflationnistes. Sur le marché interbancaire des changes, soit le marché officiel des devises, la monnaie nationale ouvrait hier à 134,5 DA pour un dollar et à 145,7 DA pour un euro.

A titre de comparaison, son cours de fin de période était de 138,8 DA pour un dollar et de 157 DA pour un euro à fin 2021, tel que le font ressortir les chiffres de la banque centrale à qui échoit la prérogative de gérer la politique de change en fonction des évolutions du tableau de bord de l’économie nationale. Plus indiqués pour mesurer les tendances d’évolution plus ou moins longues du taux de change du dinar vis-à-vis des principales devises fortes, son cours moyen annuel calculé par la banque d’Algérie (BA) rend plus clairement compte de l’inversion de la courbe de sa valeur à partir de l’année dernière où il a rompu de manière franche avec sa longue dégringolade des années « pétrole bas et planche à billets ». De 80,5 DA pour un dollar en 2014, le cours moyen annuel du dinar a ainsi franchi pour la première fois le seuil des 100 DA pour un dollar en 2015, poursuivant dès lors sa tendance accélérée vers le bas jusqu’à atteindre un pic de dépréciation à 142 DA vis-à-vis de la devise américaine en 2022. Une véritable érosion du pouvoir d’achat de la monnaie nationale, amorcée dans des circonstances qualifiées d' »illogiques » par le président de la République, lors de sa récente entrevue télévisée avec des représentants de médias nationaux. Des circonstances passées, où il avait été décidé d’actionner « la planche à billets pour des tirages et des injections inconsidérées de fonds », a-t-il tenu à rappeler. Des années de crise pétrolière aiguë, aggravée ainsi par une politique d’expansion des dépenses publiques et des importations sur fond de recours abusifs aux financements non conventionnels, ce qui n’a pas manqué d’entraîner la parité du dinar vers le bas.

Rattraper le pouvoir d’achat perdu du dinar

Un choix de politique budgétaire dont « nous continuons encore aujourd’hui à subir les répercussions », a déploré le chef de l’Etat, tout en réitérant sa décision de poursuivre désormais les efforts visant à rattraper le pouvoir d’achat perdu du dinar. « Il est nécessaire de soutenir et de réévaluer la valeur du dinar », a-t-il ainsi signifié. L’objectif affiché en ce cens est d’œuvrer progressivement pour refaire gagner à la monnaie nationale jusqu’à 30% de sa valeur, en mettant en œuvre, selon les explications du président de la République, à la fois des mesures économiques de maîtrise des importations et des dépenses publiques, de développement de productions locales substitutives à l’importation, mais aussi de réajustement de la parité de la monnaie nationale par le biais d’outils de gestion de taux de change dont dispose la BA. Celle-ci pourrait ainsi agir sur le taux de change effectif nominal (TCEN) du dinar fixé au jour le jour sur le marché interbancaire des changes où est confrontée régulièrement une offre de devises dont elle est l’unique source avec une demande provenant des banques commerciales et destinée à couvrir les besoins en financement du commerce extérieur.

La banque d’Algérie peut disposer ainsi de marges de manœuvre pour ajuster la valeur du dinar, dans la limite de ce que suppose sa politique de change qui a pour objectif premier le
maintien du taux de change effectif réel du dinar à niveau d’équilibre déterminé par les fondamentaux de l’économie nationale que sont notamment le prix du pétrole et les différentiels d’inflation et de productivité entre l’Algérie et ses principaux partenaires commerciaux. Installée désormais sur une nouvelle trajectoire de réévaluation en vue de faire baisser la fièvre inflationniste qui continue à sévir, la parité du dinar vis-à-vis des monnaies-clés est appelée ainsi à s’améliorer progressivement en suivant l’amélioration engagée des performances économiques du pays, sachant qu’une monnaie forte suppose avant tout une économie forte pour lui conférer et lui garantir une contre-valeur effective sur le long terme.

R. A.