Mental Health Talks : Une initiative pour déconstruire les tabous sur la santé mentale

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PAR LATIFA ABADA

La santé mentale mentale représente pour chaque individu un point d’équilibre. Quand elle est altérée, c’est tous les aspects de la vie qui sont ébranlés. Pourtant celle-ci est souvent sujette au déséquilibre. Pour remédier à cette situation, trois Algériennes ont lancé l’initiative « Mental Health Talks » dont l’objectif est de lever le rideau des tabous autour de la santé mentale.

« Notre objectif est d’informer notre communauté sur les troubles liés à la santé mentale. Nous voulons dédramatiser la situation. Les personnes souffrant de dépression ou d’anxiété ont tendance à encore s’isoler, car c’est tabou d’en parler », indique Manel, confondatrice de l’initiative Mental Health Talks.

Manel revient sur la genèse du projet qui remonte à 2019. La jeune femme étudiait l’anglais à l’université de Bouzaréah et était très active dans le mouvement associatif. Avant la fin de ses études, elle voulait initier un projet autour de la santé mentale.

« Je suis très portée sur la psychologie ; je lis énormément là-dessus. Quand j’étais étudiante, je remarquais aussi qu’une grande charge mentale pesait sur le monde estudiantin. C’est comme ça que les choses ont commencé par la création d’une page sur Facebook où je publiais des articles que je rédigeais en anglais », précise-t-elle.

L’intérêt est immédiat, beaucoup de personnes la félicitent pour l’initiative. Certains sont sceptiques, notamment les professionnels de santé ; d’autres demandent que le contenu soit en arabe ou en français, etc. Ces retours vont inciter Manel à redéfinir les objectifs de son projet, affiner le contenu et le rendre plus ciblé. Si, au départ, le projet était ouvert aux contributions, aujourd’hui Manel travaille avec Jihen et Lamia, toutes les deux psychologues cliniciennes.

« Nous sommes trois aujourd’hui à porter le projet. Je suis chargée du management du projet. Lamia et Jihen s’occupent du contenu et de l’interaction avec les personnes qui nous contactent. Une relation de confiance s’est instaurée avec notre communauté, c’est pourquoi des personnes en situation de détresse nous écrivent pour leur venir en aide.

Lamia et Jihen prennent en charge ces appels en écoutant ces personnes et ensuite les diriger vers les professionnels de la santé », explique Manel.

Elle ajoute que Mental Health Talks dispose d’une base de données de psychologues et psychiatres sur tout le territoire national afin d’orienter ceux qui veulent consulter.

« Cette base de données est constituée de médecins que nous avons connus dans le cadre de notre activité. Nos abonnés partagent également avec nous leur retour d’expérience avec d’autres médecins et dont la prise en charge est selon eux très efficace. »

«Détabou» : et si on remettait les idées à leur place

Selon Manel, beaucoup de fausses informations et idées reçues gravitent autour de la santé mentale. Avec Détabou, les trois jeunes femmes définissent des thèmes et invitent des thérapeutes et des psychiatres à apporter un éclairage et démystifier les troubles de la santé mentale.

« Nous avons mis en ligne trois épisodes. La dernière traite du psychotraumatisme avec la psychothérapeute Ledmia Embarek. Dans cet entretien la clinicienne explique l’origine du psychotraumatisme, les conséquences, et sensibilise à la prise en charge. L’idée est toujours d’informer. Il y a une profusion d’informations autour des maladies et en dehors des médecins personne n’est qualifié pour établir un diagnostic », souligne-telle.

Le contenue de Mental Healt Talks accorde une grande importance à la sensibilisation. Sur une des vidéos, le sujet du suicide est traité avec la plus grande vigilance.

« Nous faisons très attention lorsque nous évoquons des sujets importants comme le suicide. Nous évitons de parler des symptômes pour que les personnes ne s’identifient pas. Par contre, nous essayons de sensibiliser l’entourage en mettant en garde contre la banalisation. Quand une personne franchit le pas et se confie, il ne faut pas lui dire que ce n’est rien et que ça va passer ».

Manel explique que dans notre société la guérison est souvent liée au degré de piété.

« Lorsqu’une personne se sent mal, on lui dit souvent d’être plus assidue dans sa prière
ou de faire des rokia. On essaie de déconstruire ces idées reçues qui font beaucoup de
mal en expliquant que les troubles de la santé mentale sont liés aux aléas de la vie et
que chaque personne passe par des moments difficiles », souligne-t-elle.

Le dernier épisode de Détabou sera projeté en présence du public le 22 février à la bibliothèque du CCU d’Alger-Centre. La rencontre portera sur le traitement médicamenteux.

L. A.