La Banque d’Algérie résolument tournée vers une digitalisation massive : La fin de la culture du cash ?  

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/Pour réussir la relance économico-sociale, l’Algérie est dans l’obligation de faire des choix stratégiques concernant l’adaptation de son système financier et l’intégration de la digitalisation financière pour accompagner l’évolution et les mutations qu’enregistre aujourd’hui le monde de la finance.

Les participants à la journée d’étude organisée, hier, par le Cercle d’action et de réflexion pour l’entreprise (CARE) sous le haut patronage du Premier ministère, le ministère des Finances et la Banque d’Algérie, ont insisté sur la nécessité d’accélérer la mutation des services bancaires pour intégrer la sphère de la technologie.En effet, pour suivre l’évolution dans le monde de la finance et la migration avec la digitalisation des services financiers, le vice-gouverneur de la banque d’Algérie, Mouatassem Boudiaf a annoncé que «la loi sur la monnaie et le crédit est aujourd’hui en chantier de refonte dont la finance digitale occupe une place importante» tout en affirmant que la digitalisation de la Banque d’Algérie est bel et bien entamée. «La Banque d’Algérie est résolument tournée vers une digitalisation massive que ce soit en interne ou en externe. En interne, on est en train de vivre une mutation technologique, nous avons décidé de réorganiser le métier de la Banque centrale et d’aller vers «une simulation économique», et ce, en se donnant les outils et les instruments nécessaires pour le faire correctement», affirme-t-il.  Le vice-gouverneur de la BA a souligné, qu’il y avait un « énorme » effort à faire pour gagner la confiance des citoyens et les inciter à utiliser les moyens de paiement électronique. A ce propos, M. Boudiaf a fait constater que la majorité des détenteurs de Carte interbancaire (CIB) ou Edahabia d’Algérie Poste utilisent leurs cartes uniquement pour le retrait. « En revanche, ils préfèrent utiliser le cash dans leurs transactions de paiement », a-t-il poursuivi. Chiffre à l’appui, le nombre des comptes dépassent les 23,6 millions au niveau d’Algérie Poste et 14 millions au niveau des banques : « Les chiffres sont considérables, mais ce n’est pas pour autant que ces gens utilisent l’instrument de paiement électronique », a-t-il fait remarquer.

80% des transactions électroniques sont des retraits d’argent

D’après les chiffres avancés par M. Boudiaf, 80% des opérations de transactions électroniques en Algérie sont des retraits d’argent, alors que le taux d’utilisation des cartes bancaires pour le paiement n’excède pas les 6%.

« Plus de 1.000 milliards de dinars sont retirés en espèces chaque année au niveau d’Algérie Poste », soutient-il. « Il faut analyser ce problème du point de vue social, car nous sommes en pleine mutation civilisationnelle », a-t-il recommandé, en affirmant qu’il était nécessaire de gagner d’abord la confiance des particuliers et commerçants. Pour ce faire, il faut réunir toutes les conditions permettant d’assurer le fonctionnement des instruments de paiement électronique de manière « continue et absolue », avance-t-il. Pour ce qui est de l’inclusion financière, dans un environnement marqué par l’ancrage de la culture du cash au sein de la société, le président de CARE, Slim Athmani, estime qu’il est question dans les premiers temps de mener des campagnes de sensibilisation pour changer le rapport des Algériens à la monnaie fiduciaire. «C’est d’abord, un travail de sensibilisation important qui devait se faire sur le plan socio-économique visant à changer la culture du cash qui est ancrée dans la société. Après, il faut que les établissements financiers et les banques s’inscrivent dans cette démarche et ne constituent pas des embuches pour le développement de ce secteur. Comme cela s’est fait dans le passé», explique-t-il. 

Inclusion financière, quelle solution ?

L’inclusion financière est l’une des priorités absolues dans le programme de la réforme du système financier initié par le gouvernement début 2020, mais les résultats restent loin des objectifs esquissés. A titre d’exemple, la canalisation de l’argent de l’informel dans le circuit bancaire demeure toujours d’actualité. Selon les estimations officielles, près de 90 milliards de dollars circulent dans le circuit informel. Comment bancariser cette somme colossale ? Pour ce think tank algérien, «la diversités des solutions est un fait et l’inclusion financière est un choix». Ces experts affirment que la seule solution existante et qui peut remédier à cette situation réside dans la volonté des pouvoirs publics de lancer une migration «sérieuse» vers la «finance digitale», et ce, «avec une plus grande implication des établissements financiers pour la fourniture de services numériques inclusifs.» En allant plus dans les détails, le CARE assure que «le secteur financier détient la réponse à toutes les problématiques économiques qui se posent aujourd’hui. L’inclusion financière est un moyen de soutenir la croissance économique, la résilience aux crises et le financement de startups innovantes, réduire la pauvreté, tant son rôle est prépondérant dans l’accompagnement du progrès et des changements sociaux et économiques vers un monde plus durable.»  En fait, selon le CARE, l’Algérie dispose de tous les atouts lui permettant de réussir cette migration vers «la digitalisation financière», notamment en matière de connectivité à internet avec un taux de 90% en 3G et de 116% de pénétration mobile auxquelles s’ajoutent le taux élevé d’alphabétisation qui est de plus de 90%. «Des critères qui favorisent la digitalisation du système bancaire, élément clé de la reprise économique, et laissant présager un accueil massif des services financiers numériques (SFN) par la population algérienne, particulièrement celle non ou faiblement servie par le réseau bancaire, ainsi que celle ne disposant pas de services financiers adéquats», estime le CARE.

La monnaie électronique pour remplacer la monnaie fiduciaire !

Pour soutenir cette migration vers la digitalisation financière, l’intervenante Me Alice Negre, spécialiste en inclusion financière de l’UNCDF de Londres, a décortiqué la problématique de la monnaie électronique, qui, selon elle, est un moyen important pour la canalisation du cash. «Pour étayer ces dires, cette dernière évoque la nécessité de dépôts de l’argent en cash pour remplir le portefeuille électronique sur le mobile, en permettant au client de faire des micro-versements. Elle représente le socle de développement des services financiers élaborés, et ce, en garantissant la disponibilité du cash pour le financement ou l’octroi des crédits aux micro-entreprises». Sur ce point, le vice-gouverneur de la Banque d’Algérie affirme que la décision dépasse son institution et que «l’émission de la monnaie électronique ou fiduciaire ressort des prérogatives de la Banque centrale».  

A. B.