Il suspend les partis politiques. Mali : l’isolement de Assimi Goita se précise

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Dénonciation de l'accord de paix au Mali : L'UE rejette l'option de Goita

Par Djilali B.

La gestion du Mali par les autorités de transition semble avoir atteint ses limites. Semble dans l’impasse. L’équipe à Assimi Goita n’arrive plus à trouver de solutions aux problèmes du pays. Pour preuve, au lieu d’organiser l’élection présidentielle, selon le calendrier déterminé par la junte au pouvoir, fin mars dernier, le scrutin est renvoyé sans raison. Les partis et associations qui ont réclamé le retour à l’ordre constitutionnel ont été frappés, depuis, d’une interdiction d’activer.

S’appuyant ainsi sur le décret relatif à la suspension des activités des partis politiques et des activités à caractère politique des associations, la haute autorité de la communication a demandé aux médias de boycotter les activités des partis et des associations. La HAC demande ainsi à tous les médias (radios, télévisions, journaux écrits et en ligne) «d’arrêter toute publication ou diffusion des activités des partis politiques et des activités à caractère politique des associations».

Après avoir été soutenus par la classe politique et les médias, les putschistes maliens entendent désormais les exclure de l’équation politique qu’ils entendent mettre en œuvre. Ce qui prolonge davantage l’opacité de la démarche des maîtres de Bamako qui n’ont, depuis leur prise du pouvoir, il y a deux ans, décliné aucune vision pour sortir le pays de la complexe crise qui le mine. En effet, comme option politique, la démarche des putschistes se limite à un dialogue inclusif où les interlocuteurs sont sélectionnés, alors que des personnalités ont refusé l’offre, considérant que le pilote de cette entreprise est lui-même contesté parce que n’étant pas, selon par exemple l’imam Dicko, un personnage fédérateur.

Ainsi donc, la plupart des formations politiques et des associations, y compris celle des élèves et étudiants, sont interdites d’expression pour ne laisser que la poignée de partis et quelques journaux appuyer et faire l’éloge de la vision politique de la junte qui ne veut pas céder le pouvoir.

Si les partis politiques ayant appelé un premier temps à des manifestations ont préféré différer leur action de protestation pour éviter les débordements, les étudiants et les journalistes ont rejeté les décisions des autorités.

La Maison de la Presse, association qui regroupe les professionnels des médias, a rejeté jeudi le communiqué de la HAC, en ce sens qu’elle sonne comme une injonction, et donc une atteinte à la liberté de la presse. Dans un communiqué rendu public, la Maison de la Presse exprimé sa surprise «d’apprendre sur les réseaux sociaux, un communiqué de la haute autorité de la communication, invitant les médias (radios, télévisions, journaux écrits et en ligne) à arrêter toute diffusion et publication des actualités des partis politiques et des activités à caractère politique des associations». Après la réunion de son état-major, l’association a décidé de rejeter «purement et simplement ce texte sans fondement juridique de la HAC». Et «appelle l’ensemble de la presse malienne à ne pas se soumettre aux injonctions de la HAC et invite les médias à rester debout, unis et mobilisés pour la défense du droit du citoyen à l’information», lit-on dans le document.

Par ailleurs, l’imam Dicko, qui a annoncé, depuis Alger, son retour au Mali, a réagi à cet état de fait en affirmant qu’«il n’y a plus de sérieux dans notre pays, il n’y a plus que le mensonge». Et d’expliquer que  «plus personne ne peut parler, car les jeunes (les colonels) sont séduits par le pouvoir. Tout ce que nous disons qui ne va pas dans ce sens est mal perçu». Devenu persona non grata pour la junte, l’imam estime qu’il est «dénigré» parce qu’il a refusé «d’aider certains qui détiennent un certain pouvoir aujourd’hui. C’est ce qui m’effraie le plus», dit-il. «Ils ont manipulé les jeunes pour mieux les trahir ensuite. Ils les ont mis en conflit avec la communauté internationale et entre eux-mêmes. Maintenant, le pays est au bord du gouffre et ils ne savent plus quoi faire», a-t-il déploré.

La communauté internationale s’est également saisie de ce dossier et exige l’annulation des dernières décisions de suspension des partis et des associations. En effet, le haut commissariat de l’ONU aux droits de l’homme a demandé jeudi aux autorités de la transition au Mali «d’abroger immédiatement» la suspension des activités des partis politiques.

D.B.