Elle n’exclut pas revoir les prix de gaz vendu à l’Espagne : L’Algérie passe à l’acte

0
21

/L’Algérie n’exclut pas de réviser à la hausse le prix du gaz cédé à l’Espagne. Cette mesure annoncée par le PDG de la Sonatrach, Toufik Hakkar, qui intervient dans le sillage de la brouille diplomatique entre Alger et Madrid, est l’une des conséquences du revirement de la position du gouvernement espagnol à l’égard du Sahara occidental, en annonçant son soutien au plan d’autonomie marocain.

Dans une déclaration à l’agence officielle APS, le PDG de Sonatrach, Toufik Hakkar, a en effet affirmé qu’«il n’est pas exclu de procéder à un « recalcul » des prix avec notre client espagnol», en arguant que «depuis le début de la crise en Ukraine, les prix du gaz et du pétrole explosent. L’Algérie a décidé de maintenir, pour l’ensemble de ses clients, des prix contractuels relativement corrects».

Vue d’Espagne : la décision est politique

Des sources du secteur en Espagne soulignent que le processus de renégociation des contrats de fourniture de gaz est ouvert depuis des mois, bien avant qu’il n’y ait des divergences politiques. « C’est une révision ordinaire, qui a lieu environ tous les trois ans, et il était temps », soulignent-ils tout en rappelant qu’avec Sonatrach, il n’y a pas eu de problème ces derniers temps. Un porte-parole de Naturgy, qui est en réalité le partenaire et client de la société algérienne en Espagne, affirme que les relations avec Sonatrach sont « fluides ». Les détails – et surtout le prix – de ces contrats sont l’un des secrets les mieux gardés de l’industrie de l’énergie. Cependant, des sources gouvernementales espagnoles soulignent au journal « El Mondo » que la décision de la Sonatrach d’augmenter le prix du contrat gazier, est considérée une des «représailles» à la nouvelle position de l’Espagne concernant le Sahara Occidental.  « Le client n’est pas l’Etat espagnol mais une entreprise privée » en référence à Naturgy. C’est vrai, mais le gouvernement parraine le contrat à tout moment en raison de son importance clé pour les consommateurs espagnols. C’est pourquoi le ministre des Affaires étrangères, José Manuel Albares, s’est rendu à Alger en octobre dernier afin d’éviter que Naturgy, le principal opérateur gazier du pays, ne perde son approvisionnement après la fermeture du gazoduc qui traverse le Maroc», rappellent-ils. «Le gouvernement algérien sait que le contrat avec Naturgy est, en réalité, avec l’Espagne en raison de son importance pour la consommation de gaz du pays et le traite politiquement avec cette vision», ajoutent les mêmes sources. Et de rappeler que «la crise diplomatique avec le principal fournisseur de gaz espagnol coïncide avec le droit contractuel de l’entreprise algérienne de revoir les prix du contrat espagnol pour la période 2022-2024, la principale compagnie gazière espagnole avait déjà entamé des pourparlers à ce sujet en octobre dernier dans une négociation qui se poursuit et que la Sonatrach avait déjà l’intention de réviser à la hausse en raison de la hausse des prix sur le marché international. Mais, «la singularisation» de l’Espagne dans cette révision à la hausse renvoie désormais exclusivement à des raisons politiques liées à la question du Sahara, fait remarquer le journal.

L’Espagne perd ses privilèges

La décision d’augmenter le prix du gaz  à l’Espagne, dont 42% des importations proviennent de l’Algérie, est en effet le signe que l’Algérie est passée à l’acte à l’encontre de ce pays. Après le rappel par Alger de son ambassadeur en Espagne pour « consultations » suivi de la suspension « sine die » par l’Algérie de tous les rapatriements d’immigrants clandestins et le refus du ministère algérien des Transports d’étendre, dans la phase post-pandémie, les vols à destination de l’Espagne, ce pays vient de perdre son statut de partenaire privilégié auprès d’Alger, devenant un client ordinaire. Et la compagnie espagnole Naturgy a beau expliquer la décision par des considérations commerciales, mais Alger a déjà annoncé la couleur que plus rien ne sera comme avant. Ce qui confirme les récentes déclarations faites à partir de la capitale italienne Rome par, Chakib Kaid, le  secrétaire général du ministère des Affaires étrangères, selon lequel, «l’Algérie va revoir tous les accords avec l’Espagne, dans tous les domaines, pour voir comment la relation évolue à l’avenir». Il est clair aussi, que l’Espagne n’aura pas ce statut tant rêvé de futur porte de l’Europe pour le gaz algérien au profit de l’Italie qui est la mieux placée pour fournir l’Europe en gaz. Aussi, le PDG de la Sonatrach qui s’est exprimé sur la capacité de l’Algérie à augmenter les quantités de gaz exportées, a confirmé l’impossibilité de remplacer la Russie en tant que fournisseur de gaz à l’Europe. «Nous disposons à l’heure actuelle de quelques milliards [de m³ supplémentaires] qui ne peuvent se substituer au gaz russe. En revanche, avec la cadence de nos explorations, nos capacités vont doubler d’ici 4 ans, ce qui laisse entrevoir des perspectives prometteuses avec nos clients européens», a déclaré Toufik Hekkar.

A. R.