Akli Moussouni, expert agronome : «Les fermes pilotes n’étaient pas rentables»

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Foncier agricole

PAR NABIL M.

Pour donner une nouvelle impulsion au secteur agricole, les pouvoirs publics sont en phase de reconvertir les fermes appelées « fermes pilotes » en unités de production relevant de l’Etat, spécialisées en légumineuses, graines oléagineuses et arbres oléagineux. Ces fermes ont depuis longtemps souffert de mauvaise gestion, selon l’expert agronome et directeur de programme du CIE, Akli Moussouni. « Actuellement, il existe 160 fermes pilotes, qui détiennent les meilleures terres avec une superficie autour de 1000 ha chacune », a-t-il expliqué, ajoutant qu’elles disposent également de réserves hydriques importantes, notamment des nappes d’eau.

Pour l’expert, ces fermes ont été désignées comme fermes pilotes pour servir d’exemples de gestion pour les domaines autogérés qui ont été restructurés en entreprises agricoles individuelles (EAI) et entreprises agricoles collectives (EAC), a-t-il expliqué. Par ailleurs, l’expert en agronomie déplore le fait que dans la plupart des cas, ces fermes sont déficitaires avec des dettes accumulées à cause d’une mauvaise gestion. Ceci a poussé l’Etat à intervenir à plusieurs reprises pour tenter de les remettre à un partenariat public/privé. « Il y a trois ans, les pouvoirs publics ont créé un partenariat autour de ces fermes, à hauteur de 34% appartenant au secteur public et 66% au privé. Mais ce partenariat n’a pas marché », a-t-il expliqué.

Selon l’expert, ces mauvaises expériences dans la gestion de ces fermes sont dues au manque de vision dans la manière de gérer le secteur. Selon lui, ces fermes ont été transformées en entités commerciales, mais elles n’ont pas été rentables. Pour l’expert, le souci demeure dans le fait « de mettre l’agriculteur toujours au centre de gravité de la stratégie de développement de l’agriculture ».

Il faut un constat réel et des statistiques précises

Pour pallier toutes ces incohérences, Moussouni estime qu’il est important de revoir plusieurs points qui concernent la gestion du secteur agricole. « Il faut faire un constat réel du secteur et des statistiques plus précises pour connaître nos besoins », a-t-il souligné, ajoutant qu’il serait aussi nécessaire de mettre en place une politique agricole qui va revaloriser les territoires à travers de nouvelles organisations professionnelles autour des productions, non pas autour des agriculteurs. Aussi, l’expert propose de mettre en place des mécanismes légaux et exploiter les subventions de l’Etat en contrepartie à l’adhésion de ces nouvelles politiques, en insistant sur la nécessité de « dépolitiser le secteur agricole ».

L’expert a également mis l’accent sur la mise en place de système de planification de productions agricoles pour des objectifs économiques. « Il n’y a pas de solutions pour les fermes pilotes toutes seules, ni pour l’agriculture saharienne toute seule, ni pour l’agriculture privée toute seule, mais il y a une seule solution, une politique agricole qui prend en charge tous ces composants de l’agriculture », a conclu Moussouni.

N. M.