L’organisation perd une bataille contre l’Alliance des Etats du Sahel : La Cédéao lève les sanctions contre le Niger

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PAR DJILALI B.

Empêtrée dans ses contradictions dues en partie à son incapacité à s’imposer devant les Etats rebelles de sa composante, la Cédéao, acculée, a fini par abdiquer devant la résistance du Niger. Réunie hier en sommet extraordinaire à Abuja, au Nigeria, les Etats de la Cédéao, sans le Mali, le Niger, le Burkina et la Guinée, exclus pour cause de putschs, ont décidé de lever les sanctions imposées au Niger. Ces sanctions n’ont pas eu l’effet attendu. Bien au contraire, elles ont renforcé les liens entre les pays sanctionnés, notamment le trio Mali-BurkinaNiger, sans compter les effets collatéraux sur la zone frontalière commune au Niger et au Nigeria que le premier a décidé de fermer. Y compris pour le trafic aérien.

Paradoxalement, ni la Guinée, ni le Burkina, ni le Mali n’ont subi autant de sanctions que le Niger ; des sanctions assorties d’une menace d’intervention de la force militaire en attente de la communauté. Même le Sénégal de Macky Sall, qui a reporté la présidentielle après avoir terrorisé l’opposition, n’a eu droit à aucune remontrance de la part de la Cédéao. Cette frappante contradiction a été relevée par les politiques et les observateurs dont certains prédisaient la fin de cette organisation qui a, selon les dirigeants du Mali, du Niger et du Burkina, outrepassé ses prérogatives et dévié de ses valeurs tant elle était censée contribuer au développement des quinze pays qui la composent.

Placés sous le régime des sanctions, le Mali, le Niger et le Burkina ont mis au point une stratégie de défense commune. D’ordre militaire d’abord, avec un accord de défense commune. Des mouvements de troupes, du côté des nouveaux alliés, ont d’ailleurs été signalés aux frontières avec le Niger, lorsque la Cédéao a brandi la menace d’intervenir pour rétablir le président déchu, Mohamed Bazoum.

Ainsi naquit l’Alliance des Etats du Sahel, qui va élargir la coalition aux domaines politique et économique. Ils ont évoqué à ce propos l’intégration économique à travers un marché commun, une monnaie commune, d’ailleurs encore à l’ordre du jour, et un espace aérien commun avec l’éventualité d’une compagnie aérienne commune, à l’ordre du jour de la discussion prévue à Ouagadougou. Le clou a été sans aucun doute la décision du trio d’Etats de se retirer de la Cédéao.

«Effet immédiat»

La Cédéao s’est affairée, par médiateur interposé, en vain, à faire revenir les trois pays sur leur décision. Dans leur riposte, les présidents de transition du Mali et du Burkina, Goita et Traoré, ont été plus virulents, d’autant plus qu’ils avaient pointé du doigt, au départ, de la main française derrière les agissements de l’organisation. Finalement, acculée, la Cédéao a fini par céder et décidé hier lors du sommet extraordinaire d’Abuja de lever les sanctions contre le Niger.

« La Cédéao a décidé de lever avec effet immédiat les plus lourdes sanctions imposées au Niger depuis la prise du pouvoir à Niamey d’un régime militaire qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum en juillet », a indiqué hier Omar Alieu Touray, président de la commission de la Cédéao. Seules les sanctions politiques et individuelles restent en
place, est-il précisé. Toutefois, cette initiative risque de se heurter à l’opposition des deux autres pays de l’AES, qui demeurent, eux, sous le coup des sanctions.

Cela d’autant plus qu’ils ont annoncé leur retrait de la Cédéao, et lancé parallèlement les projets d’intégration économique, de création d’une monnaie unique, et d’entraide militaire. Des projets quasiment finalisés au niveau des chefs d’Etat et des ministres. Reste cependant à connaître la réaction du Niger et de l’AES. Cette réaction pourrait signer l’amorce de la fin de la Cédéao qui semble avoir atteint les limites de sa validité.

D. B.