Financement des déficits publics : Le fonds de régulation à la rescousse

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Ministère des finances

PAR R. AKLI

Charriant des dépenses en très forte hausse, destinées notamment à la couverture des programmes d’investissement publics et l’action sociale de l’Etat, le projet de loi de finances pour 2024 (PLF 2024) induit des niveaux de déficits publics élevés dont le financement devra être assuré essentiellement par le recours au fonds de régulation des recettes (FRR) ainsi qu’au marché des valeurs du trésor.

Soumis aujourd’hui à l’approbation des membres de l’APN, le PLF 2024 prévoit en effet des
dépenses prévisionnelles conséquentes de l’ordre de 15.275 milliards de dinars, destinées entre autres à la prise en charge des différentes mesures visant la protection du pouvoir d’achat des citoyens ainsi que le soutien à l’investissement public. En parallèle, les recettes budgétaires attendues pour l’exercice prochain devront s’établir à un niveau de plus de 9105 milliards de dinars, avec un recul prévisionnel de la fiscalité pétrolière de l’ordre de 8,9%, alors que celles ordinaires devraient augmenter de 5% pour atteindre un montant de 5593 milliards de dinars en 2024.

Ainsi ordonnancées, les finances de l’Etat pour l’exercice à venir afficheront des déficits relativement importants, celui budgétaire devant passer ainsi d’un niveau de 16,4% par rapport au produit intérieur brut (PIB) à la clôture de l’exercice en cours, à 17,4% du PIB pour la fin de l’exercice prochain, tandis que le déficit global du trésor devra, quant à lui, finir l’année à un niveau de 18,8% du PIB avant de se creuser en 2024 à 19,9% du PIB.

Considérés comme artificiels, car résultant de projections très prudentes sur l’évolution des prix du pétrole sur le marché international, ces déficits devront donc être comblés in fine en bonne partie par des prélèvements sur le FRR, dont les recettes proviennent justement de surplus de plus values de fiscalité pétrolière par rapport aux basses prévisions de prix du baril retenues comme base de référence à l’élaboration du budget de l’Etat. En fixant en effet un prix de référence du baril de pétrole de 60 dollars seulement et un prix prévisionnel du marché à 70 dollars, alors les cours pétroliers mondiaux se situent bien au-delà, le PLF 2024 devrait ainsi dégager des surplus de recettes qui seront ainsi injectés
au fonds de régulation à la clôture de l’exercice.

Aussi, selon les chiffres dévoilés récemment par le ministre des finances Laaziz Faïd dans ses réponses aux questionnements des députés sur la maîtrise des dépenses publiques, le FRR qui affichait à la fin de l’exercice écoulé un solde positif de 1966 milliards de dinars, devrait clôturer l’exercice en cours avec des avoirs attendus à 1797 milliards de dinars. Des fonds issus donc du différentiel de recettes à prévoir sur la base d’un prix de référence du pétrole de 60 dollars le baril et celles à réaliser effectivement en 2024 en tenant compte des prix réels du marché pétrolier.

Un surplus qui servira ainsi en bonne partie à couvrir les déficits de l’Etat, tel que l’a précisé le ministre devant les députés lors des débats sur le projet de loi de finances pour l’exercice prochain. Or s’il est effectivement nécessaire d’adopter des projections prudentes
sur l’évolution des cours du pétrole pour parer à d’éventuels retournements de conjoncture, il n’en demeure pas moins que la logique autorisant des déficits plafonnés pour les couvrir en fin de parcours par des prélèvements sur le FRR interpelle à plus d’un titre quant à la politique budgétaire.

Les tirages sur les plus-values engrangées à travers ce fonds spécial du trésor, comme le
préconisent en effet nombre d’experts, devraient être à la fois rigoureusement plafonnés et servir davantage à financer l’investissement et la réalisation de projets structurants qu’à la couverture de déficits souvent induits par l’expansion des dépenses de fonctionnement.

R. A.