Affaire Técnicas Reunidas : la contre-attaque musclée de Sonatrach

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L’Algérie vient de lancer une contre-attaque musclée contre Técnicas Reunidas dans le cadre du procès qu’elle mène depuis 2022. Le consortium GTG, formé par Sonatrach et Neptune Energy, réclame désormais 760 millions d’euros pour manque à gagner, qui s’ajoutent aux 92 millions qu’il avait précédemment demandés. Il s’agit d’une réclamation d’un volume presque dix fois supérieur aux 80 millions d’euros demandés par Técnicas Reunidas au début de cet arbitrage. Técnicas Reunidas réclame actuellement dans cette affaire 166 millions d’euros au consortium algérien GTG, comprenant également les garanties bancaires, a fait savoir l’entreprise espagnole.

PAR NABIL M.

Dans le cadre du procès qu’il mène depuis 2022 contre Técnicas Reunidas, le groupe Sonatrach a exigé au spécialiste espagnol de l’ingénierie dans l’industrie pétrolière et gazière, la somme de 852 millions d’euros, selon ce qui a été rapporté hier par le journal espagnol El Confidencial. C’est le total des sommes réclamées par la compagnie nationale
d’hydrocarbures, qui avait déjà exigé le payement de plus de 90 millions d’euros auparavant, dans cette même affaire, et qui a exigé, en novembre 2023, la somme de 760 millions d’euros supplémentaires pour « manque à gagner » dans ce projet.

Dans ses déclarations à la presse espagnole Técnicas Reunidas se plaint, du fait que la somme réclamée par la compagnie algérienne est dix fois supérieure aux 80 millions d’euros demandés par cette même entreprise au consortium, au début de cet arbitrage. Voulant donner une dimension politique à une affaire purement commerciale les responsables de Técnicas Reunidas diront au média espagnol : « Le litige arbitral a été initié par l’entreprise en mai 2022 en raison de l’exécution des garanties par le consortium de
Sonatrach et Neptune Energy (GTG), coïncidant avec la tension diplomatique entre
l’Espagne et l’Algérie et malgré le fait que la réception provisoire de la centrale avait été réalisée il y a deux ans ». Si les arbitres acceptent cette forte créance contre l’entreprise espagnole, cela serait un coup dur pour une entreprise qui n’a obtenu que 60 millions de bénéfice net de en 2023.

D’ailleurs l’entreprise dirigée par la famille Lladó, qui joue sa survie dans cette affaire, a indiqué qu’elle s’oppose à cette dernière réclamation, en arguant qu’elle ne devrait pas être admise dans l’arbitrage en cours. « La décision sur sa recevabilité est en attente de résolution par le tribunal arbitral », ajoute la multinationale. Et pour expliquer son recours à un arbitrage international, Técnicas Reunidas dira que « peu avant l’achèvement des travaux, et bien qu’il y ait eu une bonne volonté entre les parties, celle-ci a été rompue et des garanties ont été exigées par la compagnie algérienne Sonatrach », a souligné la compagnie espagnole, regrettant que le coup porté par cette affaire ait détruit ses résultats cette année-là, au point que sa banque a dû lui accorder une dispense des exigences de remboursement du crédit accordé après la pandémie pour éviter la faillite de l’entreprise.

Un projet d’un milliard de dollars mis en jeu

L’affaire remonte à juin 2022, quand le consortium formé par la compagnie pétrolière publique Sonatrach et Neptune Energy a réclamé 80 millions d’euros à l’espagnol Técnicas Reunidas servant de garantie pour la construction d’un complexe d’hydrocarbures à Adrar, mais sans pour autant affecter le projet en cours. Une demande qui a coïncidé avec l’enclenchement de la crise diplomatique entre l’Algérie et l’Espagne, suite à la suspension le même mois du traité d’amitié entre l’Algérie et l’Espagne, mais qui est considérée comme une procédure habituelle entre deux partenaires, qui n’influe en rien sur les obligations contractuelles.

Deux années auparavant, en octobre 2020, l’espagnol Técnicas Reunidas avait engagé une action en justice contre le maître d’ouvrage de ce projet, en l’occurrence le consortium de Sonatrach et Neptune Energy, pour compenser les surcoûts de construction du complexe, ce qui a enclenché un processus avec des négociations qui ont été menées en Algérie au
cours du deuxième trimestre de 2022 et qui ont débouché sur la demande du client (le consortium de Sonatrach et Neptune Energy) d’assurer les garanties de bonne exécution fixées à 80 millions d’euros. Il est à noter que la firme espagnole d’ingénierie s’est vu attribuer ce contrat en août 2013 d’un montant de 1 milliard de dollars pour développer de nouvelles installations dans ce gisement de Touat Gaz près de la ville d’Adrar, située dans le sudouest du pays. Elle est associée à ce projet gazier avec Gaz de France et Samsung et la garantie touche les trois parties du consortium.

Le projet Touat Gaz comprenait l’ingénierie, l’approvisionnement, la construction et la mise en service d’installations de traitement de gaz d’une capacité de production estimée à 13 millions de mètres cubes par jour, ainsi qu’un réseau de collecte et d’expédition du gaz vers le GR5, et de routes et d’une base de vie.

N. M.