Réduction des taux de sucre dans les boissons : 8 mois pour relever le défi

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Réduction des taux de sucre dans les boissons : 8 mois pour relever le défi

Par Wafia Sifouane

Véritable problème de santé publique, la surconsommation de sucre fait des ravages en Algérie et explose les taux de propagation de certaines maladies cardiovasculaires et chroniques.

Selon Mustapha Zebdi, président de l’association de protection et d’orientation du consommateur et son environnement, cette dernière s’élèverait à 42 kg/an pour chaque habitant «soit presque le double de la moyenne universelle qui est de 23 kg/an par habitant», a-t-il précisé, en relevant que l’organisation mondiale de la santé recommande une consommation de sucre qui n’excède pars 10 kg/an par habitant.

En 2016, l’organisation avait même indiqué que la consommation de sucres libres ne devrait pas dépasser 10% des besoins énergétiques totaux ; or cette quantité est présente dans un seul verre de boisson sucrée. «L’Algérien est vraiment dans l’excès, c’est pour cela que nous ne cessons de lancer l’alerte pour attirer l’attention du consommateur et des autorités sur la nécessite de réduire considérablement notre consommation de sucre et d’aller vers une alimentation plus saine», explique notre interlocuteur.

Hamani : «C’est un combat que nous menons depuis 2016»

Face à ces chiffres qui donnent froid dans le dos, le gouvernement, pour sa part, a réagi avec deux arrêtés ministériels qui entreront en vigueur en juin et novembre prochains.

Le premier porte sur le règlement technique relatif aux jus et nectars de fruits, jus de légumes et boissons aux jus de fruits et/ou de légumes, du 21 mars 2022, dès juin prochain.

Le second porte sur la fiche technique fixant les spécifications de certaines boissons rafraîchissantes.

Deux textes de loi qui, en plus de réguler le marché de l’industrie de la boisson, réduisent considérablement le taux de sucre dans certaines boissons désormais fixé à 105 g de sucre par litre.

Une véritable avancée pour la santé publique mais aussi pour les producteurs de boissons dont «la plupart œuvrent depuis de nombreuses années à la réduction du taux de sucre par pur engagement pour la santé des consommateurs», nous confie Ali Hamani, président de l’association des producteurs algériens de boissons.

«C’est un combat que nous avons mené depuis 2016 et je peux vous confirmer qu’il existe de nombreux producteurs algériens de boissons qui sont dans la norme réglementaire. Ils l’ont fait par engagement, mais aujourd’hui on peut se féliciter de l’existence d’un cadre juridique auquel tout le monde devra se plier».

En ajoutant : «Après observation du marché et les expériences de nos confrères ailleurs, nous avons constaté que la meilleure façon de faire accepter au consommateur algérien une boisson moins sucrée, c’est de façon graduelle, sans l’informer, histoire d’habituer son palais, et c’est ce qu’ont fait de nombreux producteurs algériens.»

Néanmoins, notre interlocuteur a déploré que ces textes de loi maintiennent certaines zones d’ombre, notamment en ce qui concerne l’absence de dénomination de «certains composants pourtant utilisés dans la confection de boissons», a-t-il fait savoir.

«Nous travaillons depuis 2018 avec le ministère de l’Industrie pour déterminer un certain nombre de règles et de dénominations Mais tout n’a pas été pris en considération, il y a encore des erreurs auxquelles nous tentons de remédier en demandant des réunions avec des techniciens», a-t-il fait savoir.

«Il n’y a pas que les boissons !»

Affirmant que l’industrie des boissons ne représente que 9% de la consommation nationale de sucre, notre interlocuteur a appelé l’ensemble des acteurs de l’industrie agroalimentaire à travailler sur la réduction du taux de sucre.

«Si l’on veut vraiment réduire les risques sur la santé, c’est toute l’industrie agroalimentaire qui est concernée. Il existe certains produits bourrés de sucre, mais dont la dénomination officielle ne plafonne pas le taux de sucre maximal. C’est le cas de la confiture», a-t-il expliqué.

Aussi, Ali Hamani a recommandé, en plus de l’application des décrets cités plus haut, le renforcement des contrôles, non seulement sur la quantité de sucre mais sur les composants des boissons, notamment l’apport en fruits.

Pr Khiati pour la généralisation de cette mesure

De son côté, Pr Mostefa Khiati, président du Forem (fondation nationale pour la promotion de la santé), a fortement salué cette mesure imposée par le gouvernement qui, selon lui, intervient à pic pour mettre un terme à une situation sanitaire catastrophique.

«Ce n’est pas un hasard si l’Algérie est le premier importateur de sucre en Afrique. Nous consommons énormément de sucre ; preuve en est, l’explosion du nombre de diabétiques qui est de 4 millions de malades déclarés, s’ajoute à cela un million de malades qui ignorent leur pathologie», a-t-il fait savoir.

Indiquant que la plupart des boissons sucrées ont une concentration en sucre entre 150g et 160 g pour un litre, notre interlocuteur a fait savoir qu’il s’agit d’«un combat que mène la Forem depuis dix ans», en espérant la généralisation de ce type de mesures sur d’autres produits alimentaires auxquels il reproche «des quantités de sucre colossale», à l’instar des yaourts.

Dans ce sens, Pr Khiati a préconisé un meilleur contrôle sur l’utilisation du sucre dans l’industrie agroalimentaire afin de préserver la santé publique.

W.S.